lundi 14 janvier 2019

Interlude

Jeune femme lisant le Monocle du colonel Sponsz de Hermann von Trobben

Contamination


Ce n'est pas par ceux de ses aspects qui l'opposent à la réalité que la matière fécale est redoutable et insidieuse, mais tout au contraire par ceux qui l'en rapprochent — la taciturnité, la noirceur, la fétidité — et qui parviennent à la fin à faire planer sur elle, par contre-coup, un soupçon décisif d'irréalité.

(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)

Passalorynchites et tascodrugites


Les cyniques de l'Antiquité, hirsutes précurseurs des ascètes chrétiens, ont épuisé la pensée métaphysique, ontologique et autre jusqu'à la nausée. Il nous reste à épuiser le langage — à exténuer le dictionnaire.

(Luc Pulflop, Prière d'incinérer. Dégoût)

Canaques


28 novembre. — Les Canaques des Nouvelles-Hébrides sont des sauvages anthropophages de même origine que les Canaques de la Nouvelle-Calédonie et non moins redoutables qu'eux. Selon M. Leroy-Beaulieu, en plus d'être anthropophage, le Canaque est à la fois très belliqueux, voleur et assassin. Pour d'Entrecasteaux, il est cruel et sournois. Triste spécimen d'humanité que le Canaque ! Un point en faveur des Canaques de la Nouvelle-Calédonie, cependant, est qu'ils ont montré un réel esprit de progrès au point de vue agricole.

(Barzelus Foukizarian, Journal ontologique critique)

dimanche 13 janvier 2019

Interlude

La famille Kennedy lisant l'Apothéose du décervellement de Francis Muflier

Un fascinant bibelot


Que la contemplation d'un « cigare japonais » bien moulé engendre une fantasmagorie chatoyante, née du regret et du désir, créatrice de simulacres évanescents, personne ne le niera. Mais là n'est pas l'apport principal du « cas ». Il réside plutôt dans sa capacité de fascination. L'excrément manifeste en effet quelle souveraine aisance jaillit, quand sont abolis les contrôles qui permettent l'œuvre constructive et diurne de l'homme.

(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)

Borchtch phrastique


Transmuer les remugles du « conscient intérieur » en un minestrone adjectival, voilà le but vrai de la littérature.

(Luc Pulflop, Prière d'incinérer. Dégoût)

Fétichisme


25 novembre. — « Par fétiche, on entend toute sorte de choses animées ou inanimées, que les prêtres de ces religions font regarder aux sauvages comme des êtres enchantés ou doués de quelque force magique et divine. Ces superstitions, les plus absurdes de toutes, règnent parmi les nations abruties de la côte de Guinée, et chez beaucoup d'autres sauvages. Elles se sont mêlées à toutes les croyances religieuses. Le bœuf Apis et le chien Anubis étaient peut-être des fétiches des Égyptiens ; la pierre noire adorée à la Mecque avant Mahomet, le dieu Phallus des Romains, l'étaient indubitablement. » (Conrad Malte-Brun, Précis de la géographie universelle, vol. 2, Paris, Buisson, 1810)

(Barzelus Foukizarian, Journal ontologique critique)

Interlude

Jeune fille lisant Philosopher tue de Jean-Guy Floutier

Une illusion tenace


La « réalité empirique » use d'innombrables stratagèmes pour faire croire au vulgum pecus qu'elle existe. Quoique dessillé autant qu'il est possible, l'homme du nihil continue d'éprouver le prestige d'un tel mirage et doute qu'on puisse échapper toujours à sa muette éloquence. Souvent, il y a succombé par entraînement naturel. Mais comment faire autrement, quand on subit les affres d'un panaris, qu'on est tyrannisé par une mégère difforme au faciès d'hippopotame, ou qu'un infernal pigeon dépose sur votre redingote ou votre gabardine sa fiente putride ?

(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)

Pourquoi le suicide


L'incongruité d'être me semble un mobile suffisant.

(Luc Pulflop, Prière d'incinérer. Dégoût)

Terribilité de Mummol


25 novembre. — « Les Lombards à peine établis en Italie, ayant fait une descente dans le Dauphiné, qui étoit du partage du roi Gontran, y remportèrent d'abord une victoire, bientôt expiée (en 569), par trois grandes défaites, qui leur apprirent à respecter le nom françois et à trembler au seul nom du patrice Mummol. » (Encyclopédie méthodique – Histoire, tome troisième, Paris, Panckoucke, 1788)

(Barzelus Foukizarian, Journal ontologique critique)

samedi 12 janvier 2019

Interlude

Jeune femme lisant les Scènes de la vie de Heidegger de Jean-René Vif

Ténébreuses investigations


Dans son Journal d'un cénobite mondain, Gragerfis raconte qu'armé d'une lampe Mueseler 1, il a tenté, mais en vain, de percer l'obscurité qui enveloppe le « boyau culier », ce laboratoire secret où, dans le sommeil de la conscience, s'élaborent d'élémentaires et décisives fermentations. Cet échec ne l'a pas empêché de reconnaître au « Suisse » des vertus et des propriétés sur lesquelles étaient restés muets les plus enthousiastes de ses prophètes. Ainsi, il va jusqu'à affirmer qu'« il n'est rien de vigoureux ou de conquérant qui puisse prendre racine et prospérer sans son intercession ».

1. La lampe Mueseler, du nom de son inventeur, l'ingénieur belge Mathieu-Louis Mueseler, est une lampe de sûreté minière qui a, entre autres, l'avantage d'être mieux ventilée que la lampe Clanny.

(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)

De la supériorité du jeu de dames


La complexité de la vie la fait passer pour profonde aux yeux de beaucoup. En vérité, cet enchevêtrement de phénomènes n'est que futile. Préférons donc le jeu de dames dont la simplicité des règles garantit l'opérateur des chausse-trapes de l'inattention.

(Luc Pulflop, Prière d'incinérer. Dégoût)

Boissons fortes


24 novembre. — « Chez les Kalmouks, le lait fraisé s'appelle ussoun (en mongol su) ; le lait de vache aigri, airak ; la première eau-de-vie obtenue par la distillation du lait, arki ; la seconde, dang ; la troisième, arza (en mongol, ardjan) ; la quatrième khortsa ; la cinquième, chingtsa ; la sixième dingtsa. Tel est le goût des liqueurs fortes chez le "monstre bipède", qu'il soumet le lait jusqu'à six distillations successives ! » (Ferdinand Hoefer, Histoire de la chimie depuis les temps les plus reculés jusqu'à notre époque, tome deuxième, Paris, Hachette, 1843)

(Barzelus Foukizarian, Journal ontologique critique)

Interlude

Jeune fille lisant la Mathématique du néant de Włodzisław Szczur

Le langage abscons du pachynihil


L'idée du Rien jaillit d'une source mystérieuse, qui paraît plus profonde et plus intérieure, plus sûre et plus vraie, que les travaux incertains de la raison pure. Elle parle en nous un langage dénué de sens, à moins qu'on ne le tienne pour la révélation des secrets les plus obscurs de l'univers, ceux qui restent interdits à notre lucidité et qui dominent notre destin.

(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)

Géométrie dans l'espace


La géométrie dans l'espace se réduit pour moi à cette simple et sobre figure : le cylindre-ogive qui inscrira son inexorable existence dans le néant convoluté de ma cervelle.

(Luc Pulflop, Prière d'incinérer. Dégoût)

Énigmatiques Roxolans


23 novembre. — « Entre les Grecs, Strabon, Ptolémée et Dion-Cassius ; entre les Latins, Pline, Tacite, Spartien, Jules Capitolin, Trebellius Pollion, Vopisque, Ammien Marcellin, et Jornandès, ont parlé des Roxolans. Ce peuple n'est nommé par aucun autre ancien écrivain. Il est à remarquer surtout que Pomponius Mela, Solin, Étienne de Byzance n'en disent rien, quoique Solin donne une longue nomenclature des peuplades soit européennes, soit asiatiques, comprises sous les noms génériques ou de Scythes ou de Sarmates. On peut noter aussi que Virgile, Ovide, Martial, Claudien, qui nomment les Gélons, les Agathyrses, les Iazyges, les Alains, ne font aucune mention des Roxolans. » (Pierre-Louis Ginguené, Rapport sur les travaux de la classe d'histoire et de littérature ancienne, 1813)

(Barzelus Foukizarian, Journal ontologique critique)

vendredi 11 janvier 2019

Interlude

Jeune femme s'apprêtant à lire la Mélancolie bourboulienne de Léon Glapusz

Kafka et le « Suisse »


Les circonvolutions de l'excrément rappellent assez les étranges labyrinthes du Procès et du Château. Comme les récits de Kafka, le « cas » apparaît déroutant et inexplicable : c'est suffisant pour le destiner à faire fonction d'oracle. Par son obscurité même, il se prête aisément à l'exégèse et l'on croit deviner en lui l'allégorie incertaine, polyvalente, de secrets insaisissables et odoriférants.

(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)

Poëme fongique


Hygrophore perroquet, pleurote en huître... Que faire !

(Luc Pulflop, Prière d'incinérer. Dégoût)

Antiquité du poiré


22 novembre. — « L'histoire rapporte que Radegonde, reine de France, préférait le poiré à toute autre boisson. Ce qui prouve que le poiré était connu en France au sixième siècle. » (Ferdinand Mauduit, Semis, plantation et culture du poirier et du pommier dans les champs et les vergers, Paris, Auguste Gouin, 1870)

(Barzelus Foukizarian, Journal ontologique critique)

Interlude

Jeune fille lisant Forcipressure d'Étienne-Marcel Dussap

L'exquise fluidité du nihil


S'escrimant à tâtons dans un univers résistant, aux propriétés immuables et exclusives, l'homme pense avec nostalgie à un monde fluide, aérien, sans obstacle ni contradiction : celui du Rien.

(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)

Crainte et tremblement


L'acerbité de l'excrément pétrifie le vulgaire profane.

(Luc Pulflop, Prière d'incinérer. Dégoût)

Pêche à la morue


21 novembre. — L'article 15 des Dispositions spéciales à la pêche de la morue et à la pêche dite Hoekwant visschery, qui font partie des lois maritimes en vigueur en Belgique, dit que « le patron de tout bateau revenant de la pêche à la morue, après la déclaration faite par lui en douane de la quantité de chaque espèce de morue par lui importée, devra, au plus tard dans les vingt-quatre heures avant le débarquement du poisson, appeler les experts jurés qui vérifieront les espèces et les qualités de morue, et appliqueront, par le brûlement sur les tonnes, les marques distinctives, avec le millésime de l'année, les différentes espèces de pêche à déterminer par le réglement provincial à intervenir. »

(Barzelus Foukizarian, Journal ontologique critique)