vendredi 14 septembre 2018

Tête de cheval


Dans certains pays, jusqu'à une époque récente, la tête de cheval passait pour protéger l'espèce humaine. Ainsi, dans la région d'Arkhangelsk, on la plaçait sur le poêle, convaincu qu'elle allait éloigner les miasmes pestilents. Au solstice d'été, dans la Russie centrale, on jetait une tête de cheval sur un brasier ardent pour s'immuniser contre les maléfices des sorciers, ces « pernicieux fils de la nuit » (Gragerfis). Chez ces peuples, la tête de cheval représentait le soleil, vu comme une divinité bienfaisante, aux vertus salutaires.

L'écrivain Otto Weininger, en revanche, voyait quelque chose de sinistre et de profondément malsain dans ce morceau d'anatomie du « bourrineau ». Ne prétendait-il pas avoir constaté, chez plusieurs individus redoutant la folie, « une parenté morphologique avec la tête de cheval » !

L'ambivalence de cette tête de cheval confirme l'intuition décisive de l'homme du nihil, à savoir que « tout est une question de point de vue » et que la connaissance est un terrain mou, marécageux, et plein de roseaux.


(Robert Férillet, Nostalgie de l'infundibuliforme)

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