dimanche 9 juillet 2023

Rechute

 

Le nihilique se croit revenu de tout, il se prétend blasé autant qu'on peut l'être, et voilà qu'il tombe sur une femme nue dans un champ de fleurs. Ça ne fait ni une ni deux, il est aussitôt fasciné par ces sublimes rotoplots que le glaïeul auréole. Il serait prêt à demander sa main à la péronnelle !
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

samedi 8 juillet 2023

Syndrome de la boule de campagne

 

Le pire, quand on est un raté, ce n'est pas de l'être, car la vie du raté ne diffère pas fondamentalement de celle du non-raté. Non, mes amis. Le pire, c'est de se dire à chaque instant qu'on l'est. On a beau savoir que toute vie est un ratage, ça finit par taper sur le système. On perd toute confiance en soi. On n'ose même plus aller acheter du pain à la boulange de peur d'être regardé comme un minus par tous ces cracks de l'existence et de la « boule de campagne ».
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

Rétention

 

D'un trou noir, rien ne s'échappe : ni matière, ni rayonnement. Un trou noir peut se comparer à un « anu cosmique » qui serait, comme Martin Heidegger, frappé de « constipation conceptuelle opiniâtre ».
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

Horizon des événements

 

Pas plus que d'un trou noir, on ne peut échapper à l'attraction gravitationnelle du Rien si l'on se trouve à l'intérieur de son « horizon des événements » — si l'on est d'humeur mélancolique, c'est-à-dire.
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

Powehi

 

Ce qui, dans l'univers connu, se rapproche le plus du pachynihil, c'est le trou noir supermassif appelé Powehi, mot qui en hawaïen signifie « source sombre embellie de création sans fin » ou encore — les avis divergent — « insondable création noire parée ».
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

vendredi 7 juillet 2023

Demande à Badiou

 

Ça pourrait peut-être nous aider à nous orienter dans l'existence, de savoir comment se pose la question du sens de l'être chez Paul Ricœur... Oui, mais comment faire ? Ce qui rend la chose compliquée, c'est que l'ontologie herméneutique ricœurienne se présente comme fragmentée, disséminée dans des ouvrages épars sans jamais s'ériger en un système clos et achevé. Va-t-on être obligé de demander à Alain Badiou ?
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

Volucelle zonée

 

Les écrivains nous font part de leurs réflexions sur la vie, la mort, les personnes du sexe, etc. Mais qu'en avons-nous à faire de leurs réflexions ? De quel droit ramènent-ils leur fraise ? Est-ce qu'ils s'y connaissent mieux que nous en existence ? Il y a de quoi rire. La plupart ne seraient même pas capables de distinguer un crache-sang d'une volucelle zonée !
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

Maurice le Profond

 

La vie de Maurice Blanchot fut entièrement dévouée à la littérature « et au silence qui lui est propre ». Comme René Char, il ne disait que des choses extrêmement profondes, tellement profondes que c'en était effrayant. Il était si profond qu'à la fin, plus personne ne voulait le fréquenter. Et quand il devait se livrer à un acte trivial qui ne nécessitait aucune profondeur, par exemple se laver les pieds, c'était toute une affaire.
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

Posologie du Rien

 

Une cuillerée à soupe matin, midi et soir. Et si ça ne suffit pas à vous faire voir « la vie en beau », un grand bol toutes les deux heures.
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

jeudi 6 juillet 2023

Sagesse hindoue

 

Que fait le yogi, avant de dérouler son tapis de sol ? Il se gratte le cul. Voilà ce qu'il fait. Il se gratte « el culo ». C'est la « sagesse hindoue ».
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

Insomnie batracienne

 

À l'instar d'Émile Cioran, la grenouille de Pérez ne peut pas dormir. Elle s'est couchée à neuf heures, mais rien à faire.
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

Trop tard

 

Flaubert : Madame Bovary, c'est moi.
Heidegger : Le Dasein, c'est moi.
Émile Cioran : Le Rien, c'est moi.
Le nihilique : Merde alors ! Pas gêné, le Mimile !
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

Sortie fatidique

 

Au début, le Dasein est bénaise. Il trouve que la vie, ce n'est pas si mal que ça. C'est seulement après être allé faire ses courses chez Trigano 49, vers la fin des années 70, qu'il commence à ressentir toute l'horreur de l'absolue solitude.
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

mercredi 5 juillet 2023

Mais les vers souverains demeurent

 

De tout l'œuvre d'un poëte, ne restent souvent que quelques vers, ou même quelques mots. Lait noir de l'aube pour Celan, métaplaques métalliques pour Ghérasim Luca... Toute une vie pour quelques mots, est-on tenté de dire. Mais ça valait le coup. Ça valait le coup !
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

Yes we can

 

Le sentiment d'avoir réussi quelque chose (hors homicide de soi-même) est toujours illusoire et risible. Mais on ne peut qu'envier ceux qui l'éprouvent. Se dire qu'on a réussi ne serait-ce qu'une petite chose (comme de manger des choux-fleurs à la merde), oui, cela doit être réconfortant.
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

Question à l'ami Régis

 

Ami Régis ! Oh ! Ami Régis ! Ta vie n'est plus qu'un amas de décombres de Rebatet. Et dans cet amas de décombres de Rebatet règne une affreuse solitude. Tu comptes faire quelque chose ?
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

Un insecte qui fait bonne impression

 

Comme on demandait au nihilique ce qu'il pensait de la chloromyie (il venait de la rencontrer pour la première fois), il répondit qu'elle n'était « pas désagréable ».
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

mardi 4 juillet 2023

Banane dans l'oreille

 

On se demande ce qu'il faut dire aux gens pour les dissuader d'exister. On a beau leur répéter que vivre « pue du cul », ils continuent. Ils font « jore » qu'ils n'entendent pas. Ils ont une banane dans l'oreille ou quoi ?
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

Cadavre vivant

 

De son propre aveu, le cœur d'Inès Armand était « comme mort ». « Je suis un cadavre vivant », répétait la malheureuse, qui pourtant n'avait lu ni Tolstoï ni Kierkegaard.
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

Célébrité

 

Quand on y réfléchit, aucune personne célèbre ne mérite de l'être. Le Moi, nous en avons soupé, du nôtre et de celui des autres. Des pots de pisse, tous !
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

Compréhension fatale

 

L'homme, une fois qu'il a compris que l'être se résume à un margouillis exophtalmique (eine exophtalmische Margouillis), est pour ainsi dire « kaput ». Il n'est plus qu'un cadavre vivant. Comme dirait Alfred de Musset, « le désespoir l'habite et le néant l'attend ».
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

lundi 3 juillet 2023

Odeurs

 

Enfant, le nihilique humait dès le matin un grand bol de Rien ; les effluves délicats du pachynihil emplissaient ses narines et repoussaient pour la journée l'odeur plus forte des étables. — Des étables ? Il vivait dans une ferme ?
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

À radical, radical et demi

 

Le bouddhisme mahayana est déjà drôlement radical puisqu'il nie à la fois l'existence de la réalité et celle du sujet qui la perçoit. Mais le nihilique est plus radical encore car il nie l'existence du bouddhisme mahayana !
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

Modernisme poétique

 

« Avez-vous lu le Lunaire sentimental de Lugones ?
— Non, je ne lis pas de poésie argentine.
— Pourquoi ?
— Parce que je ne crois pas à son existence. Je suis nihilique, vous avez oublié ?
— Ah. C'est donc ça. Mais Lugones s'est suicidé, vous devriez être content ?
— Oui, on dit qu'à un moment donné, il a senti au plus profond de lui que la réalité n'est pas verbale, qu'elle peut être incommunicable et atroce, et qu'il s'en est allé, taciturne et seul, chercher la mort dans le crépuscule d'une île. Mais quand même. La poésie argentine, pour tout vous dire, ça me fait caguer.
— Dans ce cas... Je n'insiste pas. Allez, hasta la vista, hein !
— C'est ça. »
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

Das Unheimliche

 

Pas besoin de mannequin ou d'automate, tout, absolument tout dans la « réalité empirique » est inquiétamment étrange et étrangement inquiétant.
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

dimanche 2 juillet 2023

Épuisement dans l'ampoulé

 

Pédant jusque dans le désespoir, le nihilique affirme que son déplaisir d'exister est aussi vif que les débats qui jadis opposèrent Grégoire le Grand et Isidore de Séville à propos du nombre et de la nature des péchés capitaux.
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

Usurpation lexicale

 

L'utilisation du vocable zingibéracé par des hommes privés de décence insupporte le nihilique. Insupporte ? Le mot est faible : elle blesse son cœur d'une langueur monotone.
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

Légèreté insigne du Grandiloque

 

« Arrivé rue Monsieur-le-Prince, ma pensée était de me détruire. Mais comme j'avais des aphorismes à écrire et que Simone avait préparé une appétissante tarte aux poireaux, je me suis dit que ça pouvait attendre jusqu'au lendemain. Et voilà ! Je suis toujours vivant ! C'est pas beau, ça ? » (Propos recueillis par le Pr. Basile Munteanu et cités dans son ouvrage Mon ami le Grandiloque)
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

Frivolité des mourants

 

Comme Marcel Proust, le nihilique trouve « quelque chose d'un peu vil à cette incroyable frivolité des mourants ». Sauf que les mourants, pour lui, c'est tout le monde. Et il insiste : « TOUT LE MONDE, VOUS ENTENDEZ ?!? »
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)