lundi 1 mai 2023

Tôpette

 

C'est peut-être au moment de mourir qu'on comprend comment on aurait dû vivre, qu'on réalise qu'on s'est trompé sur toute la ligne. Mais on ne peut pas recommencer... Non, pour ce qui est de recommencer... tôpette. Alors tant qu'à faire, il vaudrait peut-être mieux ne pas comprendre. Spa ?
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

Cangue

 

Comme l'écrivain pragois Franz Kafka aux préhistoriques ancêtres, le nihilique a l'impression d'avoir été condamné à vivre avec un placard à balai pendu au cou.
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

dimanche 30 avril 2023

Entrailles géantes du Rien

 

Si l'on pouvait autopsier le pachynihil, on s'apercevait sûrement que ses entrailles sont hors de proportion. Et ces entrailles cyclopéennes, il s'en sert comme de tentacules pour fouiller les blocs douloureux de notre âme, le salop !
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

Darn that dream

 

Quand on demande au nihilique pourquoi il croit que rien n'est, il répond que d'une part, telle est sa fantaisie, et que d'autre part, s'il croyait à l'être, il risquerait de se retrouver à écouter du Michel Petrucciani par une nuit d'été et ce serait quelque peu « malaisant » (il ne précise pas pourquoi).
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

Bagalane

 

Après qu'Hercule eut réglé son compte au centaure Polénor, il ressentit un certain « bagalane » (c'est ainsi qu'il prononçait « vague à l'âme », il n'avait pas fait beaucoup d'études).
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

Façon de parler ?

 

Baudelaire dit que Vauvenargues dit que dans les jardins public il est des allées hantées principalement par l'ambition déçue, mais c'est peut-être une façon de parler.
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

samedi 29 avril 2023

Une drôle de rencontre

 

Un beau jour ou peut-être une nuit, le « négateur universel » Émile Cioran s'était endormi près de l'étang de Soustons quand soudain, semblant crever le ciel, surgit quelque chose ressemblant à une tête de chien couché. Alors le négateur l'interpella en ces termes : « Dis, tête de chien couché, oh dis, emmène-moi ! Retournons au pays d'autrefois, comme avant, dans mes rêves d'enfant, pour cueillir en tremblant des étoiles, des étoiles. » Mais rien à faire, impossible de la convaincre de le remmener au pays d'autrefois. Il se dit que c'était une rencontre décevante, mais toujours mieux qu'une réminiscence de vocabulaire (all is of no avail). Au moins, il n'avait pas ressenti avec une incroyable violence le besoin de se jeter à l'eau, c'était déjà ça.
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

Bal chez Temporel (suite)

 

Si le nihilique revient jamais danser chez Temporel, il y a fort à parier qu'il pensera à ceux qui tous ont laissé leurs noms gravés auprès du sien. Il y a des années, en effet, il a gravé avec un canif sur un tabouret de bar : « Merde à celui qui le lira, signé Bigeard ».
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

Avertissement

 

Si, comme Nicolas de Flüe, vous avez la vision d'un cheval boulottant un lys, c'est que les soucis relatifs à la vie matérielle (le cheval) dévorent votre vie spirituelle (le lys) et qu'il est temps pour vous de vous consacrer entièrement à la contemplation (c'est-à-dire au Rien). Verstanden ?
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

Criiii

 

Écrire, peu importe ce que l'on écrit, cela revient à tenter de décrire le grincement de roue d'une charrette dans un chemin creux. C'est un exercice vain : s'appellerait-on Flaubert, on n'y arriverait pas.
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

vendredi 28 avril 2023

Absence de goélands

 

Si le nihilique était sur un voilier, probable qu'il admirerait la démesure grandiloquente de la houle et que, quand il en aurait assez, il s'assoirait devant une nappe bigarrée et partagerait sa soupe avec son chien et les goélands du bord. Mais loin d'être sur un voilier, il est de Bezons ! Et à Bezons, des goélands, il n'y en a pas bézef ! — De la houle non plus, d'ailleurs.
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

Supériorité de la nuit

 

Vérification faite, il est bien le cas que la nuit est supérieure au jour. On peut s'y livrer à toutes sortes d'espiègleries colossales comme par exemple allumer une bougie.
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

Théorème des nombres premiers

 

Dans ses Entretiens avec Pierre Jouve, Mgr André Vingt-Trois émet l'hypothèse que la fonction π qui, à un réel x, associe le nombre π(x) de nombres premiers inférieurs ou égaux à x est équivalente, lorsque x tend vers +∞, au quotient de x par son logarithme népérien. Le prélat semble ignorer que ce résultat a été démontré indépendamment par Hadamard et La Vallée Poussin en 1896 !
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

Corrélats de l'extérieur

 

Les philosophes peuvent bien créer autant de concepts qu'ils veulent, leurs concepts ne sont que des « corrélats de l'extérieur » — des sous-produits de la tant haïe « réalité empirique ».
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

jeudi 27 avril 2023

Équilibre humoral

 

Pour vivre dans l'harmonie et la vertu, il est nécessaire d'équilibrer les quatre humeurs hippocratiques (sang, bile jaune, bile noire et flegme) — et rien n'assure mieux un tel équilibre qu'une pratique quotidienne du Rien. Mais il faut aussi se tenir à distance du monstre bipède. Car pour faire monter la bile jaune, il est balaise.
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

Panne de destin

 

Confronté à un problème de « joint spi », le nihilique est incapable de « se destiner (sich schicken) » au sens heideggérien du terme, c'est-à-dire de « se mettre en route pour s'ajointer à la directive indiquée et qu'attend un autre destin encore voilé ». En effet, comme l'écrit encore Heidegger (Gesamtausgabe 79:68-69), « le destin est par essence destin de l'être, au sens où l'être se destine lui-même, déploie à chaque fois son essence comme un destin et par là se transforme de manière destinale » — mais quand on a un problème de « joint spi »...
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

Vases sacrés

 

Dans Maria Chapdelaine, quand François Paradis, le prétendant malheureux de Maria, meurt pétrifié dans une tempête de neige, ses dernières paroles sont « câlice » et « cibouère ». Il commence à dire « tabernacle » mais n'a pas le temps d'achever. Déjà, la mort est là qui l'emporte. La mort, la mort, la mort, la mort !
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

Inquiétante matière

 

Le nihilique n'a qu'une confiance limitée dans cette invention des physiciens qu'on nomme la matière. Il se décrit lui-même comme un indéterminé du proton et un inquiet du noyau. Contrairement au perfide Ponge, il ne prend pas le parti des choses (cageot, cigarette, bougie, orange, galet, savon). Avec leurs fermions et leurs bosons, elles auraient plutôt tendance à lui flanquer les jetons.
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

mercredi 26 avril 2023

Drôlerie

 

Vivant est l'homme qui passe ses journées à s'enivrer du parfum miellé des clématites, et ses nuits à étudier la térébrante thermodynamique du Rien — ou l'inverse. C'est une drôle de vie mais toute vie n'est-elle pas drôle, en un sens ?
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

Mesure de toute chose

 

Un jour qu'il était « gonflé à bloc », le philosophe grec Protagoras, s'il faut en croire Platon, aurait affirmé que l'homme était la mesure de toute chose. Mais le sophiste se trompait. En réalité, la mesure de toute chose, c'est le Rien. Il est comme une règle graduée, en plastique, que l'on applique à la « réalité empirique » — et dont le résultat est toujours égal à zéro.
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

Une angoissante traversée

 

Traverser le pont Mirabeau, il y a de quoi avoir le traczir. Pour peu que vienne la nuit et que sonne l'heure, nous voilà frais.
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

Tombe la neige

 

Comme le chanteur Salvatore Adamo, le nihilique a la triste certitude que la vie se compose de froid, d'absence, d'un odieux silence et — last but not least — d'une blanche solitude. Il n'y a pas de quoi jubiler !
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

mardi 25 avril 2023

Arthur

 

Celui qui demeure immobile, le regard fixe, parce qu'il cherche dans les catacombes de son « conscient intérieur » des paysages d'avant l'être, celui-là ne doit pas s'étonner de se faire appeler Arthur. Car les gens ne comprennent pas ce genre de choses. Ils ne comprennent rien. Ce sont des céoènes.
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

Preuve par la pastèque

 

Est-il vrai que le Rien et la vie ne font qu'un ? À première vue, ça a l'air d'être vrai. En tout cas, la vie ressemble plus au Rien qu'à une grosse pastèque cinabarine.
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

Une banale histoire

 

On rencontre une bourrelle, et histoire d'engager la conversation, on l'informe qu'un pigecaille s'est posé le matin même au bord de notre croisée. De fil en aiguille, on lui dit qu'on a recueilli pour elle les sanglots de la nuit et on l'implore de nous dire oui. Si elle a le malheur de s'exécuter, les ennuis commencent.
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

Un déplaisant gugusse

 

Le personnage le plus antipathique de la littérature française s'appelle André Breton. Sa prétention, sa suffisance sont presque inimaginables. Et puis, quand on est plus ou moins calvitié, on s'irrite de le voir exhiber à tout propos sa grosse masse de cheveux. On aimerait le précipiter dans un chaudron d'huile bouillante.
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

lundi 24 avril 2023

Sur le mariage d'André Salmon

 

Dans son Poëme lu au mariage d'André Salmon, Guillaume Appolinaire exhorte l'étant existant à se réjouir parce que, dit-il, « l'amour veut qu'aujourd'hui mon ami André Salmon se marie ». Seulement voilà, l'étant existant s'en tamponne le coquillard, du mariage d'André Salmon. Il a d'autres soucis, l'étant existant — à commencer par sa propre mortalité. Alors au cul, André Salmon ! Au cul, le mariage d'André Salmon ! Merde alors !
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

Les gars de la culture

 

La culture, c'est dur de se retenir de rire. C'est plein de couillons qui se prennent au sérieux, à un point tel qu'ils en sont ridicules. Le gars Shakespeare ; le gars Goethe ; le gars Bobin. Et encore d'autres gars.
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

Désarroi d'Héléna

 

« Vous êtes belle, Héléna. Si belle que vous regarder est une souffrance.
— Mais... hier, vous disiez que c'était une joie ?
— Oui mais c'était pour faire jore.
— Ah. Je me disais aussi... »
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)