Affichage des articles dont le libellé est Jutique Marcel. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est Jutique Marcel. Afficher tous les articles

lundi 29 novembre 2021

Du balai, la raison pure !

 

Armé d'une tapette flexible à manche de hêtre et de sa conviction irréfragable que « rien n'est », l'homme du nihil s'efforce de mettre en déroute les « mouches molles du savoir » et les « lézards cubiques de la raison pure » (Jutique) qui sans arrêt le tarabustent et lui mordent le fondement (de l'historialité du Dasein).

(Fernand Delaunay, Glomérules)

jeudi 2 mai 2019

Un drôle de zigue


Faute de pouvoir transcender, sublimer sa frustration d'exister, l'homme du nihil s'exaspère. Choisissant l'irrationnel, optant pour l'inconvenant, il tente de se situer à l'antipode de ce « monde qui bâfre » (Jutique). La vitalité créatrice qui l'anime fait irruption en marge de la vie quotidienne, ignorée d'elle, étrangère à son ordre, dans un très curieux espace spirituel à la fois régressif et prophétique, fait de « pyxides tubulaires », de « xéranthèmes xénotropiques » et de « gloméruleux pélicans ».

(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)

mercredi 1 mai 2019

Étrangeté du suicide


L'homicide de soi-même est une création toujours neuve où l'indicible, l'insaisissable se laissent approcher, où les souffrances dues à l'haeccéité s'apaisent ; lieu de contemplation où le Dasein se réenchante ; refuge pour certains, mais aussi poste avancé, à la frontière d'une « réalité empirique » irrationnelle et des structures vaporeuses du pachynihil ; il nous relie à nous-mêmes et au Grand Indéfini d'Anaximandre. Il est essentiellement d'ordre psychique, donc infiniment complexe, hors d'atteinte des grossiers instruments de l'analyse logique : il déploie ce que la « raison pure » ignore ou opprime. À la « civilisation de l'infâme » (Jutique), il oppose son univers, celui du taupicide et des revolvers chambrés pour le .44 russe, cet autre univers où s'enfoncent les radicelles de nos « conscients intérieurs ».

(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)

samedi 27 avril 2019

Civilisation de l'infâme


Comme une bactérie, la technique phagocyte les valeurs les plus sacrées et en produit un bloc d'absurdité massive qui ose se présenter comme un produit de la raison, une nécessité dûment expertisée. Le Dasein est entré, environné de savantes machines, dans ce que Marcel Jutique appelle la « civilisation de l'infâme » — un domaine étouffant, opaque, où aucun être humain ne peut survivre sans régresser au rang du protiste. Pour échapper à ce destin, il n'y a en vérité qu'une porte de sortie : celle qui ouvre sur le pachynihil.

(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)

mercredi 24 avril 2019

Alternative au langage philosophique


Impropre à exprimer le « sentiment de la vie », le langage philosophique, étant nécessairement conceptuel donc abstrait, s'est de plus en plus écarté de l'existence concrète, de l'expérience vécue. Incapable de se dire, de s'exposer, la « vie intérieure » alors s'efface, devient aussi inconsistante que celle d'un « ouaouaron féru de l'apostrophe hurluberlue » (Jutique), ou bien elle explose en ces « balbutiements sacrés » que produit le revolver Smith & Wesson chambré pour le .44 russe. — L'homicide de soi-même ! Existe-t-il langage plus expressif et contondant ?

(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)

dimanche 21 avril 2019

Questions de granit


La constatation du Rien (Claudel l'a dit en termes inoubliables) est en relation avec une certaine réalité démesurée, non mesurable, qui échappe aux « mouches molles du savoir » (Jutique). Toute révélation du pachynihil naît de la rencontre avec une démesure qui déchire le Dasein et l'ouvre à l'« infini infundibuliforme » (Banquine) ; elle naît de l'étonnement et de l'incertitude. C'est pourquoi la « philosophie » de l'homme du nihil est toute pleine de points d'interrogation, de ces questions à la fois frivoles et pondéreuses — que Gragerfis appelle des « questions de granit » — celles que posent à la fois les fous et les métaphysiciens et auxquelles il n'y a de réponse qu'ailleurs.

(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)

dimanche 30 décembre 2018

Conversation avec Peter Handke


Étang de Soustons, deux heures de l'après-midi. Sur son pliant, solitaire, un quidam est là qui contemple l'eau et semble ruminer de noirs pensers. Après un instant d'hésitation, Marcel Jutique prend son courage à deux mains et l'aborde.
 

Marcel Jutique : Monsieur, pardonnez-moi de troubler votre méditation. Ne seriez-vous pas l'écrivain Peter Handke ?
 

Peter Handke : Jawohl.
 

Marcel Jutique : Puis-je vous demander ce que vous faites ici, à l'étang de Soustons ? Un pélerinage à la mémoire d'Emil Cioran, peut-être ?
 

Peter Handke : J'ai tout dit.
 

Marcel Jutique : Vous étoudiez ?
 

Peter Handke : Non. J'ai tout dit.
 

Marcel Jutique : Je ne m'en mêle plus.
 

Il prend son chapeau et sort.

(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)

vendredi 16 novembre 2018

Embellissement


Le citoyen Jutique, que ses fonctions de commissaire des relations commerciales retiennent à Madère, mais qui ne cesse d'y cultiver avec beaucoup de zèle l'idée du Rien, a fait parvenir à ses confrères un mémoire où il affirme que cette idée, si belle par ses couleurs, si curieuse par ses formes, serait des plus faciles à multiplier dans nos contrées, où elle contribuerait, par l'époque de sa floraison, à embellir nos saisons rigoureuses.

(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)

samedi 15 septembre 2018

De Charybde en Scylla


À l'instar du lieutenant Pirogov qui, chez Gogol, oublie en mangeant des pâtés lorrains 1 la « dégelée » qu'il a reçue d'un mari trompé, le sectateur du Rien cherche l'apaisement de ses douleurs nihiliques dans la goûteuse et fort onctueuse musique de Schumann. Mais ce « perlimpinpin prismatique » (Jutique) s'avère aussi redoutable que le cratère funèbre du vide qu'il cherchait à fuir, et finit par l'engloutir tout entier !

1. Les pâtés lorrains renferment, dans une enveloppe de pâte feuilletée croustillante à souhait, une farce à base de porc mariné.

(Robert Férillet, Nostalgie de l'infundibuliforme)

jeudi 13 septembre 2018

Lettre de M. Jutique à l'auteur


Mon cher Doppelchor,

  J'ai parcouru avec le plus grand intérêt les épreuves de votre ouvrage sur le Rien, et je vous en fait mes sincères félicitations.
  Cette science du Rien, comme vous le dites très-bien, n'est encore qu'à l'état d'ébauche, mais votre méthode, votre travail consciencieux, contribueront certainement à ses progrès.
  Vos observations personnelles en éclairent plusieurs parties, entre autres celle consacrée au Pachynihil. Vous avez été à même, pendant vos nombreux et lointains voyages, de constater à diverses reprises ses lois si bien formulées maintenant, et que vous avez grandement contribué à faire connaître par vos communications à l'Institut.
  Vous avez fait un beau et bon livre, qui sera utile non-seulement aux gens du monde, mais même aux savants.
  Personne plus que moi, qui suis vos efforts incessants depuis près de trente ans, n'est heureux de voir la place honorable que vous avez su vous créer dans la science en dehors de toute coterie.


Votre ami,
Jutique, de l'Institut,


(Raymond Doppelchor, Océanographie du Rien)

samedi 8 septembre 2018

Le suave murmure du pachynihil


Le suicidé philosophique entend en permanence le fort chuchotement du Rien contre son oreille, rumeur fraîche qui l'apaise la nuit quand l'insomnie le tenaille. Le Rien n'est pas atteint par l'espèce d'étouffement de la nuit ; il est toujours égal dans sa force, son bondissement torrentueux sur les roches usées du « conscient intérieur ». Et « de ses particules dénégatrices émane un parfum qui relie l'esprit au cosmos » (Marcel Jutique).

(Robert Férillet, Nostalgie de l'infundibuliforme)

lundi 3 septembre 2018

Une belle brochette de psychopathes


« À côté du nom de Jutique, j'ai arraché une énorme toile d'araignée, tout épaissie par la poussière et tendue à l'angle de la muraille. Sous cette toile il y avait quatre ou cinq noms parfaitement lisibles, parmi d'autres dont il ne reste rien qu'une tache sur le mur. — Doppelchor, 1815. — Banquine, 1818. — Robert Férillet, 1821. — Zimmerschmühl, 1823. J'ai lu ces noms, et de lugubres souvenirs me sont venus : Doppelchor, celui qui a coupé l'humanité en quartiers, et qui allait la nuit dans Paris jetant la tête dans une fontaine et le tronc dans un égout ; Banquine, celui qui a assassiné l'idéalisme allemand en s'acharnant tout spécialement sur Johann Gottlieb Fichte ; Robert Férillet, celui qui a tiré un coup de pistolet au Dasein au moment où celui-ci ouvrait une fenêtre ; Zimmerschmühl, ce médecin qui a empoisonné son Moi, et qui, le soignant dans cette dernière maladie qu'il lui avait faite, au lieu de remède lui redonnait du taupicide ; et auprès de ceux-là, Jutique, l'horrible fou qui tuait les enfants à coups d'idiome imagé sur la tête ! » (Victor Hugo, Les derniers jours d'un condamné à mort, 1829)

(Léon Glapusz, Mélancolie bourboulienne)

mercredi 29 août 2018

Propriété merveilleuse de l'idée du Rien


Comme l'écrivain Blaise Cendrars, l'homme du nihil croit aux vertus vitales du désespoir et le pessimisme est pour lui médiocrité. Optimisme ? Non, plutôt confiance. Confiance en la radiance trouble de l'idée du Rien « qui procure au moulinet furtif de notre âme la matière vivante du réveil » (Marcel Jutique). — Mais à toutes fins utiles, il conserve dans les larges poches de sa redingote quelques bâtons de dynamite qu'il ne destine qu'à lui seul.

(Léon Glapusz, Mélancolie bourboulienne)