« Quand j'entends le mot vivre, je sors mon revolver ou du poison. » (Luc Pulflop)
mercredi 10 octobre 2018
Contre Aristote
En se faisant « sauter le caisson » à l'aide de son colt Frontier, le suicidé philosophique prend part à cette première violation du dogme aristotélicien qu'est l'introduction des excentriques et des épicycles, avant que le système du monde des Anciens ne trouve sa forme définitive dans le système ptoléméen.
(Johannes Zimmerschmühl, Pensées rancies et cramoisies)
Combats désespérés
Le mot du Maréchal Colmar von der Goltz, dit Goltz Pacha : « Il faut, aux hécatombes des premières batailles, des hommes jeunes » se trouve confirmé dans la personne de ce bizarre rêveur qu'est le suicidé philosophique. Un exemple archétypique en est le nouvelliste russe Vsevolod Mikhaïlovitch Garchine qui, le 31 mars 1888, à l'âge de 33 ans, se suicide en sautant dans l'escalier de l'immeuble pétersbourgeois au cinquième étage duquel il habitait.
(Marcel Banquine, Exercices de lypémanie)
« Words, words, words »
Selon Gragerfis, le monde consisterait en une décoction grisâtre de phonèmes.
(Luc Pulflop, Prière d'incinérer. Dégoût)
Réfutation
En se donnant la mort, le suicidé philosophique ne rejette pas seulement la doctrine de McIntyre selon laquelle l'expérience vive n'est rien autre chose qu'un récit vécu, mais il refuse également d'adopter la thèse de Ricœur selon laquelle l'identité de soi-même — l'ipséité — est « un mixte instable entre fabulation et expérience vive ». Jamais, en effet, les différences structurales qui séparent une histoire racontée de l'expérience vive ne deviennent si manifestes, si marquées et si accentuées que dans l'homicide de soi-même.
(Johannes Zimmerschmühl, Pensées rancies et cramoisies)
Démon de la perversité
Dans ses Confessions, Saint Augustin raconte de manière dramatique comment, avec ses amis, il prit l'habitude de prononcer le vocable « reginglette ». S'il le fit, prétend-il, c'est uniquement par dégoût d'agir conformément aux bonnes mœurs et attiré par l'attrait du péché : « Hideuse était ma malice et je l'ai aimée ; j'ai aimé ma propre mort ; j'ai aimé ma déchéance ; non l'objet qui en était la cause, mais ma déchéance même, je l'ai aimée ! Âme souillée, ne convoitant pas autre chose dans l'ignominie que l'ignominie elle-même. »
(Marcel Banquine, Exercices de lypémanie)
À dérembourser
« Quand il s'agit de lutter contre la pensée de se détruire, on peut regarder comme inutiles et très souvent dangereux une foule de médicaments conseillés par les auteurs, dont les principaux sont : l'arnica, la cannelle, la serpentaire de Virginie, le simarouba, la racine de Colombo, la cascarille, le cachou, le ratanhia, le camphre, l'ammoniaque, l'élixir de Minsicht, etc, etc. On peut croire cependant que le ratanhia pourrait dans quelques cas combattre avantageusement l'hémorragie de la membrane muqueuse et la diarrhée. » (Louis-Charles Roche, Nouveaux éléments de pathologie médico-chirurgicale, J.-B. Baillière, Paris, 1833)
(Johannes Zimmerschmühl, Pensées rancies et cramoisies)
Cubisme nihilique
Que dire du Rien sinon son énigme même ? La pensée peut-elle faire autre chose que de laisser ouverte l'énigme du Rien ? Mais en maintenant ainsi béant le mystère du Rien, ne risque-t-on pas de le banaliser, de passer à côté de sa charge subversive, de ne voir en lui qu'une sorte de « construction cubiste » à la Brancusi ?
(Marcel Banquine, Exercices de lypémanie)
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