dimanche 20 octobre 2024

Dialogue avec la mort

 

Quand la mort se présenta devant lui, l'écrivain Pavese lui dit qu'elle était si belle que la regarder était une souffrance. La mort, surprise, lui rappela que pas plus tard que la veille il disait que c'était une joie. Piqué au vif, il rétorqua que c'était à la fois une joie et une souffrance. Elle déclara alors que tout ça était bien gentil mais qu'il allait falloir y aller ; qu'il n'était plus l'heure de faire des phrases.
 
(Lucien Ganne, Syllogismes de la mer Rouge)

Écrasement du « conscient intérieur »

 

Quand vous êtes malade au point de devoir rester assis dans un fauteuil, courbé en avant, pâle, l'œil hagard, la parole et la respiration entrecoupées, quand le moindre mouvement vous arrache des cris de douleur, vous ne pouvez réfléchir avec toute la sérénité voulue à la notion de souci chez Heidegger. La masse rouge du viscère bouche votre horizon mental et écrase votre « conscient intérieur » comme ferait une énorme valise en cuir de vache.
 
(Lucien Ganne, Syllogismes de la mer Rouge)

Barszcz

 

Beaucoup d'auteurs ont essayé, sans vraiment y parvenir, de fixer notre attention sur un mets polonais nommé barszcz. C'est une soupe composée d'orge ou de gruau, cuits avec des carottes ou des choux acides, et qui, paraît-il, forme un mets aussi sain qu'agréable au goût. Mais nous, la seule chose qui nous intéresse, c'est que nous allons clamecer — alors le « barszcz »...
 
(Lucien Ganne, Syllogismes de la mer Rouge)

Conseil au désespéré

 

Dans sa Pharmacopée chirurgicale théorique et pratique (Hérissant le Fils, Paris, 1771), Jean Nicolas explique ce qu'il faut faire quand on a perdu tout espoir : « Prenez un scrupule de résine jaune, cinq grains de rhubarbe, dix grains de conserve de roses rouges, et du sirop simple autant qu'il en faut. Mêlez et formez-en un bol. Ensuite... Ensuite... Ma foi... Euh... » — On voit le genre.
 
(Lucien Ganne, Syllogismes de la mer Rouge)