lundi 28 juillet 2025

Idée de cadeau

 

C'est l'Arioste qui ne sait pas quoi offrir au Tasse pour son anniversaire. Et alors il y a l'Arétin qui dit à l'Arioste : « T'as qu'à lui offrir un mug. » Mais l'Arioste n'est pas chaud car il pense que le Tasse en a déjà plein.
 
(Jean-Guy Floutier, Philosopher tue)

Soif d'infini

 

Un quidam frappé de finitude existentielle pense à l'infini infundibuliforme comme l'alcoolique pense à un « kil » de Tigron ou de Gévéor.
 
(Jean-Guy Floutier, Philosopher tue)

Gingerbread sadness

 

Sans se prendre pour le poëte Fernando Pessoa — « Ô roues, ô engrenages, r-r-r-r-r-r-r éternel ! Violent spasme retenu des mécanismes en furie ! » —, on sent que la tristesse est comme le pain d'épice, mais on est incapable d'expliquer pourquoi. La spongiosité ? L'arrière-goût de cannelle, de muscade et de clou de girofle ?
 
(Jean-Guy Floutier, Philosopher tue)

dimanche 27 juillet 2025

Un besoin gros comme le Ritz

 

L'écrivain suédois Stig Dagerman estime que le besoin de consolation de l'homme est grand comme deux terrains de football à peu près. 
 
(Jean-Guy Floutier, Philosopher tue)

Bordélisme chronique de la mort

 

Quand on lui demande où se trouve sa victoire, la mort est incapable de vous le dire. Et pareil pour son aiguillon. Elle perd tout, c'est incroyable.
 
(Jean-Guy Floutier, Philosopher tue)

Invention de la mort

 

Dans un de ses poëmes, le dandy irlandais William Butler Yeats dit que l'homme a inventé la mort — « man has created death » — et il vaut mieux entendre ça que d'être sourd.
 
(Jean-Guy Floutier, Philosopher tue)

À la librairie

 

« Vous avez quelque chose sur le dégoût d'exister ?
 — Oui, j'ai de l'Émile Cioran. Il n'est pas mal pour les commençants.
 — Très bien. Va pour de l'Émile Cioran. Mettez-m'en une grosse. »
 
(Jean-Guy Floutier, Philosopher tue)

samedi 26 juillet 2025

Tribulations de Boudin

 

Chez lui ou au restaurant, le peintre Eugène Boudin se voyait souvent servi avec de la compote de pomme ou du chou rouge braisé, ce qui ne laissait pas de l'irriter. « Je suis Eugène Boudin ! explosait-il. Le peintre des beautés météorologiques ! Pour l'amour de Dieu ! »
 
(Jean-Guy Floutier, Philosopher tue)

Épicurisme

 

Penser à offrir une carpe au président Diêm aujourd'hui même. Demain, il sera peut-être trop tard.
 
(Jean-Guy Floutier, Philosopher tue)

Toujours plus

 

Rien n'est jamais assez beau pour le monstre bipède. Il en veut toujours plus. Un proverbe géorgien dit qu'on donna des yeux à un aveugle, et que ce dernier se mit aussitôt à réclamer des sourcils. L'histoire est peut-être apocryphe, ce sidi.
 
(Jean-Guy Floutier, Philosopher tue)

Moments de la légende

 

Cioran achetant une cuillère en bois dans un grand magasin ; Cioran à la recherche de deux robinets « vieux modèle, hélas » sur le boulevard Richard-Lenoir ; Cioran se disputant avec un commerçant à propos d'une bouteille de butane ; Cioran se coinçant le pouce dans une portière de voiture : ce sont là des moments cruciaux de la légende, et chacun restera à jamais gravé dans les mémoires.
 
(Jean-Guy Floutier, Philosopher tue)

vendredi 25 juillet 2025

Monomanie

 

L'écrivain japonais Dazai Osamu. Quand il n'essayait pas de se suicider, il écrivait. Mais la plupart du temps, il essayait de se suicider.
 
(Jean-Guy Floutier, Philosopher tue)

Romsteak de l'absurde

 

Les auteurs du « théâtre de l'absurde », les Ionesco, les Beckett et autres Adamov ont fait fausse route. Leur absurde est trop fabriqué — trop... théâtral, justement. Le véritable absurde se trouve dans un carré de romsteak. Posé dans votre assiette, là, devant vous.
 
(Jean-Guy Floutier, Philosopher tue)

Bipolarité de Cantor

 

Il est aujourd'hui considéré comme très probable que le mathématicien Georg Cantor souffrait d'un trouble bipolaire. Lors de ses phases de dépression, il s'adonnait à la scarification et allait jusqu'à s'infliger des coupures de Dedekind !
 
(Jean-Guy Floutier, Philosopher tue)

Harmonie invisible

 

Héraclite tenait l'harmonie invisible pour plus importante que la visible. C'est pourquoi il s'efforçait toujours d'assortir la couleur de son slip à celle de son maillot de corps.
 
(Jean-Guy Floutier, Philosopher tue)

jeudi 24 juillet 2025

Un occultiste prudent


Lorsqu'il donnait une consultation privée, le mage Hanussen exigeait toujours d'être payé recta.
 
(Jean-Guy Floutier, Philosopher tue)

Un beau gâchis

 

« Le monde est indépendant de ma volonté », a dit Ludwig Wittgenstein. Et c'est aussi ce que la plupart des gens pensent — que le monde est indépendant de la volonté de Ludwig Wittgenstein. Mais si c'est lui, il en a fait de belles.
 
(Jean-Guy Floutier, Philosopher tue)

Que faire ?

 

Faut-il, comme le suggère Guégan (dans son livre Le Cuisinier français, Paris, 1934), couper en morceaux la langouste vivante et la faire revenir à rouge vif dans un poêlon de terre avec un quart de beurre très frais ? Ou vaudrait-il pas mieux... se pendre ?
 
(Jean-Guy Floutier, Philosopher tue)

 

Mourir à Bouvines

 

Il n'est pas trop tard pour mourir à Bouvines. On y meurt encore. Il suffit de s'y trouver au moment voulu.
 
(Jean-Guy Floutier, Philosopher tue)

mercredi 23 juillet 2025

Ceci est ma main

 

La certitude qu'un objet ou un phénomène existe était pour le philosophe Ludwig Wittgenstein ce que le lundi au soleil était pour le chanteur Claude François : une chose qu'on n'aura jamais.
 
(Jean-Guy Floutier, Philosopher tue)

Broc

 

Dans un de ses dialogues avec Osvaldo Ferrari, Jorge Luis Borges indique avoir fait la connaissance de Güiraldes par l'intermédiaire de Brandán Caraffa. Ce nom d'abord ne nous dit rien, mais en cherchant un peu, on découvre qu'il s'agit d'un poëte ultraïste dont le patronyme évoque un pichet ou même un broc.
 
(Jean-Guy Floutier, Philosopher tue)

Outrance mystique

 

La bienheureuse Marie Alacoque avait un tel désir de mortification qu'elle se plongeait parfois jusqu'à des trois minutes dans l'eau bouillante.
 
(Jean-Guy Floutier, Philosopher tue)

Épuisement existentiel

 

Dans la vie de tout homme, il arrive un moment où les raisons de continuer, c'est comme le boudin pour les Belges : il n'y en a plus.
 
(Jean-Guy Floutier, Philosopher tue)

mardi 22 juillet 2025

Celan au garage Rochard

 

Paul Celan : Décapé par la brise irradiante de ton langage, tout au fond de la crevasse des temps, près de la glace alvéolaire, attend, cristal de souffle, ton irrévocable témoignage.
Rochard père : Où tu dis qu'il attend, le petit fidgarce ? Près de la glace alvéolaire ?
Paul Celan : Oui. Je crois bien.
 
(Jean-Guy Floutier, Philosopher tue)

Vie de Kafka

 

À plusieurs endroits de la biographie qu'il a consacrée à son ami Kafka, on a l'impression que Max Brod — mais ce n'est peut-être qu'une impression.
 
(Jean-Guy Floutier, Philosopher tue)

Bizarrerie du Dasein

 

L'homme est possédé d'un tel besoin de nostalgie qu'il va jusqu'à se persuader d'avoir connu Macedonio Fernández.
 
(Jean-Guy Floutier, Philosopher tue)

Dilatation

 

Plus les jours passent, plus notre déplaisir d'exister se dilate (comme les gaz dans le ventre d'un noyé).
 
(Jean-Guy Floutier, Philosopher tue)

lundi 21 juillet 2025

Technique michaldienne

 

Féru de « connaissance par les gouffres », le poëte Henri Michaux avait pris l'habitude de plonger son Moi tout entier et tout nu dans une cuve pleine d'oignons et de jaborandis.
 
(Jean-Guy Floutier, Philosopher tue)

L'impermanence des choses

 

La plupart des gens vivent comme si les choses étaient permanentes mais elles ne le sont pas. Elles changent ; elles disparaissent. C'est ce qu'on appelle l'impermanence des choses. Quand monsieur tout-le-monde prend finalement conscience de cet état de fait, il est abasourdi. Il n'aurait jamais cru qu'on pût lui faire un coup pareil. Mais si !
 
(Jean-Guy Floutier, Philosopher tue)