Plutôt
que d'avoir deux bras, deux jambes, une tête et le reste, le poëte
hippie Richard Brautigan aurait voulu appartenir au système fastigié
radial que l'on reconnaît dans l'excipulum proprium des apothécies des
discolichens. Comme ce n'était pas possible, il se suicida.
Le
philosophe Sartre dit que l'enfer c'est les autres, mais il ne s'est
pas regardé. Car en vérité, ce ne sont pas ses autres, qui sont l'enfer,
ce sont les nôtres, et il en fait partie. Il aurait donc mieux fait de
se taire, avec sa greluche de « Beauvoir ».
Si
seulement le sinistre Delerm avait avalé de travers sa gorgée de bière
et s'était étouffé avec... Mais ç'aurait été trop beau. Ils ont la peau
dure, les salops dans son genre. Nous t'en foutrons des « plaisirs
minuscules », nous, tuouaouar. Nerf sciatique ! C'est ça, continue de
faire le malin, tuouaouar !
Comme
Pessoa, le « négateur universel » Émile Cioran était intranquille. Chaque
jour, une voix intérieure lui disait : « Polygnote de Thase, Arcésilas
de Paros, Lysippe, Pausias de Sicyone, tous peignirent sur émail ou sur
verre ; et toi, tout ce que tu fais, c'est gémir. Peins donc sur émail !
Ou si tu préfères, sur verre, ce sera peut-être plus facile ! »
Au
dire de Heidegger, la pêche du congre commence immédiatement après
celle du maquereau et dure jusqu'en novembre. Le philosophe ajoute que
ce poisson est abondant sur toute la côte de la Manche, et que comme il
n'est pas très recherché, le prix en est peu élevé sur les marchés de
Bretagne.
Une
lettre de Polycrate d'Éphèse à Victor de Rome mentionne « l'eunuque
Méliton, qui a vécu entièrement dans le Saint-Esprit ». Nous aimerions
savoir comment il a fait, car nous, quand nous essayons de vivre dans le
Saint-Esprit, impossible, nous sommes tout le temps dérangé.
Aussi
richement dotée soit-elle en « biberons Robert », une femme ne saurait
rivaliser avec l'œuvre de Pouchkine, qui elle-même ne remplacera jamais
une bonne paire de bottes pour travailler dans le jardin.
Qui
a donné au monstre bipède l'idée qu'il était « créatif » ? Depuis qu'on
lui a mis ça dans la tête, il nous inonde de ses « créations ». C'était
déjà pénible de voir sa tronche quand il ne « créait » pas, mais là, c'est
une vraie calamité. Le moindre pot de pisse « crée ». Aux chiottes, la « créativité » ! Est-ce que nous « créons », nous ?
Aussi
incroyable que cela paraisse, Aristoxène est le seul parmi les Anciens à
avoir dit que Pythagore mangeait souvent des fèves. C'est donc de deux
choses l'une : soit il ment, soit les autres Anciens étaient benêts au
point de ne pas reconnaître des fèves quand ils en voyaient. Dans les
deux cas, c'est affligeant.
Il
y a de ces sinistres individus qui prétendent que l'Histoire Auguste
n'est pas l'œuvre de Spartien, Jules Capitolin, Vulcace, Lampride,
Trebellius Pollion et Vopisque. Ils vont jusqu'à soutenir que ces
auteurs n'ont jamais existé. Leur « théorie » est que l'Histoire Auguste a
été écrite par... un Nicomaque Flavien ! Ô vilenie ! Ô déchéance
incommensurable du monstre bipède !
Si
on demandait à un quidam pris au hasard de parler de l'immortalité de
l'âme, il y a fort à parier qu'il en disserterait d'une manière aussi
embrouillée que Théophile, évêque d'Antioche. L'âme... Comment un quidam
saurait-il ce que c'est ? Les quidams, dès qu'il s'agit de
métaphysique, il n'y a rien à en tirer. Les évêques non plus.
Il
existe, d'après Pinel, quatre espèces particulières d'égarement,
indiquées d'une manière générique par le terme d'aliénation mentale ou
folie. Savoir : la manie, la mélancolie, la démence et l'idiotie. Trois
sur quatre, ce n'est pas si mal... Mais la démence... non, il ne faut
pas pousser.
Dioscoride
ne chie pas la honte. Il prétend que le pruneau — la « prune de Damas
desséchée » — constipe, alors qu'il est notoirement laxatif. La
gênance, le gusse ! De se tromper comme ça !
Les
Anciens pensaient que le dix-septième jour de la lune était très
heureux pour planter la vigne et pour dompter les bœufs. Peut-être pas
tous les Anciens, mais quelques Anciens.
Vitruve
affirme que le bélier fut imaginé par les Carthaginois au siège de
Gades. Il fut, par la suite, perfectionné par Cétras de Chalcédoine ;
enfin, au siège de Byzance, par Polyde le Thessalien, qui servait sous
les ordres de Philippe, roi de Macédoine et père d'Alexandre. Chez les
Grecs, les péripatéticiens se servaient couramment d'un bélier à
rouleaux pour ébranler les concepts de leurs adversaires.
Le
plus rusé des mollusques, selon Aristote, est la seiche. Pourquoi ?
Parce qu'en jetant son encre, elle se rend invisible et en profite pour
saisir de gros poissons (et même des muges). Elle est mille fois plus
ficelle que le polype et le calmar, qui ne crachent leur encre que quand
ils ont peur. Savoir de telles choses embellit la vie. On se
féliciterait presque d'exister.
L'historien
latin Végèce dit que le flux et le reflux sont une sorte
de respiration de la mer. Ce n'est pas mal trouvé, mais a-t-il seulement
existé, cet historien Végèce ? Ne venons-nous pas de l'inventer, lui et
tout le saint-frusquin ?
Antisthène
le cynique proclamait qu'il préférait perdre la raison plutôt que de
ressentir un plaisir. « Le plaisir, c'est pour les caves », ajoutait-il.
Et il faut avouer que les « hédonistes » sont particulièrement énervants,
avec leurs gros genoux.
Gorgias
prétend qu'Eschyle faisait ses tragédies tout à fait ivre. Pour
certaines pièces particulièrement difficiles, il aurait même descendu
plusieurs « cubis ». Il avait, selon Gorgias, « le vin tragique ».
À
une personne « nihilique », la vie paraît une steppe inhospitalière
parsemée de rocs retors et de piquants. S'il y avait, en plus, des
chameaux de Bactriane et des yaks, cela ressemblerait tout à fait au
désert de Gobi, cet espace désespérant dont Shelley déjà disait
l'oppressante mélancolie.
Parlant
de l'infini de l'espace et du temps, Leopardi confesse que dans tant
d'immensité sa pensée sombre, et que s'abîmer lui est doux en cette mer.
Comme de toute façon il n'avait pas de « bombard », il était bien obligé
de faire contre mauvaise fortune bon cœur.
Les
Égyptiens, qui voyaient le bien et le mal régner également dans le
monde, et qui ne pouvaient concevoir qu'un être essentiellement bon eût
pu permettre le mal, encore moins en être l'auteur, furent les premiers
qui inventèrent deux principes, l'un bon, et l'autre mauvais. Ils
désignèrent le bon principe sous le nom d'Osiris, et le mauvais sous le
nom de Jean-René.
Quand
des témoins de Jéhovah ou des vendeurs d'aspirateurs venaient frapper
chez lui, Spinoza, pour s'en débarrasser, leur disait que l'intelligence
et la volonté de Dieu ressemblent aussi peu à l'intelligence et à la
volonté de l'homme que la constellation du Chien au chien, animal
aboyant. En général, ça marchait. Les fâcheux déguerpissaient en
marmonnant : « Il est trop con, ce mec-là. »
Capitolin
raconte que l'empereur Maximin buvait souvent dans une journée une
amphore de vin tenant à peu près vingt-huit pintes. Il ajoute
qu'ensuite, Maximin était « saoul comme un cochon » et faisait « un barouf à
tout casser ». Et ce n'est pas tout, il trouvait encore de la place pour
quarante livres de viande, au besoin pour soixante. Par contre, il
dédaignait les légumes.