mardi 28 janvier 2020

The last straw


S'il est vrai que nous ne pouvons penser qu'à travers le langage et que, comme le soutenait Wittgenstein, toute interrogation philosophique peut être vue comme une interrogation sur la signification des mots, alors la situation de l'homme du nihil est véritablement désespérée et il ne lui reste plus qu'à se pendre (mais c'était son intention de toute façon).

(Lucien Pellepan, Énantioses profectives)

vendredi 24 janvier 2020

Dîner artistique


L'homme du nihil, un jour qu'il était en verve, compara la vie à un dîner artistique : en entrée, une soupe de pommes de terre (qu'il n'aime pas) ; ensuite, un véritable sandre du lac Balaton ; et pour finir, en guise de dessert, un nègre en chemise, comme cela s'appelle. Ô vanité des vanités ! Ô rictus bestial de l'existence !

(Lucien Pellepan, Énantioses profectives)

lundi 20 janvier 2020

Non au joug du désespoir


La pluie, le vent, l'obscurité, la folle poignance du pachynihil... Oui, tout cela est vrai, mais... « nous n'acceptons point le joug du désespoir ».

(Lucien Pellepan, Énantioses profectives)

samedi 18 janvier 2020

Dévastation nihilique


« Repoussée de Marseille par les armes du comte Boniface, l'idée du Rien se vengea de cet échec par le ravage de mon conscient intérieur, et renouvela dans ma pachyméninge les scènes de dévastation des Vandales. » (Stylus Gragerfis, Journal d'un cénobite mondain)

(Lucien Pellepan, Énantioses profectives)

dimanche 12 janvier 2020

Exécration


Plus exhaustif qu'un Baudelaire, l'homme du nihil exècre non seulement la tyrannie de la face humaine, mais aussi les miroirs convexes, les « dispositifs », et les citateurs de Giorgio Agamben.

(Lucien Pellepan, Énantioses profectives)

jeudi 9 janvier 2020

Armée belge


« Dans l'armée belge, on n'avance guère que par le suicide. » (Charles Baudelaire, La Belgique déshabillée) — « Comme dans l'intelligence métaphysique du monde ! », s'exclame l'homme du nihil.

(Lucien Pellepan, Énantioses profectives)

lundi 6 janvier 2020

Disqualification


Par sa bassesse et sa trivialité, le vocable gloméruleux disqualifie le monde et son créateur.

(Lucien Pellepan, Énantioses profectives)

vendredi 3 janvier 2020

Les vrais durs ne respirent pas


Celui qui fuit le ridicule, s'il est un tant soit peu conséquent, c'est la vie même qu'il doit fuir (au moyen, par exemple, de l'homicide de soi-même). — Alright ?

(Lucien Pellepan, Énantioses profectives)

mercredi 1 janvier 2020

La femme (toujours elle)


« La femme est naturelle, c'est-à-dire abominable », a dit Baudelaire. Et elle l'est, en effet !

(Lucien Pellepan, Énantioses profectives)

dimanche 29 décembre 2019

Un être pascalien


L'homme du nihil n'est pas de marbre : le silence éternel des espaces infinis fait naître en lui un « traczir à tout casser ».

(Lucien Pellepan, Énantioses profectives)

vendredi 27 décembre 2019

Bien


L'homme du nihil trouve que la pièce Macbeth de Shakespeare est « bien », certes, mais tout de même pas aussi bien que de se pendre.

(Lucien Pellepan, Énantioses profectives)

lundi 23 décembre 2019

dimanche 22 décembre 2019

À la manière de Charles Millon


« Pas d'accord secret, pas d'accord discret » avec la réalité empirique !

(Lucien Pellepan, Énantioses profectives)

jeudi 19 décembre 2019

Dialogue platonicien


M. Bouboule : D'après Héraclite, la vie est dans le mouvement.
L'homme du nihil : Je l'emmerde.
M. Bouboule : Qui ça ? Héraclite ou le mouvement ?
L'homme du nihil : Les deux.
M. Bouboule : Je ne m'en mêle plus.


(Lucien Pellepan, Énantioses profectives)

mardi 17 décembre 2019

Un peu de bienveillance


L'homme du nihil conseille de faire preuve de bienveillance en toute chose et de ne pas juger l'humanité à partir des disciples de Derrida.

(Lucien Pellepan, Énantioses profectives)

dimanche 15 décembre 2019

Amour


Dans le « magazine féminin » que l'homme du nihil parcourt d'un œil distrait chez le coiffeur, cette révélation : pour être aimé, il est nécessaire de s'aimer d'abord soi-même. — « Oh, bon Dieu ! soupire-t-il. Me voilà bien ! »

(Lucien Pellepan, Énantioses profectives)

vendredi 13 décembre 2019

Femme


« La femme est la désolation du juste », a dit Proudhon. Et elle l'est, en effet !

(Lucien Pellepan, Énantioses profectives)

lundi 9 décembre 2019

Du beau


Comparée à celles de Kant, de Hegel et de Schopenhauer, l'esthétique de l'homme du nihil possède au moins le mérite de la concision : « Est beau, affirme-t-il, ce qui nous rappelle une (belle) femme nue. » — Tout n'est-il pas dit, et en peu de mots ?

(Lucien Pellepan, Énantioses profectives)

jeudi 5 décembre 2019

Mots


Selon Gragerfis, l'intérêt passionné que l'homme du nihil portait au logos entraînait une recrudescence spectaculaire de ses troubles, à tel point qu'il lui suffisait d'entendre le vocable reginglette pour tomber en proie à un « chaos de paralysies, de trémulations et de spasmes ».

(Lucien Pellepan, Énantioses profectives)

dimanche 1 décembre 2019

Objectification du Moi chez l'homme du nihil


L'autodétermination de la subjectivité coupée du monde, le solipsisme cartésien, nous les retrouvons chez l'homme du nihil. Son Rien ne fait que perpétuer l'objectification d'un Moi qui se représente lui-même comme une chose et, par suite, ce Rien lui-même participe en quelque sorte de cette chose. — Verstanden ?

(Lucien Pellepan, Énantioses profectives)

vendredi 29 novembre 2019

L'amour de son néant


« Mon centre est le néant, c'est un vrai lieu de paix, l'imposture et l'erreur ne s'y trouvent jamais. » (François Malaval, Poésies spirituelles) Et encore : « Qui sort de son néant sort de son origine, il se croit quelque chose et penche à sa ruine. » — Comme cela est beau et nous émeut au suprême !

(Lucien Pellepan, Énantioses profectives)

lundi 25 novembre 2019

Ordures (Stephen Dixon)


Deux types entrent et s'assoient au bar. « Messieurs, bonjour, dis-je, qu'est-ce que je vous sers ?
— Deux bières. Ce que vous avez.
— J'ai à la pression et en bouteille. Bière du pays ou bière étrangère.
— Deux pression de ce que vous voulez. On n'est pas pressés.
— C'est parti. »
Je tire les bières, je les sers, je tape la note et la dépose entre les deux verres sur le comptoir.
« Shaney, c'est vous ? me demande le petit trapu.
— Tout juste.
— C'est vous le patron ?
— Patron et barman, les deux.
— Eh bien, Shaney, ça c'est une bière bien servie. Avec une belle mousse. Les bières avec une belle mousse comme ça, on n'en trouve plus si souvent dans les bars, et vous, vous arrivez à en faire une de toute beauté. C'est drôlement bien.
— Pour la mousse, tout dépend de la manière dont on tire la bière. Je peux pratiquement faire une mousse de la taille que je veux. À propos, comment ça se fait que vous connaissiez mon nom ?
— Oh, c'est un de nos potes qui est déjà venu, il nous a dit que c'était un endroit sympa pour manger un morceau, écluser une mousse et créer des concepts. Il a dit aussi que vous vous appeliez Shaney, c'est tout.
— Et lui, comment il s'appelle ?
— Bergson, hein, c'est ça ? demande-t-il au petit maigrichon.
— Bergson. Mais je connais pas son prénom.
— Bergson ? Je ne crois pas connaître de Bergson, du moins pas au point de mettre un visage sur ce nom. Il est dans quelle branche ?
— Je ne sais pas trop ce qu'il bricole, il dit qu'il crée des concepts.
— Bergson, Bergson... Ah oui, ça me revient maintenant. Il est passé l'autre soir et il soutenait que la continuité et l'indivisibilité étaient constitutives du temps. D'après lui, la continuité est la forme spécifique de la vie consciente, la nature véritable de la conscience de soi. Vous imaginez un peu ? J'ai cru que j'allais être obligé de le mettre dehors.
— Oui, parfois il déconne grave, dit le petit trapu. Quand il est en train, il raconte que la durée est une donnée immédiate de la conscience. Et quand on lui demande ce qu'il entend par durée, il répond que c'est la pénétration mutuelle d'états de conscience hétérogènes, ainsi que leurs apparitions continues sans ordre ni interruption.
— Ouais, bon... Enfin, les clients bizarres, j'ai l'habitude... Allez, à la vôtre, les gars. »


(Étienne-Marcel Dussap, Forcipressure)