mercredi 26 septembre 2018

Propos de comptoir


« Non, décidément, quel pénible quiproquo que l'existence ! »

(Johannes Zimmerschmühl, Pensées rancies et cramoisies)

Usage médicinal du « cas »


« Le médicament estoit composé de merde de petit enfant, sèche et bien pulvérisée, et incorporée en miel exquis. Or estoit nourry cet enfant, dont on prenoit la matière fécale, de lupins adoucis, et de pain bien cuyt, et bien levé et salé. Son boyre estoit vin vieil : et le tout estoit avec telle modération, que l'enfant pouvoit le tout digérer. Et faut noter, que le premier jour qu'il commençoit à manger des viandes susdites à l'enfant, il ne se servoit point de la matière fécale qu'il faisoit le lendemain : ains le nourrissoit ce jour là, comme au jour précédent ; puis usoit de la matière fécale que l'enfant faisoit le troisième jour, ni plus ni moins qu'on fait des fumées des chiens. Et disoit d'ailleurs, celui qui avoit apprins la recepte, qu'il n'usoit de lupins, sinon pour rendre la matière de l'enfant moins puante ; et que quelquefois pour expérimenter les affaires, il donnoit à manger à l'enfant dessusdit de chair de poules, ou de perdris, bouillies avec un peu de potage ; et que néantmoins la matière ne laissoit d'opérer come dessus. Voyla que je te peux dire asseurément de la matière fécale de la personne. C'est ce qu'en dit Galien. Au reste, on fait d'eau de fiente d'homme, et surtout d'un homme roux, qui est fort bonne aux ulcères chancreux, caverneux, corrosifs, et fort difficiles à guérir. » (Pietro Andrea Mattioli, Commentaires sur les six livres de Pedacius Dioscoride sur la matière Médecinale, Rigaud, Lyon, 1567)

(Raymond Doppelchor, Océanographie du Rien)

Interlude

Jeune femme lisant l'Apothéose du décervellement de Francis Muflier

Programme


Figer le Moi dans une immobilité minérale, pour échapper à la mollesse et à la gluance tiède de la matière vivante... Tel est le programme de l'homme du nihil en sa cambuse.

(Johannes Zimmerschmühl, Pensées rancies et cramoisies)

Autonomie des formes


Pour Plotin, « les formes existent sans que celui qui pense chacune d'elles lui donne l'existence par cette pensée même ». Cela est vrai, sans contredit, et particulièrement du « cigare japonais », au grand désespoir de la gent constipée.

(Raymond Doppelchor, Océanographie du Rien)

Règle numéro 4


Il faut se teindre d'imprévisible. Se plaquer d'opaque.

(Luc Pulflop, Prière d'incinérer. Dégoût)

Sanglier


La sœur du cabaliste l'en ayant prié, le chef bohémien reprit son histoire en ces termes :

« Le sanglier, du latin singularis, solitaire, est un genre de mammifères pachydermes, dont le type habite l'Europe : le sanglier établit sa bauge dans les fourrés. (Cri : le sanglier grommelle, nasille.) — Le sanglier est le porc sauvage ; c'est un animal puissant et qui cause de grands ravages dans les champs ; sa femelle se nomme laie et ses petits marcassins. La chair de cet animal est bonne à manger. »

En ce moment, un homme de sa horde vint le chercher, et nous ne le revîmes plus de toute la soirée.


(Jean-Paul Toqué, Manuscrit trouvé dans Montcuq)

Interlude

Jeune femme lisant Philosopher tue de Jean-Guy Floutier

Densification du mélancolique


« Certains mélancoliques ressemblent à des animaux à sang froid, à des pierres ; on dirait que la chaleur et la vie se sont retirées d'eux ; il semble que dans tout le corps, les solides et les liquides augmentent de densité, que la créature se densifie, se tasse sur elle-même, se ratatine, et doit occuper le moins de place possible dans l'espace. » (Paul-Ferdinand Gachet, Étude sur la mélancolie, Paris, 1864)

(Raymond Doppelchor, Océanographie du Rien)

Règle numéro 3


Fuir dans le prisme livide des vins résinés le conciliabule hypnagogique avec l'Un.

(Luc Pulflop, Prière d'incinérer. Dégoût)

Sinapisation


Frédéric-Auguste Cazals, dans son livre de souvenirs Les Derniers jours de Paul Verlaine, rapporte que le poète regardait comme une véritable hérésie gastronomique le fait de manger de la moutarde avec du ragoût de mouton ; c'était, d'après lui, un trait d'inélégance et presque de barbarie !

(Robert Férillet, Nostalgie de l'infundibuliforme)

Une arme redoutable


« Le couperet dont se sert le phénoménologiste, et dont l'ancêtre est le fameux rasoir d'Occam, est d'une seule pièce. Son tranchant est d'environ 2 pieds et sa hauteur de plus d'un pied ; le manche a environ la même longueur. Cet instrument est si lourd qu'il sépare presque par son propre poids le morceau de réalité empirique sur lequel il tombe. On peut juger de l'activité de ce philosophe quand on apprend qu'il dépèce ordinairement, en 8 heures de travail, 30 phénomènes du poids de 450 livres chacun. » (François Malepeyre, Transcendance et mondanité, Paris, Mercure de France)

(Raymond Doppelchor, Océanographie du Rien)