« Quand j'entends le mot vivre, je sors mon revolver ou du poison. » (Luc Pulflop)
vendredi 26 octobre 2018
Peausserie
Un chasseur digne de ce nom porte toujours sur lui des morceaux de bêtes qu'il a exterminées, et aime se parer de leur fourrure et de leur cuir. C'est ainsi que dans les bagages du suicidé philosophique, on peut remarquer un nécessaire de voyage en peau de vouloir-vivre schopenhauerien, peau qu'il a lui-même tannée pour en faire un cuir velouté, décoré de graines de plumes, grosses comme une noisette, en plaques régulières.
(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)
Simplisme
Né à Boulzicourt (!) dans les Ardennes le 16 mars 1908, René Daumal fait ses études secondaires à Reims où il fonde avec Roger Gilbert-Lecomte et Roger Vailland un genre de communauté « initiatique » qu'ils appellent les « Simplistes ».
(Luc Pulflop, Prière d'incinérer. Dégoût)
Témoin crucial
« Appelez Mardochée : il faut aussi l'entendre. » (Jean Racine, Esther, III, 4)
(Thésar du Jin, Carnets du misanthrope)
Similitude
Le philosophe, comme le scorsonère, se caractérise par sa nature filandreuse, et parfois — cas notamment de l'empiriste logique — par sa racine pivotante développée.
(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)
Jankélévitch avait raison !
L'irréversibilité du temps se dit de tout organe membraneux, desséché, translucide.
(Luc Pulflop, Prière d'incinérer. Dégoût)
Poires
Dans le quatrième livre des Mots grecs réguliers de Cloatius, on apprend que « les diverses espèces de poires sont : l'Aniciane, la poire citrouille, la cirrite, la cervisca, la poire graveleuse, la crustumine, la décimane, la petite poire grecque, la Lolliane, la poire de Lanuvium, la poire laurier, la latérésiane, la murapienne, la Milésienne, la poire douce, la Néviane, la poire ronde, la préciane, la rubile, la poire de Signia, la Fulliane, la Titiane, la Turriniane, la timose, la poire précoce, la volème, la nèfle tardive, la sémentive tardive, la Sextiliane tardive, la Tarentine tardive, la Valériane tardive ».
(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)
Donnant-donnant
Que la momordique soit une herbe grimpante, à feuilles palmées, portant un fruit de la taille d'une grosse prune, rouge vif à maturité, pouvant se consommer comme le concombre, nous l'accordons volontiers à qui l'affirme ; à condition qu'il nous permette à son tour d'affirmer notre grande dégoûtation de tout cela.
(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)
Memento mori
Lorsque nous nous oublions au point de nous croire immortels, ne sommes-nous pas violemment réfrigérés par ces seuls mots : memento mori ? On prétend que dans l'Antiquité, la phrase était répétée par un esclave au général romain lors de la cérémonie du triomphe dans les rues de Rome. Gragerfis juge cependant plus probable que le serviteur disait « Respice post te ! Hominem te esse memento ! » (« Regarde autour de toi, et souviens-toi que tu n'es qu'un homme ! »), et c'est aussi ce qu'affirme Tertullien au chapitre trente-troisième de son Apologétique.
(Thésar du Jin, Carnets du misanthrope)
jeudi 25 octobre 2018
Canaillerie conceptuelle
Le Concept, condamné antérieurement pour escroquerie sous son vrai nom de Guichard, était devenu directeur de l'hôpital de Königsberg, et chargé d'employer tous les moyens possibles pour tourmenter les philosophes. Selon Johann Gottlieb Fichte, qui fit un bref séjour en cet hospice, il s'acquittait de ses fonctions avec le cynisme et la férocité d'un scélérat.
(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)
Jean-Pierre Georges, poëte du renoncement
Après que les prétendants de Pénélope ont été dûment massacrés, Télémaque et deux serviteurs s'emparent de Mélanthios, leur complice.
« Ils amenèrent ensuite Mélanthios par le vestibule et la cour : ils lui tranchèrent le nez et les oreilles avec le bronze cruel, lui arrachèrent les génitoires qu'ils jetèrent crues comme pâture aux chiens, lui coupèrent mains et pieds, étant ivres de colère. » (Jean-Pierre Georges, Odyssée, XXII, 476)
Dans ce passage, on voit que Jean-Pierre Georges, conformément à son habitude, pousse l'autodérision à un degré de raffinement extrême, sans tomber dans les deux écueils qui guettent les amateurs du genre : la préciosité et le narcissisme. Ce n'est pas en vain qu'il est surnommé l'« athlète chinonais du Rien » !
(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)
Un scélérat méconnu
« Si le monde connaissait le Moi aussi bien que je le connais, Messieurs, il l'échangerait dans ses paraboles contre la gerboise damasquinée ou le saumâtre caméléon. »
(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)
Voie sans issue
L'homme du nihil, seul face à lui-même, s'angoisse, et il devient alors urgent de fuir. Dans sa quête frénétique d'une issue, il se lie au phénomène, s'inscrit dans l'espace mondain et le temps devançant. Mais c'est en pure perte, car les catégories de l'espace et du temps pur ne peuvent être circonscrites phénoménologiquement. — Ô vanité ! ô néant ! « ô aueuglement estrange des hommes, gloriatur in malitia sua ! »
(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)
mercredi 24 octobre 2018
Un incessant bourrellement
« C'est ainsi que je vécus de longues années, dans une apparence de splendeur, entouré des hommages de l'omnitude, mais, au milieu de tous ces fastes, dans une profonde mélancolie qui s'aggravait encore du fait de la présence constante du vocable reginglette à l'arrière-plan de ma pachyméninge. »
(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)
Un passe-temps comme un autre
J'étudie les boues liquides, la poussière, les scories infundibuliformes.
(Luc Pulflop, Prière d'incinérer. Dégoût)
Une fin laborieuse
« Malgré les efforts des chevaux qui étaient jeunes et vigoureux (et peut-être trop) ce dernier supplice durait depuis plus d'une heure, sans qu'on en put prévoir la fin. Les médecin et chirurgien attestèrent à Messieurs les Commissaires qu'il était presque impossible d'opérer le démembrement si l'on ne facilitait l'action des chevaux en coupant les nerfs principaux qui pouvaient bien s'allonger prodigieusement, mais non pas être séparés sans une amputation ; sur ce témoignage, Messieurs les Commissaires firent donner ordre à l'exécuteur de faire cette amputation, d'autant plus que la nuit approchait, et qu'il leur parut convenable que le supplice fût terminé auparavant. En conséquence de cet ordre, aux jointure des bras et des cuisses on coupa les nerfs au patient ; on fit alors tirer les chevaux, après plusieurs secousses, on vit se détacher une cuisse et un bras, Damiens regarda encore cette douloureuse séparation : il parut conserver la connaissance après deux cuisses et un bras séparés de son tronc ; ce ne fut qu'au dernier bras qu'il expira. » (A.-A. Le Breton, Pièces originales et procédures du procès fait à Robert-François Damiens, tant en la prévôté de l'Hôtel qu'en la Cour de Parlement, Pierre-Guillaume Simon, Paris, 1757)
(Thésar du Jin, Carnets du misanthrope)
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