jeudi 10 mai 2018

Vengeance


Le soir du 3 mars 1902, alors que, l'école finie, le jeune Martin rentre à la maison, il tombe nez à nez avec un molosse aux babines saignantes — vraisemblablement un dogue allemand arlequin comme celui qui garde la propriété du sinistre docteur Müller dans l'Île Noire. Avant qu'il ait pu prendre ses jambes à son cou, la bête féroce se jette sur lui et lui mord le « fondement de l'historialité du Dasein »

Heidegger rumine sa vengeance pendant de longues années, mais quand il lui donne enfin libre cours, elle est terrible. Dans Sein und Zeit, il décrète que l'animal — l'animal en général, pas seulement celui qui lui a cruellement entamé le fessier — est « pauvre en monde » parce que « ses inhibitions le cloisonnent dans une dépendance pulsionnelle panique et aliénante » !

Sa zoophobie ne fera qu'empirer avec les années, au point qu'à la fin de sa vie il lui sera insupportable d'entendre le mot « chèvre » (Ziege).


(Jean-René Vif, Scènes de la vie de Heidegger)

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