mercredi 4 décembre 2024

Béjaune

 

Rimbaud est le béjaune archétypal. Il parle sans cesse de choses qu'il ne connaît pas (la vie). Il fait « jore », prétend qu'il est insoucieux de tous les équipages, et cætera. Et le pis est que les gens marchent. Bon Dieu de béjaune !
 
(Lucien Ganne, Syllogismes de la mer Rouge)

mardi 3 décembre 2024

Avec un peu de chance...

 

La mort viendra et elle aura « une sacrée paire de biberons Robert ».
 
(Lucien Ganne, Syllogismes de la mer Rouge)

Jeszcze nie

 

Au moment où vous croyez avoir atteint le dernier degré de la solitude, quelqu'un vous parle et vous êtes obligé de répondre que non, vous ne prenez pas les vignettes. Vous avez encore des contacts humains, malgré tout. Vous n'êtes pas encore « seul comme Franz Kafka » — qui avait bien une tête à prendre les vignettes, lui, soit dit en passant.
 
(Lucien Ganne, Syllogismes de la mer Rouge)

Dans le potage

 

À l'instar du żurek polonais, la vengeance est une soupe aigre assez épaisse. Le żurek se mange chaud, c'est la seule différence.
 
(Lucien Ganne, Syllogismes de la mer Rouge)

Un multidélinquant

 

Vous rappelez-vous « l'homme le plus laid », chez Nietzsche ? Avec cet horrible serpent noir qui lui sort de la bouche, dont il finit par couper la tête d'un coup de dents ? Eh bien dans ses mémoires, le commissaire Pellegrini dit qu'il a acquis la quasi certitude que cet homme le plus laid avait non seulement tué Dieu (comme l'en accuse Nietzsche) mais encore volé l'orange du marchand.
 
(Lucien Ganne, Syllogismes de la mer Rouge)

lundi 2 décembre 2024

Descente à Mijoux

 

Il arrive un moment dans la vie où la beauté vous paraît presque aussi repoussante que la laideur. Il est alors temps de quitter la Faucille et de redescendre à Mijoux pour arriver à Saint-Claude par Septmoncel, autrement dit de tirer sa révérence à ce « monde de néant ».
 
(Lucien Ganne, Syllogismes de la mer Rouge)

Recette du succès de Kérouac

 

Si Jacques Kérouac avait été un petit gros, personne ne lirait plus ses livres aujourd'hui. Mais c'était un grand sec, qui en outre avait le même blue jean que James Dean (il faisait sa frime). À quoi tient le succès, dans le domaine des lettres !
 
(Lucien Ganne, Syllogismes de la mer Rouge)

La belle vie

 

Faire une partie de bouligne avec Raymond Queneau ; puis, s'il nous reste un peu d'oseille, boire un ouiski ou un coquetèle au bar du bouligne... C'est ça qui serait choucard.
 
(Lucien Ganne, Syllogismes de la mer Rouge)

Jeune fille russe

 

Pas plus que le vieux Tourgueniev, nous ne pouvons détruire en nous le souvenir de la « jeune fille russe ». C'est emmouscaillant.
 
(Lucien Ganne, Syllogismes de la mer Rouge)

dimanche 1 décembre 2024

Prénoms

 

Paul Rée n'aimait pas son prénom. Il s'en plaignait souvent à Nietzsche et à Lou Andreas-Salomé. Il aurait voulu s'appeler Mifasol, comme Marisol Touraine. Quant à sa femme, il ne l'avait pas encore trouvée mais il voulait absolument qu'elle se prénommât Hilde, pour le calembour et parce qu'il aimait bien les prénoms germaniques traditionnels.
 
(Lucien Ganne, Syllogismes de la mer Rouge)

Carbonarisme bipédique

 

Il n'est pas besoin d'être un fin psychologue pour arriver à la conclusion que les gens sont des salops et qu'on ne peut pas leur faire confiance. Ils sont tout le temps à mijoter des coups fourrés. Ils fomentent ; ils trament ; ils ourdissent. On dirait des « carbonari ».
 
(Lucien Ganne, Syllogismes de la mer Rouge)

Esprit de sacrifice

 

L'être humain peut sacrifier sa vie pour sauver son enfant (en se jetant à l'eau ou en entrant dans une maison en feu) mais remarquez qu'il ne le fera jamais pour sauver sa bonne femme. On peut dire beaucoup de choses de lui mais il n'est pas con à ce point-là.
 
(Lucien Ganne, Syllogismes de la mer Rouge)

Un philosophe prévoyant

 

Les concepts qu'il n'utilisait plus, le philosophe Jean Grenier les remisait à la cave pour les plus gros, dans un cabanon de jardin pour les autres. Il disait que « ça peut toujours servir ».
 
(Lucien Ganne, Syllogismes de la mer Rouge)

samedi 30 novembre 2024

Le monstre bipède : un artiste du creux

 

Jetez un coup d'œil dans l'âme d'autrui, vous ne verrez que le vide. Puis jetez un coup d'œil dans la vôtre : même chose. Le vide, toujours le vide... Ce n'est pas avec ça qu'on va construire une « relation romantique » avec une personne du sexe, astheûre.
 
(Lucien Ganne, Syllogismes de la mer Rouge)

Grosse excuse

 

C'est Ponce Pilate qui demande à Jésus ce que c'est que la vérité, et alors Jésus dit comme ça qu'il a dû aller à l'enterrement de sa grand-mère et qu'il n'a pas eu le temps de réviser.
 
(Lucien Ganne, Syllogismes de la mer Rouge)

En désespoir de cause

 

Si nous avions un petit reste d'énergie, nous écririons une lettre à la Kommandantur pour dénoncer la malrucienne « condition humaine ». Connaissant les Alboches, ça barderait pour son matricule.
 
(Lucien Ganne, Syllogismes de la mer Rouge)

Thérapeutique

 

Untel est un salop. Il fallait que ce soit dit. Émile Cioran assure que ça soulage. Il recommande même de l'écrire plein de fois sur un petit bout de papier que l'on place ensuite dans sa chaussure. 
 
(Lucien Ganne, Syllogismes de la mer Rouge)

vendredi 29 novembre 2024

Un maigre bilan

 

Le monstre bipède, la seule chose qu'il sait faire, c'est vieillir. Pour ça, moïeux, ça y va : il vieillit comme il respire. Pour être tout à fait juste, précisons tout de même que certains écrivent aussi des poëmes (mais ça ne casse pas trois pattes à un canard).
 
(Lucien Ganne, Syllogismes de la mer Rouge)

Quena

 

Même si, fatigué de l'existence, on se retrouve un jour à nager dans le brouillard et à rouler dans l'herbe, on n'écoutera pas Tom à la guitare ni Phil à la quena. Ils peuvent aller se faire voir chez Plumeau, ces cons de hippies, avec leurs « barrettes de shit ». Et le gars Phil, il peut se la carrer dans le fiak, sa « quena ».
 
(Lucien Ganne, Syllogismes de la mer Rouge)

Une émouvante réunion

 

Il n'y a pas plus comique que ces critiques de livres où l'on vous dit que « l'intime rejoint l'universel ». On aimerait voir ça, c'est sûrement très émouvant. Cette réunion de l'intime et de l'universel, c'est-à-dire.
 
(Lucien Ganne, Syllogismes de la mer Rouge)

Conversion du Dasein

 

Sans aller jusqu'à dire que la vie est un convertisseur Bessemer, on avouera qu'elle convertit. Elle prend un homme jeune et en bonne santé et le transforme en un « vieux jeton » affligé de toutes sortes de maux, simplement en utilisant l'oxygène de l'air (comme le convertisseur Bessemer).
 
(Lucien Ganne, Syllogismes de la mer Rouge)

jeudi 28 novembre 2024

Une aversion qui tient compagnie

 

Alfred de Musset avait horreur du pain. Ce n'était pas grand chose, mais ça l'aidait à se sentir moins seul.
 
(Lucien Ganne, Syllogismes de la mer Rouge)

Tout passe

 

La fleur se fane, le petit chat se fait écraser, la jeune fille en fleur se transforme en « milf »... C'est ce qu'on appelle l'impermanence des choses — et ce n'est pas gai (sauf peut-être pour le philosophe Bergson, qui était assez amateur de « milfs »).
 
(Lucien Ganne, Syllogismes de la mer Rouge)

Jacks of all trades

 

En plus d'être experts dans le domaine de la poésie intimiste, les membres du « groupe Verlaine » — Arthur Rimbaud, Tristan Corbière, Germain Nouveau, Verlaine lui-même — se faisaient forts de vous installer des panneaux photovoltaïques « en moins de temps qu'il n'en faut pour cuire des asperges » (avec contrat de maintenance).
 
(Lucien Ganne, Syllogismes de la mer Rouge)

La solution du maurrassisme

 

Il ne faudrait pas croire que quand on est dégoûté de tout, on n'a le choix qu'entre la bouche d'un pistolet et les pieds d'un crucifix. Il y a aussi la solution du maurrassisme. Car être maurrassien, ce n'est pas seulement montrer un attachement quasi religieux à la personne du roi, ce n'est pas seulement exalter le sentiment national, c'est aussi une façon de dire « merde à celui qui le lira ». Et quand on est dégoûté de tout, c'est exactement ce qu'on a envie de dire.
 
(Lucien Ganne, Syllogismes de la mer Rouge)

mercredi 27 novembre 2024

Pitié pour le romancier de l'absurde

 

Si les gens se contentaient de citer Sacha Guitry ou Tristan Bernard... Mais il faut aussi, pour se faire mousser, qu'ils citent le négateur universel Émile Cioran, le penseur paradoxal Frédéric Nietzsche et le romancier de l'absurde Albert Camus, les salops ! Arrière ! Bas les pattes ! Pas touche au romancier de l'absurde, au moins !
 
(Lucien Ganne, Syllogismes de la mer Rouge)

Déchéance

 

La vie, ça ne commence pas si mal, on est assis dans le fauteuil à oreilles des Auersberger, on mange des petits fours, on écoute les conversations... Mais très vite, la situation se dégrade, on doit quitter le fauteuil à oreilles des Auersberger, et finalement, après des années de déchéance, on se retrouve assis sur la banquette de la salle Bordone, seul, vieux, perclus de rhumatismes, à attendre la mort. Seule consolation : on peut apercevoir l'Homme à la barbe blanche du Tintoret (en se penchant un peu).
 
(Lucien Ganne, Syllogismes de la mer Rouge)

Mon pote le citant

 

Qu'ont les gens à citer ? Pourquoi citent-ils ? Ne voient-ils pas que c'est humiliant, de citer ? Est-ce que nous citons, nous ? Nous ne citons pas !
 
(Lucien Ganne, Syllogismes de la mer Rouge)

Pas Keats

 

Les personnes qui citent Keats n'ont honte de rien. Elles mériteraient le supplice du pal. Si elles veulent tellement faire « jore », elles devraient le faire avec quelqu'un d'autre. Parce que Keats... non. Déjà qu'il ne supportait pas la souffrance d'être heureux... alors être cité par des imbéciles qui font « jore »...
 
(Lucien Ganne, Syllogismes de la mer Rouge)