mardi 23 octobre 2018

Interrogation


Le suicidé philosophique qui manque à lui-même n'est-il pas toujours un suicidé philosophique défectueux ?

(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)

De la certitude


« Messieurs, j'ai bien l'honneur de vous assurer que ceci est ma main. »

(Luc Pulflop, Prière d'incinérer. Dégoût)

Huile de tourlourou


« M. Virey a fait connaître à la section de Pharmacie de l'Académie royale de Médecine, un médicament huileux employé par les nègres pour soulager les douleurs dues à l'haeccéité. Cette huile s'obtient en exposant les viscères, le foie, les intestins du crabe, à l'action de la chaleur, exprimant ensuite, et tirant à clair. » (A. Chevalier, A. Richard, J.-A. Guillemin, Dictionnaire des drogues simples et composées, Béchet jeune, Paris, 1828)

(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)

lundi 22 octobre 2018

Interlude

Jeune femme lisant les Scènes de la vie de Heidegger de Jean-René Vif

Abomination


Peu importe à l'homme du nihil de savoir qui a conçu l'abomination que les philosophes nomment « réalité empirique », ni pourquoi elle est là, car il faut lui rendre cette justice qu'elle est d'une laideur assez éloquente pour frapper d'inutilité toutes les explications possibles. Le fait est qu'elle est là, qu'elle s'est introduite par force dans son « conscient intérieur », et le scandale est grand.

(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)

Un terrible pronostic


La colique de miserere est presque toujours mortelle.

(Luc Pulflop, Prière d'incinérer. Dégoût)

Oubli coupable


Vers 249 avant notre ère, un troisième concile bouddhique — genre de colloque de Cerisy avant l'heure — se déroule à Pataliputra, sous l'impulsion du roi Asoka. Les disciples y abordent les thèmes de l'existence de l'âme, tentent de mettre au point une certaine orthodoxie du bouddhisme et définissent le Moi « un empilement incertain, bringuebalant et sans cesse compensé » — ce qui ne laisse pas d'évoquer une motocyclette chargée de cages à poules. Cependant, inconcevable oubli que devra réparer l'homme du nihil, ils omettent de définir aucun protocole de dilacération du Moi ! — Ô vanité des vanités ! Ô rictus bestial de l'existence !

(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)

Interlude

Jeune femme lisant la Mathématique du néant de Włodzisław Szczur

Travail intérieur


La paix que procure l'idée de l'homicide de soi-même n'est pas donnée par la nature, dès l'abord, complète. Elle suppose un travail intérieur — par exemple sur un « matelas-tombeau » à la Heinrich Heine — où l'homme affronte sa peur de vivre et de mourir.

(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)

Dangers de l'improvisation


Je m'empêtre dans le linceul de l'extemporanéité.

(Luc Pulflop, Prière d'incinérer. Dégoût)

Désabusement précoce


« J'ai eu, mes amis, l'âme vitriolée dans ma jeunesse. Rien de frais n'y subsiste, hormis peut-être quelques sardines embouquées dans les méandres de mon être-là, et une fiole de vin résiné. »

(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)

Interlude

L'actrice Bette Davis lisant la Mélancolie bourboulienne de Léon Glapusz

Propitiation


On croirait presque surprendre un rite à voir le suicidé philosophique charger son revolver Smith & Wesson ; et la cartouche de calibre .44 russian qu'il place avec soin dans le barillet prend tout à coup un air d'antiquité extrême et un sens propitiatoire.

(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)

Mangeur d'hommes


Le tigre habite le sud de l'Asie, Sumatra et Java. Sa livrée, d'un beau jaune orangé, blanchâtre au ventre, est marquée de zébrures noires. Le tigre est, avec le lion, le plus puissant des carnassiers ; il est nocturne, se tient dans les forêts marécageuses, au voisinage des cours d'eau. Il attaque particulièrement l'homme ; de là le nom de mangeur d'hommes, qu'on lui a donné dans la région indienne, où il dépeuple les districts.

(Luc Pulflop, Prière d'incinérer. Dégoût)

Silence


Notre silence n'est en général, si l'on peut dire, que la cessation du bruit, mais dans la pensée de l'homicide de soi-même règne un silence d'une telle profondeur que personne ne consent à l'endurer plus d'une trentaine de secondes. Car non seulement on y entend le bruit de tam-tam que font les battements du cœur, mais le craquement amplifié des os à chaque mouvement, et le sifflement du sang dans le viscère. Cela inspire des sentiments mélancoliques et même de l'horreur.

(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)

dimanche 21 octobre 2018

Interlude

Jeune femme s'apprêtant à lire Forcipressure d'Étienne-Marcel Dussap

Parties rares, parties maigres


Une partie d'un espace topologique est dite rare si le complémentaire de son adhérence est partout dense. Une partie maigre est une réunion finie ou dénombrable de parties rares. — « Ah bon ! » s'exclame l'homme du nihil, rassuré.

(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)

Préparatifs


« Il faut que le suicidé philosophique, après avoir bien étudié la configuration de son Moi, l'ait tellement présente à la mémoire, qu'il puisse, sans la voir, en donner un dessin exact ; car les parties molles, le sang, le pachynihil, masquent les circonvolutions et les anfractuosités que le couteau doit parcourir ; il ne pourra donc pas être, en général, convenablement dirigé, sans la condition que nous venons d'énoncer. »  (Jacques Lisfranc, Précis de médecine opératoire, Paris, 1846)

(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)

Illumination


L'échec, voilà l'idée !

(Luc Pulflop, Prière d'incinérer. Dégoût)

Interlude

Jeune femme lisant l'Appel du nihil de Martial Pollosson

Liqueur antiputride


« On conçoit que la partie dominante de la liqueur de M. Faure de Beaufort étant l'acide vitriolique, la propriété qu'a cet acide de s'unir aux parties alcalescentes et de les neutraliser la rend propre à prévenir ou même à corriger la corruption du Moi. La plupart du temps, une cuillerée à soupe de cette liqueur suffit à subjuguer entièrement et définitivement le "sinistre polichinelle". » (Lavoisier, Rapport sur un moyen d'éviter la corruption du Moi, 1773)

(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)

Sur les traces de Péladan


L'exercice défécatoire me rapproche des mystagogues et illuminés.

(Luc Pulflop, Prière d'incinérer. Dégoût)

Assez


À quoi bon tenter d'appliquer des critères de pathologie à l'attitude de l'homme qui refuse de sortir de son lit le matin et se cache sous sa couverture ? À quoi bon le traiter de fléau dangereux, de fâcheux choléra, de vieux rat mort, de gâteux sans remède, de vil insecte, de potiron ? Il n'en a cure et nulle puissance au monde ne le fera bouger. Il en a tout simplement assez.

(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)

Interlude

Jeune femme lisant les Exercices de lypémanie de Marcel Banquine

L'archétype du raté


Personne ne veut être Soupault.

(Luc Pulflop, Prière d'incinérer. Dégoût)

Macération


Dans un essai de son recueil Fragmentarium, Mircea Eliade rappelle que « la saleté du corps, le grouillement des parasites, les haillons, les maladies dégoûtantes (lèpre, lupus, gale, etc.) sont recommandés par de très nombreuses techniques ascétiques, au moins comme exercices préliminaires. » Cela est vrai, sans doute, mais quant à l'homme du nihil, il fait fi de tels stratagèmes. La temporalité du temps, la mortalité de l'être mortel, l'haeccéité suffisent à sa macération.

(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)

Règle numéro 9


Comme Ribemont-Dessaignes, conserver le sens du sarcasme et s'interroger incessamment sur le mystère indéchiffrable de l'univers.

(Luc Pulflop, Prière d'incinérer. Dégoût)

samedi 20 octobre 2018

Interlude

Jeune femme lisant la Nostalgie de l'infundibuliforme de Robert Férillet

À vous rendre maboul


Comme le panoptique des frères Bentham, l'haeccéité crée un angoissant « sentiment d'omniscience invisible » chez celui qui en est affecté, car il ne peut jamais savoir s'il est observé ou non.

(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)