samedi 28 juin 2025

Ville d'Eu

 

Si, par une malchance extraordinaire, les habitants d'Eu (Seine-Maritime) nous confiaient l'administration de leur ville, nous ne dirions pas que nous sommes le maire d'Eu mais le maire de la ville d'Eu. Et ce serait la même chose à Empeaux (Haute-Garonne), Amphion (Haute-Savoie), ou Oku (Cameroun). Dans ce dernier cas, nous serions le maire de la ville d'Oku, c'est aussi simple que cela. Exister est suffisamment ridicule, on ne va pas en rajouter.
 
(Jean-Guy Floutier, Philosopher tue)

vendredi 27 juin 2025

La vérité

 

À la question de Pilate « Qu'est-ce que la vérité ? », Jésus répond qu'il sait ce que c'est mais que c'est dur à expliquer ; que ça ressemble un tant soit peu à une tête de chien couché ; que si Pilate ne le croit pas, il n'a qu'à demander à Simon dit Pierre, ou encore mieux, aller se faire voir chez Plumeau.
 
(Jean-Guy Floutier, Philosopher tue)

Les poëtes

 

Verlaine : Qu'est-ce t'as fait aujourd'hui, mon petit poussin ? 
Rimbaud : J'ai écrit un poëme. Écoute ça. C'est un trou de verdure où coule une rivière accrochant follement aux herbes des haillons — d’argent. Pas mal, hein ?
Verlaine : Ouais, surtout le coup des haillons — d'argent.
Rimbaud : Ouais, t'as vu l'enjambement un peu ?
Verlaine : J'ai vu. 
 
(Jean-Guy Floutier, Philosopher tue)

jeudi 26 juin 2025

Vie à la Kierkegaard

 

Faire tout comme Kierkegaard, c'est d'abord passer par une phase d'angoisse kierkegaardienne, puis, confronté à l'impossibilité d'être soi-même, faire l'expérience du désespoir kierkegaardien, enfin se pendre avec une ficelle qu'on a attachée au portique d'entrée du potager.
 
(Jean-Guy Floutier, Philosopher tue)

Goûts simples de Barrès

 

Un petit lopin de terrre... Une poignée de morts... Il n'en fallait pas plus à Maurice Barrès pour se sentir heureux.
 
(Jean-Guy Floutier, Philosopher tue)

mercredi 25 juin 2025

Littérature à l'estomac

 

Affluent du fleuve Adour, on emporte avec soi les Histoires extraordinaires ainsi que les Aventures d'Arthur Gordon Pym et on se gave de Poe.
 
(Jean-Guy Floutier, Philosopher tue)

Kuboa

 

Dans son roman La Faim, Knut Hamsun fait inventer à son héros le mot kuboa. Le génial inventeur précise aussitôt que ce vocable ne signifie ni exposition de bétail ni manufacture de tabac ni laine à tricoter. Mais alors ? Serait-il possible qu'il désigne un... mégalithe pellucide ? C'est-à-dire un mégalithe fait d'une matière transmettant la lumière d'une façon diffuse ?
 
(Jean-Guy Floutier, Philosopher tue)

mardi 24 juin 2025

Arithmétique du néant

 

Dénombrer au jour le jour les vicissitudes lassantes et monotones de son propre néant, c'est ce que faisait l'écrivain Berl. Et c'est ce que nous essayons de faire aussi, mais ce n'est pas si facile que ça en a l'air : on a vite fait de se tromper dans les chiffres.
 
(Jean-Guy Floutier, Philosopher tue)

Dissolution du Moi

 

En général, ceux qui ingérent de l'essence de térébenthine ou du distillat de pétrole le font parce qu'ils ne peuvent plus voir leur Moi en peinture. Ils veulent le diluer ou le dissoudre — quand ce n'est pas pis.
 
(Jean-Guy Floutier, Philosopher tue)

lundi 23 juin 2025

Dépravation de Jules Pascin

 

Kiki de Montparnasse trouvait le peintre Jules « pas sain » (ignorant, il faut croire, que ça se prononçait pasquine).
 
(Jean-Guy Floutier, Philosopher tue)

Invitation à bagratier

 

« Mais assez parlé de ce con de Pouchkine. Sortons le sauciflard, débouchons les litres et bagrations. » (Fiodor Dostoïevski, Discours sur Pouchkine)
 
(Jean-Guy Floutier, Philosopher tue)

dimanche 22 juin 2025

Barbet de Leipzig

 

Dans la pièce de Goethe, le diable se présente à Faust sous la forme d'un barbet noir. On s'attend à ce qu'il écrive Un prêtre marié, mais va te faire fiche : loin d'être d'Aurevilly (dans la Manche), ce barbet est de Leipzig (dans la Saxe).
 
(Jean-Guy Floutier, Philosopher tue)

La dernière joie

 

Il arrive un moment dans la vie où l'on n'a plus pour seul plaisir que d'aller de la mairie de Bezons à la gare de Houilles (douze minutes en passant par la rue Albert 1er quand le trafic est fluide). Tout le reste... pouah.
 
(Jean-Guy Floutier, Philosopher tue)

samedi 21 juin 2025

Aveux et anatropes, by Gilbert Garistre

 

Aveux et anatropes is a groundbreaking achievement, impeccably researched and brilliantly argued. Gilbert Garistre's work is accessible but also comprehensive, really turning the topic on its head and taking an unflinching look at the concept of monstre bipède. This is an ambitious and timely piece that absolutely cannot be ignored.”
 
(The Paris Review)

Thar she blows

 

C'est le capitaine Achab qui est dans une chaloupe en train de pourchasser Moby Dick quand il entend à la radio la composition du gouvernement Mauroy. Il entend : « Le Pensec à la mer ! Le Pensec à la mer ! » Aussitôt, il ordonne à ses hommes de « nager à culer » pour aller le repêcher.
 
(Jean-Guy Floutier, Philosopher tue)

vendredi 20 juin 2025

Respect de la parole donnée

 

L'évêque Cauchon ne s'en dédisait pas, non plus que le ministre Anicet Le Pors. Par contre, Marcel Rigout...
 
(Jean-Guy Floutier, Philosopher tue)

Ouaouaron

 

Est-ce son teint blafard ? Son crâne en pain de sucre ? Son intranquillité pessoaïenne ? La sonorité de son nom ? Difficile à dire, mais le général Bagration nous a toujours fait penser à un amphibien anoure, autrement dit à un batracien.
 
(Jean-Guy Floutier, Philosopher tue)

 

jeudi 19 juin 2025

Prémonition de Fénéon

 

Ce Pinard dont les gerbes flambaient souvent ; ce Pinard qui, dans le Loiret, armé, guetta ; ce Pinard qui pulvérisa le passant Pénon à coup de chevrotines... qui cela peut-il être, sinon le négateur Émile Cioran ? Pénon, on le devine, c'est Eliade. L'extralucide Fénéon avait tout pressenti.
 
(Jean-Guy Floutier, Philosopher tue)

Émile fait le pélican

 

Il est de notoriété publique que quand le pélican, lassé d'un long voyage, dans les brouillards du soir retourne à ses roseaux, ses petits affamés courent sur le rivage en le voyant au loin s'abattre sur les eaux. Eh bien pour le négateur Émile Cioran, c'était pareil : il courait sur le rivage. Peut-être pas tout le temps, mais en tout cas chaque fois qu'il était foudroyé par une réminiscence de vocabulaire. Ça se passait en général à l'étang de Soustons, sur le coup de deux heures de l'après-midi. Le négateur disait que courir sur le rivage l'aidait à se calmer. Que sinon, il se serait jeté à l'eau tellement il en avait soupé.
 
(Jean-Guy Floutier, Philosopher tue)

mercredi 18 juin 2025

Sus aux totos

 

Confronté à une attaque de « totos » ourdie par l'ambassadeur Abetz, Charles Maurras se frictionna vigoureusement la tête avec du vinaigre. Les parasites ne demandèrent pas leur reste.
 
(Jean-Guy Floutier, Philosopher tue)

Yasuhiro

 

Dans son poëme Le Pont Mirabeau, Apollinaire s'exclame : « Vienne la nuit, sonne l'heure ! » Si l'on comprend bien, le poëte considère que l'heure, à l'instar de tel premier ministre japonais, « n'a qu'à sonner ».
 
(Jean-Guy Floutier, Philosopher tue)

mardi 17 juin 2025

Rivalité Joxe-Athalie

 

À l'acte V de la tragédie de Racine, quand Athalie exprime son intention de faire déloger les réfugiés du temple, Joxe dit qu'il n'est pas d'accord et qu'il va en référer à Mitterrand. On sent qu'il aimerait bien que ça barde pour le matricule d'Athalie (il n'a jamais pu l'encadrer).
 
(Jean-Guy Floutier, Philosopher tue)

Souffrance vs. ennui

 

La souffrance, cela occupe à un point extraordinaire. Mais c'est le seul bon côté car à part ça, c'est désagréable au possible. À tout prendre, il vaut peut-être encore mieux s'ennuyer.
 
(Jean-Guy Floutier, Philosopher tue)

lundi 16 juin 2025

Drame hugolien

 

Dans Les Travailleurs de la mer, alors qu'il cherche à attraper un crabe, Gilliatt est attaqué par un diabolique céphalopode. Maintenant, remplacez Gilliatt par Émile Cioran et le diabolique céphalopode par Lucien Goldmann : vous avez tous les ingrédients d'un drame bourgeois à la Nivelle de La Chaussée.
 
(Jean-Guy Floutier, Philosopher tue)

Ludwig le rurbain

 

Après que les gens de la ville lui eurent pris son panier — métaphysique ! —, Ludwig Wittgenstein décida de s'installer dans un village du Tyrol pour y exercer le métier d'instituteur. Les gens de la ville lui avaient fait trop de mal. Il ne les supportait plus. Il se considérait quant à lui comme un « rurbain ».
 
(Jean-Guy Floutier, Philosopher tue)

dimanche 15 juin 2025

Bévue de Barrès

 

Un jour, son culte du Moi faillit coûter cher à Maurice Barrès. Occupé qu'il était à se contempler soi-même, il s'était assis par mégarde à une place réservée aux mutilés de cul. Heureusement, le contrôleur se montra bonne pâte et ça alla pour cette fois.
 
(Jean-Guy Floutier, Philosopher tue)

Hygiène douteuse du maire d'Amphion


La poétesse Anna de Noailles possédait une propriété à Amphion, en Haute-Savoie. L'endroit lui plaisait mais elle trouvait que le maire ne sentait pas la rose.
 
(Jean-Guy Floutier, Philosopher tue)

samedi 14 juin 2025

Guerre du bocage

 

Dans ses Souvenirs vendéens, Amédée de Béjarry dit que la femme du général de Scépeaux portait bien son nom car elle en avait un joliment rebondi (elle avait « un de Scépeaux, mon vieux »).
 
(Jean-Guy Floutier, Philosopher tue)

Aveux et anatropes, by Gilbert Garistre

 

“A rollicking good time! Gilbert Garistre is known for his razor-sharp wit, and Aveux et anatropes is no exception. Hilarious and thought-provoking, this book had me laughing out loud from beginning to end. An absolute delight, compulsively readable. I can't wait to see what Gilbert Garistre does next.”
 
(The Alaska Quarterly Review)