« Quand j'entends le mot vivre, je sors mon revolver ou du poison. » (Luc Pulflop)
lundi 2 juillet 2018
Épaves mobiliaires
Est dite mobiliaire une épave qui consiste en quelque effet mobiliaire, comme un animal, un poisson, un alcoolique invétéré, un individu « sans domicile fixe », etc. Ces sortes d'épaves sont appelées mobiliaires pour les distinguer des épaves foncières, qui consistent en immeubles.
L'homme du nihil en rencontre souvent lors de ses sorties dans le réel, de ces épaves mobiliaires : des tas de loques vermineuses et de chairs exténuées, qui empestent le « rouquin » et qui laissent exploser à tout propos une violence bestiale.
L'absurde instinct vital qui rive encore ces déchets à l'existence l'écœure, mais malgré le dégoût qui l'étreint, il est tenté de s'écrier : « Ô épaves humaines ! Je suis des vôtres ! »
(Robert Férillet, Nostalgie de l'infundibuliforme)
Tout doit disparaître
Les sapeurs-pompiers sont intervenus ce jeudi matin au 11, rue des Peupliers dans le quartier de l'Orme pour secourir un homme qui s'est défenestré depuis le troisième étage du bâtiment. Il est tombé sur une voiture.
Selon les premières investigations, le désespéré s'était persuadé que le Moi individuel constitue toute la réalité, et que les autres Moi n'ont pas plus d'existence que les personnages des rêves. Cette attitude mentale, souvent présentée comme une conséquence logique du caractère idéel de la connaissance, est appelée solipsisme par les philosophes, selon une source policière. Elle pourrait être la cause de son geste fatal. En se tuant, supposent les enquêteurs, il ambitionnait sans doute de « détruire le monde ».
Blessé grièvement, le suicidé a été pris en charge et transporté au centre hospitalier Saint-Charles de Saint-Dié-des-Vosges, mais le pronostic des médecins est très réservé quant à la capacité de son Moi à persévérer dans l'être. (L'Est Républicain, 23 novembre 2017)
(Martial Pollosson, L'Appel du nihil)
Touriste de bananes (Georges Simenon)
Il y avait trente-sept jours que le bateau, qui s'appelait l'Île-de-Ré, avait quitté Marseille ; on était parti qu'il gelait et tous les passagers, sauf deux, avaient été malades en sortant de Gibraltar ; après la monotonie des houles de l'Atlantique, on s'était ébroué dans les bals Doudou de la Guadeloupe et le missionnaire des secondes classes lui-même avait revêtu un costume civil pour accompagner la famille Nicou ; à Panama, les dames avaient acheté des parfums qui y sont meilleur marché que partout, et on avait déjeuné sur le pont en traversant le canal, car c'est la tradition ; on approchait des antipodes ; on avait aperçu de loin les Galápagos, photographié des pélicans et des poissons volants ; Muselli, l'administrateur de première classe qui jouait de la guitare hawaïenne, avait acheté une tête d'Indien réduite à la grosseur d'un poing d'enfant ; on était à l'autre bout du monde, à cisailler patiemment, avec un ronron de machine-outil, l'eau trop lisse et trop brillante du Pacifique qui forçait à porter des verres fumés ; le trait qui, sur la carte, dans le salon des premières, s'allongeait chaque jour, toucherait bientôt aux points minuscules des Marquises ; il y avait trente-sept jours qu'on n'était plus en France, ni nulle part. Et pourtant c'était dimanche !
Un vrai dimanche, un dimanche comme tous les dimanches, alors qu'on aurait pu croire que, dans cette sorte d'infini où voguait l'Île-de-Ré, tous les jours se ressemblaient. Certes, à dix heures du matin, un steward annamite avait parcouru le bateau en agitant une petite cloche qui rappelait celle des enfants de chœur ; certes, le missionnaire roux, qui avait passé trente ans aux Nouvelles-Hébrides, avait célébré une messe dans la salle à manger des premières où, à cette occasion seulement, les passagers de seconde avaient accès.
Mais pourquoi, à trois heures de l'après-midi, c'est-à-dire à l'heure de la sieste, cela sentait-il encore le dimanche ? Et d'abord, pourquoi y avait-il en général de l'étant, et non pas plutôt rien ? Cette question, que l'on pourrait qualifier de leibnizienne, Heidegger l'avait commentée de façon singulière dans sa leçon inaugurale de 1929 intitulée Qu'est-ce que la métaphysique. Mais à bord de l'Île-de-Ré, personne ne le savait. Les passagers étaient trop occupés à jouer au bridge, à la belote, aux échecs, au palet, pour se soucier d'ontologie. Les fous !... Les pauvres fous !...
(Maurice Cucq, Georges Sim et le Dasein)
Philosophisme convulsif
Maladie convulsive épidémique des Allemands; raphania, Linné. — « Dans la troisième période, lorsque la maladie se termine par la guérison, les convulsions cessent ; mais il reste souvent un tremblement des mains, de l'affaiblissement dans la vue, des phénomènes épileptiformes qui reparaissent par intervalle, et un désir irrépressible de "créer des concepts" » (E. Monneret et L. Fleury, Compendium de médecine pratique, Béchet jeune, Paris, 1839)
(Johannes Zimmerschmühl, Pensées rancies et cramoisies)
Un fatidique bourrineau
Le 3 janvier 1889, alors qu'il prend les eaux à La Bourboule pour soigner une « constipation conceptuelle opiniâtre », le philosophe Frédéric Nietzsche se jette en pleurant au cou d'un cheval de fiacre brutalisé par son cocher. Son logeur le reconduit à son domicile où le « penseur paradoxal » demeure prostré durant deux jours avant de sombrer définitivement dans la démence.
Dans sa biographie de Nietzsche, le très inventif Daniel Halévy identifie ce cheval au Dasein et le cocher à l'haeccéité : en utilisant son corps comme un bouclier, le philosophe voulait en réalité protéger l'étant existant du fouet de son éternel tourmenteur !
(Léon Glapusz, Mélancolie bourboulienne)
À brûle-pourpoint
Il arrive que la pensée de se détruire s'empare du suicidé philosophique alors qu'il regarde son reflet dans la vitrine d'un magasin, tandis qu'autour de lui la tourmente souffle et siffle, s'abat sur les parapluies en gouttes drues et serrées, et ruisselle sur les dos courbés, les têtes et les mains bleuies par le froid. Comme il aimerait alors, le suicidé philosophique, que la tempête chasse au loin l'idée du Rien, qu'elle la pousse loin de sa pachyméninge, vers les déserts gréseux, les ravines, les champs d'absinthe et de chardon, découronnant les hautes meules et dispersant sur les aires sa pourriture gluante !
(Raymond Doppelchor, Océanographie du Rien)
dimanche 1 juillet 2018
Infaillibilité du suicidé philosophique
Tendu vers une fin unique — son anéantissement —, le suicidé philosophique, malgré sa torpeur apparente, poursuit un chemin en lequel il n'est point d'illusions. Un suicidé philosophique, comme un arbre, un poudingue de Vallorcine, ou tout objet amorphe, inanimé et cristallin, ne se trompe jamais.
(Marcel Banquine, Exercices de lypémanie)
Hébéphrénie
L'inconcevabilité d'autrui fait tenir tout dialogue du désastre.
(Luc Pulflop, Prière d'incinérer. Dégoût)
Theorema egregium
En géométrie, le theorema egregium (« théorème remarquable » en latin) est un important résultat établi par Carl Friedrich Gauss et portant sur la courbure des surfaces.
Il énonce que celle-ci peut être entièrement déterminée à partir de la métrique locale de la surface, c'est-à-dire qu'elle ne dépend pas de la manière dont la surface est plongée dans l'espace tridimensionnel. On peut même, au dire de Gauss, la plonger dans le Bosphore enfermée dans un sac de cuir plein de vipères, comme on faisait jadis aux parricides !
(Włodzisław Szczur, Mathématique du néant)
Il énonce que celle-ci peut être entièrement déterminée à partir de la métrique locale de la surface, c'est-à-dire qu'elle ne dépend pas de la manière dont la surface est plongée dans l'espace tridimensionnel. On peut même, au dire de Gauss, la plonger dans le Bosphore enfermée dans un sac de cuir plein de vipères, comme on faisait jadis aux parricides !
(Włodzisław Szczur, Mathématique du néant)
Conversion manquée
Au début de L'Affaire Tournesol, le capitaine Haddock, tout juste remis d'une grave dépression nerveuse 1, conseille à Tintin « d'écouter le silence ». Il est fatigué du brouillamini de l'existence, il est devenu frileux et sédentaire, et comme les chats de Baudelaire, il cherche « le silence et l'horreur des ténèbres ».
Il n'est pas loin d'être devenu un homme du nihil, mais le « fétide et rébarbatif réel » le reprendra bientôt dans son maelström dérisoire, aidé par le frénétique Tintin décidément incapable de concevoir que le bonheur puisse naître de l'inaction.
1. Consécutive à la lecture des Principes de la doctrine de la science de Fichte, d'après Gragerfis.
(Hermann von Trobben, Le Monocle du colonel Sponsz)
Crocodile de Meudon
Louis-Ferdinand Céline, alors qu'il habitait avec son épouse Lucette la villa Maïtou sise au 25 ter, route des Gardes, a-t-il connu le fameux crocodile de Meudon, auquel certains prétendent même qu'il était apparenté ?
Ce dernier, s'il est véritablement un crocodile, aurait vécu dans l'époque secondaire, car il a été trouvé dans la craie. Mais cet animal n'est connu que par une seule dent 1, et l'on ne peut pas, sur un si faible indice, décider de ses véritables affinités génériques, fût-ce avec un auteur si proche de lui par la force et la voracité.
1. cf. Cuvier, Recherches sur les ossements fossiles de quadrupèdes, 4° édit., t. IX, p. 320.
(Robert Férillet, Nostalgie de l'infundibuliforme)
Ce dernier, s'il est véritablement un crocodile, aurait vécu dans l'époque secondaire, car il a été trouvé dans la craie. Mais cet animal n'est connu que par une seule dent 1, et l'on ne peut pas, sur un si faible indice, décider de ses véritables affinités génériques, fût-ce avec un auteur si proche de lui par la force et la voracité.
1. cf. Cuvier, Recherches sur les ossements fossiles de quadrupèdes, 4° édit., t. IX, p. 320.
(Robert Férillet, Nostalgie de l'infundibuliforme)
Une vie de clochard (Charles Bukowski)
Harry se réveilla avec la gueule de bois. Une sévère gueule de bois.
— Merde, fit-il doucement.
Il y avait un petit lavabo dans la chambre.
Harry se leva, pissa dans le lavabo, le rinça, puis mit sa tête sous le robinet et but un peu d'eau. Après quoi, il s'aspergea la figure et s'essuya avec un pan de son maillot de corps.
On était en 1943.
Harry ramassa ses vêtements éparpillés par terre et commença à s'habiller. Les stores étaient baissés et des rayons de soleil filtraient au travers des déchirures.
Il sortit dans le couloir pour aller aux toilettes. Il ferma la porte au verrou et s'installa, étonné de pouvoir encore chier. Ça faisait des jours qu'il n'avait rien mangé.
Bon dieu, se dit-il, les gens ont des intestins, des bouches, des poumons, des oreilles, des nombrils, des organes génitaux, et... des cheveux, des pores, des langues, des dents parfois, et tout le reste... des ongles, des cils, des orteils, des genoux, des estomacs...
Il y avait quelque chose de tellement ennuyeux dans tout ça. Pourquoi est-ce que personne ne se plaignait ? Pourquoi les gens n'envoyaient-ils pas balader toutes ces conneries et n'adoptaient-ils pas le nihilisme phénoménologique de Fichte, selon lequel le monde n'est que « la manière dont le néant prend figure et apparence pour lui-même en se comprenant comme tel et en s'opposant à l'être en lui-même invisible » ?
Comme l'idéaliste allemand, Harry était persuadé que « le monde conserve la trace ineffaçable de son néant », ce qui ne l'empêcha pas de donner bientôt naissance à un odoriférant « cigare japonais ».
(Étienne-Marcel Dussap, Forcipressure)
Le plus important
Maintenant que nous connaissons par le papyrus Rhind les problèmes relatifs à la pyramide, et par le papyrus Golenichtchev la formule du tronc de pyramide et les recherches sur la surface de la sphère, que sont traduites nombre de tablettes géométriques de la première dynastie babylonienne, en particulier sur les sections du triangle et le trapèze, nous pouvons nous occuper du plus important (to timiotaton) : la réunion du Moi au Rien par le moyen de l'homicide de soi-même.
(Johannes Zimmerschmühl, Pensées rancies et cramoisies)
Pauvreté en monde
« Geoffray Baloche n'en a pas cru ses yeux quand il a découvert que trois de ses vaches avaient été tuées par balle ce dimanche. Cet éleveur de bovins de la race Bleu blanc belge, domicilié à Entraigues dans le Vaucluse, allait visiter son troupeau lorsqu'il a fait cette macabre découverte. Il a porté plainte auprès des gendarmes.
"Je suis retourné voir mes bêtes. Il était environ 10 h 30. Trois vaches étaient mortes. Tuées d'une balle voire deux dans la tête. Une autre a été blessée. j'ai enlevé des plombs de son cou. Je pense qu'elle s'est fait tirer dessus avec de la chevrotine. Un veau a également été blessé. Il a reçu des petits plombs à l'intérieur de la gueule", explique-t-il, désespéré.
Selon lui, elles ont été abattues de nuit, "alors qu'elles dormaient". C'est un coup dur pour le jeune homme qui s'est lancé dans l'élevage en 2016. Deux petits veaux se retrouvent aujourd'hui sans mère et la vache fétiche du troupeau, prénommée Marguerite, a été abattue aussi.
"C'était comme un animal de compagnie. C'est grâce à elle que ma femme Manon et moi avions décidé de nous lancer dans l'aventure", se souvient Geoffray Baloche.
"Je tiens à souligner, continue-t-il, que contrairement à ce que soutient Heidegger, les bovins possèdent comme nombre d'animaux supérieurs l'intuition vitale, élémentaire bien qu'authentique, de la mort. La thèse heideggérienne selon laquelle « l'animal est pauvre en monde » est donc d'une indigence phénoménologique abyssale."
Il espère, primo, pouvoir acheter une nouvelle vache au plus vite, deuzio, que les progrès des "neurosciences" donneront bientôt un démenti définitif au diagnostic du lugubre ontologue wurtembourgeois. » (France Soir, 9 janvier 2018)
(Jean-Guy Floutier, Philosopher tue)
L'endurante passion de la vérité
Le suicidé philosophique, encalminé qu'il est sur la mer plate du Rien, dédaigne l'historicité de la pensée qu'il ne voit que sous la forme du déclin et de l'errance. Quant à son œuvre maîtresse, l'homicide de soi-même, elle représente la tentative de surmonter la différence nominaliste entre concept et réalité par la logicisation, et finalement la révolvérisation du concept d'être.
(Raymond Doppelchor, Océanographie du Rien)
samedi 30 juin 2018
Sudation conceptuelle
Ô philosophe ! Ami de la sagesse ! Ce que tu dois suer mon brave !
(Luc Pulflop, Prière d'incinérer. Dégoût)
Thermalisme existentiel
Aussi inouï que cela puisse paraître, les Grands Thermes de La Bourboule proposent « des cures thermales et des séjours santé dans le cadre du traitement des affections liées aux voies respiratoires 1, à la dermatologie, aux muqueuses bucco-linguales ou encore aux troubles de l'haeccéité ».
La brochure précise même qu'« outre le savoir-faire des Grands Thermes en matière de cures thermales et l'exceptionnelle qualité de son air, La Bourboule dispose de nombreux équipements pour les enfants (manèges du parc Fenestre, halte-garderie Les Gribouilles,...) et les suicidés philosophiques (taupicide, cordes de violoncelle, gazinières, puits busés, et cetera) ».
1. Les « usuelles asphyxies » où s'embouque l'étant existant ?
(Léon Glapusz, Mélancolie bourboulienne)
Si c'est un homme
Tout commence mercredi vers 18 h 30, sur la route Nantes – Cholet : à la limite des deux départements du Maine-et-Loire et de la Loire-Atlantique, deux voitures s'accrochent. Les deux conducteurs impliqués se garent sur le côté pour établir un constat. Alors que les discussions commencent à peine, l'un des deux protagonistes décide de partir à pied et franchit la glissière de sécurité, abandonnant son chien dans sa voiture.
Arrivés sur les lieux, les gendarmes de Vallet tentent de repérer le fuyard. Mais dans le noir et sous des trombes d'eau, les recherches sont rapidement interrompues.
Ce n'est que le lendemain matin que l'homme sera retrouvé par un promeneur. Sans vie. Dans un fossé, non loin d'un chemin. Ce Finistérien de 44 ans s'était, selon les premiers éléments de l'enquête, donné la mort en se tailladant les veines de l'avant-bras. « On a retrouvé un cutter dans les buissons », rapporte un gendarme. Le Breton était de passage. Il n'avait aucune attache dans le secteur.
« On suppose qu'il a fui parce qu'il était en défaut de permis. Il lui avait été retiré pour conduite en état d'ivresse. Pour le reste, difficile à expliquer si ce n'est par quelque fragilité psychologique, par la difficile cohabitation avec une belle-mère envahissante, ou par le sentiment de culpabilité lié à son statut de rescapé », conclut le gradé qui, inexplicablement, semble confondre ce cas avec celui de l'écrivain Primo Levi. Des examens médicaux supplémentaires seront toutefois menés sur le corps du défunt. (L'Hebdo de Sèvre et Maine, 7 janvier 2016)
(Martial Pollosson, L'Appel du nihil)
Complétude de la désolation
L'accablement du sujet pensant en proie aux affres de l'haeccéité est complet, tant au sens de Cauchy qu'à celui de Dedekind.
(Marcel Banquine, Exercices de lypémanie)
Méphistophélique
Aux yeux de ses détracteurs, le suicidé philosophique passe pour une nature démoniaque à outrance, un résumé de toutes les difformités morales. À tel point que quand il le rencontre, l'« homme de la Nature et de la Vérité » se figure tomber sur l'infernal garde-chasse du Freischütz de Weber — confusion qu'encourage, il est vrai, la pétoire que trimballe en permanence le zélateur de la mort volontaire.
(Robert Férillet, Nostalgie de l'infundibuliforme)
Mélancolie bourboulienne
Lorsque plusieurs suicidés philosophiques se rencontrent, il n'est pas rare qu'après avoir échangé leurs impressions, ils constatent avec stupéfaction que, comme les frères Robinhoude, « ils sont tous de La Bourboule » ! Cette station thermale du Puy-de-Dôme serait-elle aussi propice à la mélancolie que la grande plaine hongroise balayée par la bora ?
(Johannes Zimmerschmühl, Pensées rancies et cramoisies)
Scrupule excessif
Quelques-uns, comme Esquirol, veulent qu'on descende dans la conscience de chaque individu, qu'on scrute les secrets intimes du cœur humain, que dans tous les cas, l'on examine et l'on pèse les sentiments qui habitent un individu frappé de rétention fécale, avant de faire l'application du mot constipé.
Mais quand on songe que la constipation se manifeste presque toujours dans l'ombre et le secret, et sans aucune espèce de témoins, il nous est impossible de connaître quelles passions, quels sentiments peuvent agiter l'âme du malheureux incapable de « faire » !
(Raymond Doppelchor, Océanographie du Rien)
Métamorphose
Selon Jean Chrysostome (Clavis Patrum Græcorum), l'illusionniste Bruno, qui dans son numéro au Music-Hall Palace change l'eau en vin, est capable d'améliorer de même nos volontés lâches et rebelles. « Il est des hommes, dit-il, qui ne diffèrent point de l'eau, tant ils sont froids, mous et flottants. Ces sortes de gens ainsi malades, amenons-les à Bruno, afin qu'il change leur volonté ; à l'eau, il donnera la qualité du vin : ils coulent et se répandent de tous côtés, il les rendra stables et solides, et ils seront un sujet de joie pour eux-mêmes et pour les autres. »
Mais qui sont ces hommes froids ? Ce sont ceux qui s'attachent aux biens passagers de cette vie, ceux qui ne méprisent pas les plaisirs de ce monde, ceux qui aiment la gloire et la puissance, exempli gratia le général Tapioca.
(Hermann von Trobben, Le Monocle du colonel Sponsz)
Complication inattendue
En géométrie symplectique, le théorème de non-plongement de Gromov affirme l'impossibilité de plonger de manière symplectique une boule de rayon R dans un cylindre de rayon r < R.
Ce théorème complique singulièrement la tâche au suicidé philosophique qui veut mettre fin à ses jours en utilisant une arme à chargement par la gueule, par exemple un tromblon ou un fusil à canon rayé Springfield modèle 1855.
(Włodzisław Szczur, Mathématique du néant)
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