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mardi 28 août 2018

Lama


Si le lama crache régulièrement à la figure du capitaine Haddock, ce n'est pas pour divertir une petite élite dont il n'a cure, ni pour amuser cette entité platonique adulée qu'on surnomme la Masse. Il ne croit pas à ces deux abstractions, chères au démagogue. Il crache pour lui, pour ses amis, et pour adoucir le cours du temps.

Autrement dit, il le fait pour les mêmes raisons qui poussent l'homme du nihil à pratiquer la dilacération du Moi.


(Hermann von Trobben, Le Monocle du colonel Sponsz)

lundi 27 août 2018

Une créature des ténèbres


Si Rastapopoulos est un médiocrement convaincant « génie du Mal », il n'en va pas de même du diabolique docteur Müller. Assisté de ses deux complices, l'exubérant Wronzoff à la barbe interminable et le chauffeur Ivan, ce presque sosie de Vladimir Oulianov s'applique à  démontrer que « rien de ce qui est inhumain ne lui est étranger ». Avec un sadisme consommé, il enferme ses ennemis dans l'asile d'aliénés qu'il dirige, pour leur fait subir le terrifiant « traitement B » qui les laisse à l'état de légume.

Avec le docteur Müller, Hergé a créé l'une des figures les plus inquiétantes et antipathiques de la littérature universelle, qui surpasse dans la frénésie maléfique le Dimanche de Chesterton, l'Andrew Lumley de John Buchan, et le Percival Bartlebooth de Georges Perec.

(Hermann von Trobben, Le Monocle du colonel Sponsz)

dimanche 26 août 2018

Un stylite moderne : Philippulus le prophète


Dans l'Étoile mystérieuse, pour faire descendre Philippulus le prophète du mât où il est juché, Tintin, en désespoir de cause, décide de se faire passer pour Dieu. Il empoigne un porte-voix et s'écrie : « Allo, allo ! Ici Dieu le Père !... Prophète Philippulus, je vous ordonne de redescendre sur terre ! Et faites attention : ne vous cassez pas la figure !... »

Voilà qui rappelle étrangement l'aventure de Saint Walfroy, le « stylite des Ardennes ». On trouve, dans le journal des sçavans pour l'année 1750, une brève relation de l'épopée solitaire de ce mystique : « Dans le temps même de Siméon le jeune, Vulfilaicus voulut, au rapport de Grégoire de Tours, pratiquer en Occident l'Institut des Stylites ; il avoit fait élever sur une montagne près de Trèves une colonne sur laquelle il monta, mais le climat ne permettoit pas un pareil établissement ; le Stylite, pendant un hyver, perdit les ongles des pieds par la rigueur du froid : les Évêques condamnèrent son entreprise et lui ordonnèrent de descendre. Un jour qu'il était absent, l'Évêque de Trèves fit abattre et mettre en pièces la colonne, Vulfilaicus en fut affligé, mais par respect pour l'Évêque il ne la fit point relever. »

Hergé connaissait-il, par son ami Giacometti, le destin de cet anachorète au si terrible tragique ? Nous ne pouvons ici que poser la question.


(Hermann von Trobben, Le Monocle du colonel Sponsz)

samedi 25 août 2018

Mégère ou harpie ?


Au sujet de Peggy Alcazar, la tyrannique épouse du général, qui le réprimande publiquement lorsqu'il rentre en retard ou répand çà et là les cendres de son cigare, on ne sait si l'on doit parler de mégère ou de harpie. Voici ce que nous dit de ces deux créatures le zoologiste Coenraad Jacob Temminck 1 : « Pour la taille comme pour les dimensions, la mégère ressemble à la harpie, mais les tubes des narines sont moins proéminents que chez cette dernière ; celle-ci a une queue assez longue et libre, tandis que la mégère manque de tout vestige de queue. »

Pour en revenir à la très acariâtre Peggy, le mieux est sans doute de l'appeler simplement une virago. En tout état de cause, son mufle d'hippopotame et ses manières de gendarme sont à vous dégoûter à tout jamais du prétendu « beau sexe ». Par quelle perversion de l'esprit le général peut-il appeler un tel monstre « ma colombe » ?

On dirait que Hergé a créé Peggy Alcazar pour illustrer la thèse de Weininger : l'homme est le Tout, la femme le Néant ; l'homme incarne le spirituel, la femme le matériel dans son expression la plus mortifère et dégradante. Et pour couronner le tout, elle est « sous le joug du phallus » !


1. Dans ses Monographies de mammologie, Dufour & d'Ocagne, Paris, Leyde, 1827-41.

(Hermann von Trobben, Le Monocle du colonel Sponsz)

vendredi 24 août 2018

Yoko-geri


Dans un épisode mouvementé de L'Île Noire, Wronzoff, le complice du satanique docteur Müller, applique une clé de jambe à Tintin en lui disant, manière de le faire bisquer : « Ça, c'est du jiu-jitsu, mon petit ami ! » Tintin réplique alors par un yoko-geri : « Et ça, c'est de la savate ! »

Rappelons que le yoko-geri est l'un des coups les plus puissants des arts martiaux. Le témoignage du champion de karaté Joe Lewis le confirme : « Le side-kick est un coup mortel ! » Le principe est de s'efforcer de traverser la cible comme si l'on voulait que la jambe entre dans le corps de l'adversaire.


Le sinistre Wronzoff échappe à l'anéantissement, mais cette rencontre aura sur Tintin un impact considérable. Chez lui, la mort, qui jusque là n'était que le ferment d'un trouble nihilisme destructeur et d'un attrait morbide pour la souffrance, se voit rehaussée au rang d'idéal, de suprême geste de domination, de puissance et de liberté. Chaque épisode de ses aventures sera dorénavant un pas supplémentaire dans son approche définitive du néant.

(Hermann von Trobben, Le Monocle du colonel Sponsz)

mercredi 22 août 2018

Dégoût du monde


Dans L'Oreille cassée, Ridgewell est un explorateur qui a fui la civilisation. Pourquoi a-t-il choisi de partager la vie des primitifs Arumbayas qui vivent au cœur de la jungle amazonienne dans des cases en pisé ? Pour échapper à un Moi qu'il trouve ignoble ? Pour, moderne disciple de Rousseau, fraterniser avec les « bons sauvages » et, en adoptant leurs mœurs, retrouver une virginité perdue ? Mais alors, pourquoi leur apprendre les rudiments du golf ?

Ce qui est clair, c'est que Ridgewell porte en lui le dégoût du monde moderne vautré dans des environnements urbains constellés d'enseignes, de la volupté laquée des carrosseries et du louche anonymat de bureaux luxueux et fonctionnels. Comme le suicidé philosophique, il croit aux vertus du silence.


(Hermann von Trobben, Le Monocle du colonel Sponsz)

mardi 21 août 2018

Un grotesque « génie du Mal »


Roberto Rastapopoulos apparaît beaucoup trop bouffon pour être ce « génie du Mal » dont il s'attribue le titre, mais il est en revanche un incontestable « roi de l'élégance ». Quand il apparaît, dans Le Lotus bleu, avec son costume havane à pantalon twist, ses guêtres et son monocle, il nous rappelle le dandy Alfred d'Orsay tel qu'immortalisé par Sir George Hayter (moins les côtelettes).

Sa vanité, sa suffisance, sont sans limites. Il aime à se faire appeler « grand maître » par ses sbires — « Voici l'homme, grand maître !... », lui dit le Japonais Mitsuhirato en lui présentant Tintin garotté. Aussi son amour propre est-il profondément blessé par Milou quand ce dernier ose lui répondre. Après que le « génie du Mal » a déclaré : « Vous regretterez un jour de vous être mis en travers de mon chemin : sachez que mon nom est Rastapopoulos ! », le sympathique fox-terrier à poil dur lui rétorque : « C'est ça qui nous est égal ! » Instantanément, sa superbe s'évanouit, et il est rappelé à la véritable condition de l'étant existant : celle de succédané du Rien.


(Hermann von Trobben, Le Monocle du colonel Sponsz)

lundi 20 août 2018

Planche à clous


Le fakir Cipaçalouvishni ne supporte pas de s'asseoir sur un coussin, car, nous dit-il, « il a la peau tellement sensible ». La planche à clous est son siège préféré, et c'est aussi celui de l'homme du nihil, à la fois par désir de macération, et parce que, comme les épicuriens, il fuit les sources de plaisir qui ne sont « ni naturelles ni nécessaires » (d'où également sa prédilection pour les fromages au lait cru comme le reblochon de Savoie).

(Hermann von Trobben, Le Monocle du colonel Sponsz)

dimanche 19 août 2018

Attentat inabouti


Quand Ramon Zarate alias le général Alcazar exécute son numéro de lanceur de poignard avec son partenaire Chiquito alias Rupac Inca Huaco sur la scène du Music-Hall Palace, on a l'impression que c'est son « odieux Moi » qu'il voit en face de lui, et qu'il doit se tenir à quatre pour ne pas lui envoyer son coutelas « en pleine poire ». Il nous fait penser à cette femme un peu sénile évoquée par Fontane dans Quitte, qui a coutume de chanter des hymnes au Rien toutes les fois que, une oie coincée entre ses genoux, elle s'apprête à lui plonger un couteau dans le cou. 

Détruire le Moi n'est pas chose aussi aisée que d'immoler un volucre, mais fort heureusement, il reste l'aguardiente pour rendre un peu moins oppressant le cauchemar de l'individuation...

(Hermann von Trobben, Le Monocle du colonel Sponsz)

samedi 18 août 2018

Lectures pernicieuses


Celui qui, comme le professeur Laubépin des Sept Boules de cristal, a pour livres de chevet les Vies des hommes illustres de Plutarque, les Mémoires du duc de Saint-Simon et l'Histoire de ma vie de Casanova, celui-là s'expose à exhiber pendant deux semaines un beau collier en croûte badigeonné de mercurochrome, après s'être amusé à se mettre un nœud coulant autour du cou avec une ficelle qu'il a attachée au portique d'entrée du potager.

Cela n'arrive pas, fort heureusement, au professeur Laubépin, car la léthargie dans laquelle l'a plongé la momie de Rascar Capac semble l'avoir préservé — pour quelque temps du moins — de la pensée de se détruire.


(Hermann von Trobben, Le Monocle du colonel Sponsz)

vendredi 17 août 2018

Le diabolique fakir des Cigares du pharaon


Membre de la bande des trafiquants d'opium que Tintin affronte dans Les cigares du pharaon, cet adversaire du genre humain utilise de redoutables pouvoirs paranormaux : il hypnotise, dresse des cordes dans le vide, défait ses liens... Parfois, on dirait que, dégoûté de sa propre vilenie, il n'y a rien qu'il souhaite tant que la mort, et qu'il considère cette vie comme une chose onéreuse, attendant avec impatience que son âme se sépare de son corps.

Il ressemble en cela au suicidé philosophique, mais ce dernier est plus expéditif et n'hésite pas à employer le taupicide pour mettre fin à une existence qui lui est à charge.


(Hermann von Trobben, Le Monocle du colonel Sponsz)

jeudi 16 août 2018

Apparences trompeuses


« Ne riez pas, jeune homme. Je parle de la bête qui vit sur l'Île Noire, dans les ruines du château de Ben More : c'est elle qui dévore tous ceux qui ont la témérité de s'aventurer par là... ».

C'est en ces termes que, dans une taverne écossaise, un vieux « raisin » agrippé à sa chope de bitter et coiffé d'un funambulesque tam o' shanter met en garde Tintin. La bête dont il parle, c'est bien sûr le gorille Ranko, ce quadrumane baraqué, ce « gros balaise à l'invraisemblable tignasse de mérinos noir, emmêlée, broussailleuse, exorbitante » (Gragerfis) dont le crapuleux Wronzoff se sert comme d'une arme mais qui se révélera des plus timide en face de Milou et dont on découvrira qu'il possède un cœur d'artichaut après que Tintin aura pansé son bras cassé.

Comme le suicidé philosophique, le gorille Ranko épouvante les foules, mais la terreur qu'il répand repose sur un horrible malentendu.


(Hermann von Trobben, Le Monocle du colonel Sponsz)

mercredi 15 août 2018

Nature démoniaque de Calys


Dans L'Étoile mystérieuse, on assiste à ce dialogue entre le professeur Calys et Philippulus le prophète, alors que celui-ci, perché en haut du grand mât du navire Aurore, vient de lancer un bâton de dynamite sur Tintin qui tentait de le rejoindre : « — De grâce, mon cher Philippulus ! C'est moi Calys, directeur de l'Observatoire. Nous avons travaillé ensemble, souviens-toi !... Descends, je t'en prie. — Tu n'es pas Calys ! Tu as pris son visage mais tu es un démon !... Tu n'es pas Calys !... »

Extraordinaire clairvoyance de Philippulus, ce « prophète » pathétique qui paiera de sa vie sa trop grande lucidité !

Calys est en effet un démon, comme le montrera la suite de l'histoire, et comme certains signes le font déjà soupçonner. Et ce démon n'est autre que... le Moi ! — Le diantre, dans son astronomique vanité, ne s'empresse-t-il pas de baptiser calystène le mystérieux métal dont est fait l'aérolithe ?


(Hermann von Trobben, Le Monocle du colonel Sponsz)


mardi 14 août 2018

Rougeole


« Je suis Philippulus le Prophète, Et je vous annonce que des jours de terreur vont venir !... La fin du monde est proche !... Tout le monde va périr !... Et les survivants mourront de faim et de froid !... Et ils auront la peste, la rougeole et le choléra !... »

La présence de la rougeole dans la liste des fléaux évoqués par Philippulus paraîtra peut-être incongrue au lecteur moderne — cet immunisé universel qui va jusqu'à croire sa pachyméninge à l'abri de l'idée du Rien. Mais il faut rappeler que les quatre phases de cette maladie avaient de quoi, à l'époque, vous faire « jouer des castagnettes » : incubation silencieuse, invasion avec catarrhe fébrile, éruption dite morbilliforme, suivie d'une desquamation avec état de fatigue persistant.

Et si la rougeole en elle-même est peu létale, il n'en va pas de même de ses complications pneumologiques !


(Hermann von Trobben, Le Monocle du colonel Sponsz)

lundi 13 août 2018

Détachement suprême des Dupond-Dupont


Le stoïcisme des détectives Dupont et Dupond face à la mort est-il le fruit de leur vacuité ou, au contraire, de leur lecture de Sénèque ? Il est bien difficile de trancher cette question. Un épisode, toutefois, peut nous y aider.

Dans Tintin et les Picaros, ils sont conduits devant le peloton d'exécution, mais sont sauvés in extremis par la révolution que viennent de déclencher les rebelles menés par le général Alcazar. Quand le capitaine Haddock dénoue leurs liens et s'exclame : « Il était moins cinq, n'est-ce pas ? », Dupont répond : « Je ne sais pas : ma montre est arrêtée... » Cet humour noir, qui cache à l'évidence un désespoir métaphysique, rappelle celui du poète André Frédérique, qui commit l'homicide de soi-même le 17 mai 1957 à l'âge de 42 ans, à l'aide d'un cocktail de cognac, gardénal, et émanations de gaz. L'hypothèse de la vacuité intellectuelle paraît donc devoir être écartée. Les deux policiers sont bien des disciples de Sénèque !


(Hermann von Trobben, Le Monocle du colonel Sponsz)

dimanche 12 août 2018

Vengeance !


Dans les Bijoux de la Castafiore, le capitaine Haddock est à ce point exaspéré par l'odieuse cantatrice qu'il aimerait lui casser les dents à coups de pierres, comme on fit à sainte Apolline ; ou lui verser du plomb fondu dans la bouche, comme à saint Jovite et à saint Prime ; ou encore, lui pincer les mamelles avec des tenailles de fer, comme cela arriva à sainte Agathe et à sainte Helconide à Corinthe.

Mais la sinistre « camériste » Irma veille...

(Hermann von Trobben, Le Monocle du colonel Sponsz)

vendredi 3 août 2018

Seppuku


On apprend à l'avant-dernière page du Lotus bleu que le maléfique Mitsuhirato, qui de longue date « nourrissait des doutes sur la nature perverse de son Moi », a finalement décidé de se faire hara-kiri.

Jean Crasset, dans son Histoire de l'Église du Japon parue en 1689, décrit le cérémonial auquel se soumet, chez les Nippons, le candidat à l'homicide de soi-même : « Il prend ses plus beaux habits, et ayant appelé ses parens, il s'ouvre luy même le ventre avec un couteau, dont il se fait une grande playe. Quelques-uns même qui ont plus de courage, s'en font deux en forme de croix, puis jettent le couteau en l'air. Lorsque les boyaux commencent à sortir, ils tendent le cou à un de leurs valets, qui est là tout prest, et qui luy tranche la teste. »

Les Nippons que l'on croise dans les Aventures de Tintin sont presque tous de visqueuses canailles, mais quelle admirable hardiesse, tout de même, chez ce vaillant champion de la mort volontaire qu'est le suicidé philosophique japonais !


(Hermann von Trobben, Le Monocle du colonel Sponsz)

Deux inquiétants vieillards


Le docteur Triboulet, que l'on aperçoit dans L'Oreille cassée, habite au 120, avenue du Troubadour. D'un âge avancé, il porte une longue barbe blanche, une redingote noire à col de fourrure, semble très myope, et possède une antique automobile à démarrage par manivelle dont le chauffeur arbore lui aussi une interminable barbe blanche et paraît crouler sous le poids du tædium vitæ, cette « fatigue de la vie » décrite par Sénèque. 

Tintin remonte jusqu'au docteur Triboulet en relevant le numéro d'immatriculation d'une voiture qui a tenté de le renverser, mais la plaque a été retournée — 168091 donnant par rotation 160891 — et le docteur s'avère étranger à l'affaire. 

Il n'empêche que Triboulet et son chauffeur forment un couple des plus louches et qu'on aimerait en savoir plus sur leurs menées souterraines. Appartiennent-ils à une société secrète, à un gang des barbes blanches ayant pour objectif de soumettre le monde à leur cacochyme domination ?

(Hermann von Trobben, Le Monocle du colonel Sponsz)

jeudi 2 août 2018

Nature démoniaque de Tournesol


Le « Supercolor-Tryphonar » conçu par le professeur Tournesol, s'il provoque « du shimmy dans la vision », n'en annonce pas moins l'avènement d'une « société de confort technique » qui transformera l'étant existant en un véritable zombie. 

La vraie nature de Tournesol, qui participe à l'émergence de ce monde de néant, apparaît ici en pleine lumière, et c'est celle, satanique, d'un ennemi du genre humain.

(Hermann von Trobben, Le Monocle du colonel Sponsz)


mercredi 1 août 2018

Dernières paroles de Boullu


Selon Gragerfis, Hergé aurait un temps envisagé de placer le marbrier Isidore Boullu sur le bûcher du Temple du Soleil en compagnie de Tintin, Haddock et Tournesol, et de lui faire tenir à peu près ce discours : « Astre dont les rayons ont frappé mes yeux pour la dernière fois, pourquoi as-tu éclairé le jour de ma naissance ? Avais-je demandé à naître ? Et pourquoi suis-je né ? Rien ne restera de moi, je meurs tout entier, aussi obscur que si je n'étais pas né. Néant, reçois donc ta proie. »

Et en effet, pourquoi est-il né, cet horripilant marbrier ? Pour jouer de la trompette dans la fanfare de Moulinsart ? Pour « boire des petits coups » au lieu de tenir ses engagements ? — Ô vanité des vanités ! Ô rictus bestial de l'existence !


(Hermann von Trobben, Le Monocle du colonel Sponsz)