« Quand j'entends le mot vivre, je sors mon revolver ou du poison. » (Luc Pulflop)
jeudi 23 août 2018
Haeccéité
Tout ce qui est, est d'une certaine façon. Le ridicule de cela.
(Luc Pulflop, Prière d'incinérer. Dégoût)
Axiome lacanien
Il est notoire que « ce qui est forclos du symbolique resurgit dans le réel ». Et quelle meilleure illustration de cet axiome que le déboulé du « Suisse » hors du proverbial « boyau culier » ?
(Raymond Doppelchor, Océanographie du Rien)
Visqueux froid
L'esprit méthodique et clair des Grecs n'a jamais pu exercer la plus légère influence sur l'imagination débordante et sans méthode de l'homme du nihil d'où surgissent incessamment des poulpes, des béryx, des poissons-vipères, des baudroies, « tout un bestiaire enfin qu'on jurerait sorti de la cervelle d'un noyé ».
(Robert Férillet, Nostalgie de l'infundibuliforme)
Robustesse psychique de l'habile physicien
« En compulsant les registres de l'hospice des aliénés de Bicêtre, on trouve inscrits beaucoup de prêtres et de moines, ainsi que des gens de la campagne égarés par un tableau effrayant de l'avenir ; plusieurs artistes, peintres, sculpteurs ou musiciens ; quelques versificateurs extasiés de leurs productions, un assez grand nombre d'avocats et de procureurs ; mais on n'y remarque aucun des hommes qui exercent habituellement leurs facultés intellectuelles ; point de naturaliste, point de physicien habile, point de chimiste, à plus forte raison point de géomètre. » (Ph. Pinel, Traité médico-philosophique sur l'aliénation mentale, Brosson, Paris, 1809)
(Marcel Banquine, Exercices de lypémanie)
Rencontre avec Lacan
En 1955, Heidegger est invité en France par Maurice de Gandillac et Jean Beaufret, pour donner une conférence à Cerisy. Il séjourne chez Jacques Lacan qui s'attache à l'ontologue comme une sangsue, espérant par là obtenir un certain crédit intellectuel auprès du vulgum pecus. Mais quand Lacan, pour faire l'intéressant, lui dit que « ce qui est forclos du symbolique resurgit dans le réel », Heidegger ne peut rétorquer que « Was ? »
(Jean-René Vif, Scènes de la vie de Heidegger)
Idéalisme allemand
On prétend — mais cela est-il vrai ? — que le philosophe Johann Gottlieb Fichte, pour donner plus de force à sa voix, allait sur le bord de la mer, dans les temps que les flots étaient le plus violemment agités, et y prononçait des harangues. Il fit plus, il s'enfermait des mois entiers dans un cabinet souterrain situé dans les environs d'Iéna, se faisant raser la moitié de la tête pour se mettre hors d'état de sortir. Ayant ainsi perfectionné sa voix, il étudia les règles du geste, et s'exerça devant un miroir, jusqu'à ce qu'il eût acquis l'air et les manières d'un parfait malotru. Il était prêt à rédiger les Principes de la doctrine de la science.
(Raymond Doppelchor, Océanographie du Rien)
Limite monotone
Le théorème de la limite monotone est un théorème d'analyse selon lequel les suites monotones possèdent une limite. Ce résultat permet de comprendre pourquoi certaines personnes, plutôt que d'abréger la suite monotone de leurs jours en ingérant du taupicide, préfèrent « attendre que ça passe ».
(Włodzisław Szczur, Mathématique du néant)
Hommage à Alphonse Despines
Il y a bien des façons d'occuper sa vie. On peut, comme l'homme du nihil, « ronger par la racine l'ancolie du doute » et réfléchir incessamment à la meilleure façon de se détruire. On peut aussi collecter des chansons et des noëls en patois savoyard. Tout n'est-il pas louable, en un sens ?
Quoi qu'il en soit, un des plus beaux éloges funèbres de la langue française est, dans son laconisme véridique, celui qu'écrivit en 1877 le philologue Aimé Constantin pour rendre hommage à son collègue Alphonse Despines. Le mal — l'obsession des noëls en patois savoyards —, sa nature, son intensité, tout y est resserré avec une force et un bonheur d'expression suprêmes : « Je considère comme un devoir, avant d'entrer en matière, de rendre hommage au talent et au patriotisme de cet infatigable travailleur qui a consacré de longues années à recueillir tout ce qu'il a pu découvrir en fait de chansons et de noëls en patois savoyard, et qui dans une série d'articles insérés dans la Revue Savoisienne (1864-1870), n'a cessé de faire l'appel le plus chaleureux à tous les amateurs et détenteurs de poésies patoises. [...] La Société Florimontane, dont M. Despines fut un des membres les plus actifs et les plus distingués, a déjà à plusieurs reprises exprimé le désir de reprendre en sous-œuvre et de compléter le travail interrompu. Espérons qu'elle pourra bientôt mettre à exécution sa louable et patriotique intention. En attendant, honneur à ce vaillant champion, mort victime de son zèle pour la science et le bien public, honneur à M. Alphonse Despines ! » (Aimé Constantin, Études sur le patois savoyard, Burnod, Annecy, 1877)
(Johannes Zimmerschmühl, Pensées rancies et cramoisies)
Ensemble vide
Selon le mathématicien Georg Cantor, un ensemble est « une pluralité (d'objets) pouvant être pensée comme une unité, autrement dit toute collection d'objets déterminés pouvant être réunie en un tout par une loi (un critère) ».
Mais Cantor était un être profondément antinihilique, et l'ensemble vide ne prendra le statut d'ensemble qu'avec la notation Ø due au mathématicien français André Weil vers 1939. Dans la théorie des ensembles, l'axiome de l'ensemble vide — qui énonce qu'il existe un ensemble sans élément — revient à dire qu'il existe au moins un « ensemble premier » sans élément défini, et cette propriété se démontre en logique pure (par le schéma d'axiomes de compréhension introduit par Ernst Zermelo).
L'ensemble vide serait « ce seul objet dont le néant s'honore » qu'évoque Mallarmé dans son poème, au dire de Gragerfis.
(Léon Glapusz, Mélancolie bourboulienne)
Saucée
Et l'absurde de pleuvoir sur ma tête, comme vache qui pisse.
(Luc Pulflop, Prière d'incinérer. Dégoût)
Châtiment
Alors Yahweh dit à l'homme : « Le sol sera maudit à cause de toi. C'est à force de peine que tu en tireras ta nourriture tous les jours de ta vie, il te produira des épines et des ronces, tu mangeras de l'herbe des champs, et tu produiras l'excrément. » (Genèse, 3, 17-18)
(Raymond Doppelchor, Océanographie du Rien)
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