« Quand j'entends le mot vivre, je sors mon revolver ou du poison. » (Luc Pulflop)
lundi 4 juin 2018
Quiproquo embarrassant
À l'automne 1928, Heidegger prend la suite, à l'Université de Fribourg, de son maître Husserl parti à la retraite. Il revient à Fribourg en triomphateur et règle ses comptes avec ses ennemis qui, en 1916, l'avaient empêché d'obtenir le poste qu'il convoitait (il les accuse publiquement d'être les représentants du On, ce magma gluant « qui décharge le Dasein de sa quotidienneté », et « se porte au-devant de la tendance au moindre effort que le Dasein a foncièrement en lui »).
Il commence à entretenir une liaison épistolaire avec l'existentialiste chrétien Gabriel Marcel, avec lequel il flirte, pensant qu'il s'agit d'une femme. Après des demandes insistantes, il reçoit une photographie du philosophe français dont la moustache à la gauloise le dessille et le refroidit aussitôt.
Une fois de plus, il a été victime de ce qu'il nomme dans Sein und Zeit la « résolution devançante » qui se caractérise comme le fait de « se projeter en silence et en s'exposant à l'angoisse sur l'être-en-faute le plus propre » !
(Jean-René Vif, Scènes de la vie de Heidegger)
Grands Anciens
« Platon, Lucrèce, Pline, nous disent que le plus bel apanage de l'homme est de pouvoir se suicider. Cicéron lui-même penche au suicide. La mélancolie est un fait acquis à Rome et à Athènes, surtout au moment de la décadence de ces peuples. Diogène, Caton, Pérégrin, Sénèque, Lucrèce, Antinoüs et tant d'autres, après avoir prêché leur doctrine, scellèrent leur fanatisme par le suicide. » (Paul Ferdinand Gachet, Étude sur la mélancolie, Paris, 1864)
Leur fanatisme ? Oh ! Oh ! Comme tu y vas, mon ami !
(Raymond Doppelchor, Océanographie du Rien)
Une vaine odyssée
Chaque jour, écrasé par l'ennui « comme une mouche sur laquelle se serait assis un éléphant », on répète les mêmes gestes et l'on prononce les mêmes paroles en se disant qu'il va tout de même bien finir par se passer quelque chose. Mais les mois et les années s'écoulent et rien ne se passe. Ou plutôt si : il se passe qu'un beau jour on est comme qui dirait « décédé ». Quoi ! Tout ça pour en arriver là ?! C'est tout de même un peu « fort de café » !
(Léon Glapusz, Mélancolie bourboulienne)
L'apprentie (Larry Brown)
C'est quand même pas ça, la vie. Je bois trop d'Old Milwaukee, et quand je me réveille le matin j'ai comme un goût de vieux croûtons dans la bouche. Tous mes sous-vêtements sont sales et je n'arrive plus à mettre la main sur ma police d'assurance.
Moi qui croyais que nous avions une vie de couple marié tout ce qu'il y a de normal et de bien ! Ma femme me salissait ma voiture et me changeait mes chaînes de télé, tandis que je lui rapportais des petits gâteaux à la noix de pécan, des Butter Pecan Crunch de chez Kroger. Je lui disais de laisser la vaisselle jusqu'au lendemain et des trucs comme ça. Je n'ai même pas râlé quand son chien a pissé dans mon fauteuil. Pour le meilleur et pour le pire, voilà. J'ai aussi joué les infirmières pour elle, une fois, quand elle était malade.
Judy voulait être philosophe. Et j'écris et j'écris et j'écris. C'était la seule chose qui l'intéressait. Elle était toujours en train de « créer des concepts », comme elle disait. Et elle voulait toujours savoir ce que j'en pensais. Je lui disais que c'était plutôt bien quand ça l'était. Sauf que la plupart du temps ça l'était pas. J'essayais d'être franc. Un jour, elle a créé le concept du mec dont la femme n'arrête pas de rouler trop vite et de récolter des contraventions. Bon, j'ai dit à Judy que je ne trouvais pas ça terrible comparé à du Merleau-Ponty, et elle s'est mise en pétard. C'était ça, le problème. Si je lui disais que je n'aimais pas un de ses concepts, elle faisait la gueule pendant trois ou quatre jours.
Je lui ai conseillé de se mettre à l'existentialisme chrétien, il me semblait qu'il y avait un bon créneau à prendre depuis la mort de Karl Jaspers.
(Étienne-Marcel Dussap, Forcipressure)
Esthétique de la défenestration
De nombreux penseurs se sont interrogés sur le rôle de l'art et beaucoup ont élaboré des théories aussi astucieuses qu'improbables. Encore une fois, c'est l'habile Gragerfis qui semble avoir découvert le « fin mot de l'histoire ».
À travers le destin tragique de l'« artiste » Unica Zürn — qui se suicida le 19 octobre 1970 en se jetant par la fenêtre de l'appartement de son amant, le « plasticien » Hans Bellmer, alors qu'elle bénéficiait d'une permission de sortie de cinq jours de la clinique où elle était internée —, l'art apparaît, selon Gragerfis (Journal d'un cénobite mondain), comme « un élément médiateur face à une souffrance presque indicible ».
Le cas d'Unica Zürn lui inspire en outre l'interrogation suivante : « Le rêve inavoué de tout défenestré n'est-il pas de retrouver, par le vol plané, la simplicité de l'enfance et ses possibilités de connaissance intuitive et spontanée ? »
(Johannes Zimmerschmühl, Pensées rancies et cramoisies)
Mongols vrais
En dépit de certains traits qui semblent les différencier, l'homme du nihil tient tous ses contemporains pour des Mongols vrais, aussi vrais que ceux qui erraient aux alentours du lac Baïkal et à l'est des Monts Altaï bien avant que Témoudjine ne les eût entrainés à la conquête de plus de la moitié de l'Europe et de l'Asie entière.
(Robert Férillet, Nostalgie de l'infundibuliforme)
Naufragés de la nuit
Un Déolois d'une quarantaine d'années s'est jeté hier soir, vers 21 h 30, sous l'intercité Toulouse-Paris, juste après l'ancienne gare de Montierchaume. Le train qui transportait 350 voyageurs s'est immobilisé quelques centaines de mètres plus loin et est resté sur place jusqu'à 2 heures.
Des bouteilles d'eau ont été distribuées à ces naufragés de la nuit « et tous ont fait preuve de compréhension envers le désespéré, bien convaincus de la terrible puissance de l'idée du Rien » indique le maire de Montierchaume, qui s'est rendu sur les lieux du drame. (La Nouvelle République, 3 janvier 2018)
(Martial Pollosson, L'Appel du nihil)
Le Relais d'Alsace (Georges Simenon)
Gredel et Lena, les deux servantes si pareilles avec leurs cheveux ébouriffés et leur visage de poupée, dressaient les couverts sur six tables, les plus proches du comptoir, posaient sur la nappe à petits carreaux rouges les verres de couleur, à long pied, destinés au vin d'Alsace.
Accoudée à la caisse, Mme Keller chuchotait et son mari l'écoutait, debout, en se balançant un peu sur sa béquille. Ils employaient entre eux le patois alsacien.
— Crois-tu vraiment, comme Henri Bergson, que le néant n'est qu'un pseudo-concept sans essence ou — mieux dit — une simple contre-possibilité de l'être affirmé ? disait Mme Keller, qui tenait par habitude un crayon à la main.
Derrière elle, un judas permettait de passer les plats de la cuisine à la salle. Le chef y montra sa tête.
— Vous n'avez pas d'allumettes ?
Elle en chercha dans le tiroir plein de pièces de monnaie. Son mari, pesant sur la béquille, fouilla ses poches, tendit une boîte.
— Alors ? insista-t-elle.
— Ma foi, je n'en sais trop rien, répondit M. Keller. Mais j'incline à le penser, oui. Il y a quand même pas mal d'indices concordants.
— Lesquels, par exemple ?
— Oh, je ne sais pas, moi... La choucroute ? Ou peut-être le kouglof ? Tu ne vas quand même pas me dire que c'est du néant ?
Dégoûtée, Mme Keller lui tourna le dos et s'éloigna, gagna le fond de la salle, s'assit près du phonographe qu'elle commença à remonter.
(Maurice Cucq, Georges Sim et le Dasein)
dimanche 3 juin 2018
Corned-beef
L'homme du nihil ne peut pas voir un troupeau de vaches sans que cela déclenche en lui comme une méditation du temps et de la mort. Par les couloirs méandreux de son inconscient, une liaison s'établit entre ce troupeau et le Bœuf écorché de Rembrandt. Puis, par un étrange phénomène d'identification bovine, il emprunte en imagination la chaîne quasi ferroviaire des abattoirs de Chicago et se voit transformé subito presto en corned-beef.
(Raymond Doppelchor, Océanographie du Rien)
Théorème de Descartes
Le théorème de Descartes pour les équations algébriques s'énonce ainsi : dans une équation quelconque, à coefficients réels, le nombre des racines positives ne surpasse pas le nombre des variations de signe du premier membre ; et, quand il est moindre, la différence est toujours un nombre pair.
On voit que l'auteur du Discours de la méthode évite soigneusement tout problème ontologique. Cela avait le don d'irriter au plus haut point Heidegger, pour qui la philosophie était une question sur le sens même de l'être. Descartes, avec ses « équations », ses « coefficients » et ses « racines », ne se demande pas même ce qu'il est lui-même. Il déclare arbitrairement que l'existence du Dasein se conçoit comme substance, mais sans approfondir le moins du monde ce qu'il entend par ce terme. On comprend pourquoi ses amis le surnommaient « le vilain singe » !
(Włodzisław Szczur, Mathématique du néant)
Déception
L'horreur qui devrait étreindre le Dasein à la pensée d'un cataclysme cosmique anéantissant le monde et avec lui l'humanité, cette horreur ne parvient aucunement à éclore chez l'homme du nihil.
Au contraire, c'est quand ce cataclysme attendu ne survient pas qu'il se sent trompé, comme s'il avait découvert que sa maîtresse entretenait une liaison avec un garagiste de La Bourboule !
(Léon Glapusz, Mélancolie bourboulienne)
Absorption
S'il faut en croire l'anthropologue Malinowski, certaines religions exotiques promettent au juste qu'après la mort, il s'anéantira, qu'il sera absorbé dans le Grand Tout.
Mais on ne voit pas trop ce qu'il y gagne, puisque le méchant, faisant aussi partie du Grand Tout, selon la doctrine du panthéisme, doit également y être absorbé, et son survêtement avec lui.
(Johannes Zimmerschmühl, Pensées rancies et cramoisies)
Projet avorté
En 1928, la compagnie UFA fait un pont d'or à Heidegger pour qu'il autorise une adaptation cinématographique de son grand succès Sein und Zeit. La réalisation serait confiée à Fritz Lang, le rôle du Dasein serait tenu par Emil Jannings, celui de l'être-vers-la-mort par Bela Lugosi et celui de l'être-en-faute par Peter Lorre. Quant à l'être-jeté, ce pourrait être Boris Karloff, qui n'a pas encore connu la célébrité dans le rôle de la créature de Frankenstein — le film ne sortira qu'en 1931 — mais dont le potentiel horrifique est déjà évident, et qui, plus que tout autre, paraît capable de faire sentir au spectateur que « tout possible existentiel est aussi manque et renoncement ».
Heidegger refuse car il veut absolument que le Dasein soit joué par Humphrey Bogart, mais celui-ci est déjà sous contrat avec la Fox. Le projet tombe à l'eau et ne sera pas repêché.
(Jean-René Vif, Scènes de la vie de Heidegger)
samedi 2 juin 2018
Deux comiques troupiers
André Breton : l'anthologie de l'humour noir.
Martin Heidegger : l'humour noir de l'ontologie.
(Luc Pulflop, Prière d'incinérer. Dégoût)
Une fois
« Ce ne sera pourtant pas un flandricisme que de dire à quelqu'un : buvez une fois, si l'on veut faire entendre qu'il ne doit boire qu'une seule fois, et non pas deux. » (Antoine Fidèle Poyart, Flandricismes, wallonismes et expressions impropres dans le langage français, Tarte, Bruxelles, 1806)
Peut-être pas un flandricisme, mais s'il s'agit de taupicide, la précision apparaît nettement superfétatoire. Car en général, avec ce médiateur chimique du Rien, une seule fois suffit.
(Marcel Banquine, Exercice de lypémanie)
Sollicitude céleste
Une place très spéciale est constamment donnée par la Vierge aux suicidés philosophiques dans les messages qu'elle transmet à Rosa Quattrini, de 1964 à 1981, lors des multiples apparitions qu'elle fait dans un petit village du nord de l'Italie, San Damiano : « Je veux que tous soient sauvés, spécialement les suicidés philosophiques, sur lesquels je pleure tant, car ils sont dans la boue. Ils n'écoutent pas ma parole ! » (16 oct. 66) — « Mon cœur est dans l'amertume, particulièrement à cause des suicidés philosophiques. » (19 fév. 66) — « Les suicidés philosophiques qui souffrent et gémissent ! » (18 nov. 66) — « Priez pour les suicidés philosophiques qui courent à leur perte de jour en jour, et qui n'écoutent plus votre Maman Céleste et me font tant pleurer ! » (5 mai 67)
Ces exhortations restèrent tragiquement sans effet. Ainsi, le dessinateur humoristique Yvan Le Louarn, dit Chaval, se suicide au gaz chez lui le 22 janvier 1968 à Paris, après avoir calfeutré sa porte et y avoir affiché cet avis : « Attention, danger d'explosion ».
(Raymond Doppelchor, Océanographie du Rien)
Peint tout entier et tout nu
Dans la littérature, on trouve peu de descriptions aussi véridiques et saisissantes du réel que celle que fait le capitaine Haddock dans Le Temple du Soleil : « Pays de sauvages, mille sabords !... Des montagnes, toujours des montagnes, et des tas de sales animaux !... » — Même Schopenhauer n'eût pas mieux dit.
(Hermann von Trobben, Le Monocle du colonel Sponsz)
L'obsession de durer
Selon le philosophe Albert Camus, l'homme doit avoir pour unique préoccupation de durer. Et il conseille de prendre exemple sur la carpe, dont la vie séculaire, attestée par Buffon, est effectivement un fait physiologique très remarquable.
Cette argumentation fut toutefois jugée peu convaincante par l'écrivain et poëte vaudois Jean-Pierre Schlunegger dont la poésie, marquée par l'influence de Hölderlin, se caractérise par une oscillation perpétuelle entre la joie et la douleur, entre le bonheur et le malheur. Ce mouvement de balancier s'avérant à la longue trop dur à supporter, le barde, alors âgé de trente-neuf ans, procéda à son propre anéantissement le 23 janvier 1964 à Saint-Légier (canton de Vaud).
(Robert Férillet, Nostalgie de l'infundibuliforme)
Un étrange résineux
Emblème du Chili, l'araucaria araucana est surnommé « désespoir des singes » en raison de ses feuilles pointues, disposées en écailles et terriblement piquantes. Par analogie, le spirituel Gragerfis, dans son Journal d'un cénobite mondain, propose d'appeler la vie « désespoir du nihilique », en constatant que l'hypersensibilité du malheureux qu'habite l'idée du Rien l'empêchera toujours d'escalader l'épineux cocotier de l'existence.
(Johannes Zimmerschmühl, Pensées rancies et cramoisies)
vendredi 1 juin 2018
Ensemble maigre
La somme des résultats obtenus par la philosophie dogmatique depuis l'époque de Platon constitue un ensemble maigre au sens de la topologie, c'est à dire qu'elle correspond à une partie d'un espace de Baire qui, en un sens technique qu'il serait fastidieux de préciser ici, peut être considérée comme de taille infime, et n'aidant en rien le Dasein à supporter le pondéreux fardeau de l'existence.
(Włodzisław Szczur, Mathématique du néant)
Une effrayante misanthropie
Chaque jour, sans qu'il puisse rien faire pour y échapper, l'homme du nihil renouvelle l'expérience de Tolstoï et éprouve le dégoût d'autrui, un dégoût profond, fantastique, incommensurable pour autrui. « Je vois toutes ses souillures, je les devine avec la perspicacité que donne la méchanceté, je vois toutes ses faiblesses et je n'arrive pas à surmonter l'antipathie que j'ai pour lui, lui qui est mon frère 1, qui porte en soi le principe divin autant que moi 2. » (Le journal du starets Fiodor Kouzmitch).
1. Hum...
2. Voir note 1.
(Raymond Doppelchor, Océanographie du Rien)
Tathâta
Dans le bouddhisme, le terme tathâta — thaumaturgie du mot ! — désigne l'ainséité, autrement dit le caractère de ce qui est « ainsi », « tel que c'est », « en réalité ».
Profonde dégoûtation de tout cela.
(Luc Pulflop, Prière d'incinérer. Dégoût)
jeudi 31 mai 2018
Puissance du zéro
René Guénon, dans son article Les dualités cosmiques, notait qu'« il est étrange que les mathématiciens aient l'habitude d'envisager le zéro comme un pur néant, et que cependant il leur soit impossible de ne pas le regarder comme doué d'une puissance indéfinie, puisque, placé à la droite d'un autre chiffre dit significatif, il contribue à former la représentation d'un nombre qui, par la répétition de ce même zéro, peut croître indéfiniment ».
Et il poursuivait son apologie du zéro en disant que « si on le regarde comme représentant le Non-Être, envisagé comme possibilité d'être, donc comme contenant l'Être en puissance, on peut alors dire que le Non-Être est supérieur à l'Être, ou, ce qui revient au même, que le non-manifesté est supérieur au manifesté, puisqu'il en est le principe ».
Ce à quoi Gragerfis aurait rétorqué : « Oh ! Oh ! Comme tu y vas, mon ami ! Il y a zéro et zéro ! Et tous ne sont pas "doués d'une puissance indéfinie". Regarde Michel Onfray : tu parles comme il est "supérieur au manifesté" ! »
(Léon Glapusz, Mélancolie bourboulienne)
Esprits irrités
Dans ses Nouvelles expériences sur la vipère, Moyse Charas (1619-1698) étudie notamment les effets du « suc jaune contenu dans les vésicules des grosses dents » de ce reptile. Après avoir fait mordre des chiens, des pigeons et des poulets par une vipère, Charas conclut que la mort ne se produit que lorsque le serpent était irrité :
« La morsure faite par une Vipère, non irritée, dont on tenoit les mâchoires, et de qui on faisoit enfoncer les dents en les pressant sur le corps d'un Pigeon, qui se trouvoit aussi fort accompagnée du suc jaune, et qui néanmoins ne fut suivie d'aucun mauvais accident, de mesme que la piqueure faite par les mesmes dents arrachées d'une teste vivante, ou par celles qui sont encore plantées dans la teste d'une Vipère morte, et qui ne font aucun mal, confirment trop cette vérité, pour n'imputer pas la cause du venin aux esprits irritez, et pour n'en pas exempter généralement toutes les parties du corps de la Vipère, et mesme les grandes dents, lorsqu'elles ne sont pas suivies des esprits irritez. »
(Barzelus Foukizarian, Journal ontologique critique)
Totalisation impossible de l'infini
En février 1964, Gabriel Marcel accompagne Emmanuel Levinas dans un voyage en ballon au-dessus de la Belgique. L'imagination la plus habile doit renoncer à se figurer ces deux philosophes, l'un existentialiste chrétien, l'autre métaphysicien d'autrui, perdus au milieu d'un épais brouillard, rendu d'autant plus triste par le silence de mort qui l'accompagne. Le froid est si considérable que, pénétrés par l'humidité, leurs vêtements sont gelés ; les cheveux et la barbe sont blanchis par le givre qui tombe en abondance et dont il faut constamment débarrasser la nacelle.
(Marcel Banquine, Exercices de lypémanie)
Utilité pratique
Contrairement à l'homme du nihil qui n'attend de son exploration du Rien aucune retombée concrète, le grand géomètre Bossut a constamment pris soin de diriger ses recherches vers des objets d'utilité pratique. Ainsi, dans sa Mécanique, on trouve un Traité sur la poussée des voûtes, où ce sujet important et difficile est développé avec autant de profondeur que de clarté.
(Raymond Doppelchor, Océanographie du Rien)
Rétro défectueux
À Marbourg, Heidegger se remet au billard, mais il y joue désormais au club de l'université. Il travaille surtout son rétro, qu'il juge un peu faible.
Un soir, alors qu'il dispute une partie avec Hannah Arendt dans le club déserté, l'ambitieuse étudiante demande à son professeur de la « prendre comme un pécari ». Il s'exécute — avec un peu de mal car ses connaissances en zoologie sont modestes.
C'est le début d'une histoire d'amour tumultueuse, qui mettra le Dasein du philosophe à rude épreuve.
(Jean-René Vif, Scènes de la vie de Heidegger)
Le compostage partagé prend racine
« Saumur Habitat et Saumur Agglopropreté ont inauguré, ce jeudi 22 février, deux composteurs partagés dans le quartier des Violettes. Ils sont installés rue Louvet. Un troisième sera prochainement implanté dans un jardin près du 71, rue des Violettes.
Le principe s'appuie sur l'apport volontaire — qu'il ne faut pas confondre avec la mort volontaire — des habitants qui peuvent y déposer des épluchures de légumes, de fruits ou le marc de café. Ensuite, le produit du compostage sera redistribué aux habitants "qui pourront en faire, ma foi, ce qu'ils voudront, et même se le mettre dans le c..." indique Jean-Guy Pouliquen de Saumur Agglopropreté.
L'objectif est de "diminuer les quantités de déchets mis à la collecte en valorisant la partie organique des ordures ménagères, ainsi que de créer du lien social et de la convivialité dans le quartier", explique le responsable du projet qui ajoute : "Y a-t-il rien de plus convivial que de déposer ses épluchures de légumes dans le même composteur, en une sorte de communion dans le dépôt de déchet ? Cela ne donne-t-il pas au Dasein l'impression de participer à une grande œuvre collective ?"
Nous lui répondons que cela est indéniable, prenons notre chapeau et sortons. » (Le Courrier de l'Ouest, 22 février 2018)
(Francis Muflier, L'Apothéose du décervellement)
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