mercredi 23 avril 2025

Tempus fugit

 

Pour empêcher le temps de fuir à toute vitesse, un truc qui marche bien est de lui dérober sa tête de delco.
 
(Gilbert Garistre, Aveux et anatropes)

Un forcené du graffito


Le poëte communiste Éluard écrivait le mot liberté presque partout : sur ses cahiers d'écolier, sur son pupitre, sur les arbres, sur le sable, sur la neige, il l'aurait même écrit sur son fiacre s'il avait pu. Et le plus fort est qu'il ne s'est jamais fait choper, le salop !
 
(Gilbert Garistre, Aveux et anatropes)

Dire l'indicible

 

Ce qu'on ne peut dire, il faut soit le taire, soit l'exprimer par des grognements.
 
(Gilbert Garistre, Aveux et anatropes)

Une formidable idée de tableau


Le Primatice un jour dit au Rosso, non pas qu'il avait bien sujet d'accuser la nature, mais qu'il devrait faire le portrait d'un jeune homme tenant une lettre. Le Rosso trouva l'idée « aux pommes » et se mit aussitôt à l'ouvrage.
 
(Gilbert Garistre, Aveux et anatropes)

mardi 22 avril 2025

Terrain glissant

 

Quelqu'un qui prétend connaître quelque chose est soit un imbécile, soit un imposteur. Pourtant, il nous semble connaître ce fait que le Riccio était le gendre du Sodoma. Devrions-nous nous en inquiéter ? Allons-nous devoir être très courageux ?
 
(Gilbert Garistre, Aveux et anatropes)

Une amitié prédestinée


Plusieurs siècles les séparent, mais nul doute que si Germain Pilon et Georges Poulet avaient pu se rencontrer, ils seraient devenus « comme cul et chemise ».
 
(Gilbert Garistre, Aveux et anatropes)

Refus catégorique du Parmesan

 

Comme son maître le Corrège, le Parmesan était d'un naturel bonhomme, mais sa complaisance avait des limites : il refusait absolument d'être mélangé à des soupes ou à des risottos. Il disait que cela, à coup sûr, anéantirait ses efforts pour rompre avec les codes classiques de l'harmonie.
 
(Gilbert Garistre, Aveux et anatropes)

Croquemi

 

Michelet disait de Taine que ses ouvrages faisaient peur aux enfants ; qu'il était « un véritable croquemi ».
 
(Gilbert Garistre, Aveux et anatropes)

lundi 21 avril 2025

Biffement de Magritte

 

Matisse correspondait avec Bonnard, mais pas avec Magritte. Il avait biffé ce dernier de son répertoire pour cause de « surréalisme bébête ».
 
(Gilbert Garistre, Aveux et anatropes)

Recherche infructueuse des fermés fréquents

 

« Dis, qu'as-tu fait, toi que voilà, de ta jeunesse ?
— Pas grand chose. J'ai cherché les fermés fréquents.
— Et tu les as trouvés ?
— J'ai fouillé partout, mais tu me croiras si tu veux, zéro. »
 
(Gilbert Garistre, Aveux et anatropes)

In illo tempore

 

Déchirante, cette confession du mathématicien belge La Vallée Poussin : « Nous avions vingt ans. Le plus bel âge de la vie pour pratiquer la géométrie riemannienne. Armés de diverses généralisations de l'opérateur laplacien, nous dérivions des tenseurs et des sections de fibrés vectoriels. T'en souviens-tu, ma mie ? »
 
(Gilbert Garistre, Aveux et anatropes)

Bonheur suprême

 

Quand on lui demandait ce qu'est le bonheur suprême ici-bas, Li Po répondait que c'est d'écouter la chanson d'une petite fille qui s'éloigne après vous avoir demandé son chemin. Le négateur Émile Cioran n'était pas du tout d'accord. Pour lui, le bonheur suprême consistait à gémir et à dire du mal de tout. Avouons-le, nous ne sommes pas loin de partager son avis !
 
(Gilbert Garistre, Aveux et anatropes)

dimanche 20 avril 2025

Non-raccordement de Loti

 

Reynaldo Hahn aimait chaque parcelle de Pierre Loti, trouvait qu'il était dans l'ensemble bien orienté, son seul regret était qu'il ne fût pas raccordé au tout-à-l'égout.
 
(Gilbert Garistre, Aveux et anatropes)

Maul

 

La poétesse Anna de Noailles pratiquait le rugby au PUC (Paris Université Club). Quand elle portait le ballon et qu'elle était saisie par un adversaire, Maurice Barrès et Pierre Loti se liaient à elle, et à eux trois, ils « formaient le maul ».
 
(Gilbert Garistre, Aveux et anatropes)

Bagage poétique de Marcel B.

 

Étrange ! Tous les poèmes ou presque que Marcel B. a lus sont de Marcel Béalu !
 
(Gilbert Garistre, Aveux et anatropes)

Habituation impossible

 

La définition que propose Dostoïevski de l'homme (un être qui s'habitue à tout) ne vaut pas pour le poëte Francis Giauque. Malgré cures de sommeil, électrochocs et consommation de « beuh », ce dernier ne put jamais se faire à l'opprobre d'exister. Pour mettre un terme à cette avanie, il s'immergea dans le lac de Neuchâtel.
 
(Gilbert Garistre, Aveux et anatropes)

samedi 19 avril 2025

Indigence philosophique de la « reine de la Néva »

 

Dans son Poëme sans héros, la poétesse Akhmatova pose la question : « La conscience a-t-elle un sens ? Existe-t-elle ? » On voit qu'elle n'a pas lu Husserl, car si elle l'avait fait, elle saurait que la conscience non seulement existe mais est un flux continu et perpétuellement changeant. C'est son caractère continu qui permet à ce flux d'être « conscience de », c'est-à-dire de se représenter des contenus stables qui ne s'épuisent pas dans l'immédiateté d'une impression singulière. Ce n'est pas le tout de faire de l'acméisme, hein, il faudrait peut-être voir à lire Husserl !
 
(Gilbert Garistre, Aveux et anatropes)

Poésie russe et dilatation du Moi

 

Lire de la poésie russe procure une sensation de dilatation du Moi, on a l'impression d'être gonflé à Blok (ou à Mandelstam, c'est selon).
 
(Gilbert Garistre, Aveux et anatropes)

Retour verlainien de l'oncle Cristobal

 

Il a poussé la porte étroite qui chancelle... Il s'est promené dans le petit jardin... Il a revu l'humble tonnelle, les chaises de rotin... Et là — arrivé au niveau des chaises de rotin —, soudain un cri : « Tonton Cristobal est revenu ! »
 
(Gilbert Garistre, Aveux et anatropes)

Gran Chaco

 

Le Gran Chaco est une région géographique de l'Amérique du Sud qui s'étend en partie sur les territoires de l'Argentine, de la Bolivie, du Brésil et du Paraguay, entre les rivières Paraguay et Paraná à l'est, et l'Altiplano andin à l'ouest. Elle tire son nom de sa faune, composée principalement de chacaux (avec aussi quelques tapirs, des guanacos, des tamanoirs et une couple de perroquets).
 
(Gilbert Garistre, Aveux et anatropes)

vendredi 18 avril 2025

Enfin

 

Sayez, l'écrivain Caillois nous a fait montrer sa collection de minéraux. C'est pas trop tôt !
 
(Gilbert Garistre, Aveux et anatropes)

Solitude

 

Le mot du poëte Achille Chavée, « la solitude est un plat qui se mange seul », est astucieux mais d'une véracité discutable. Car ce plat, on peut aussi le manger — et comment ! — en compagnie d'une « grosse dondon ». Et même d'une dondon en général (pas forcément grosse).
 
(Gilbert Garistre, Aveux et anatropes)

Bobine

 

En parlant de types qui ont une drôle de bobine... il y a ce poëte allemand, là, ce Peter Rühmkorf.
 
(Gilbert Garistre, Aveux et anatropes)

Un cas tragique d'homonymie

 

Le mercredi 24 juillet 1878, vers 8 heures du soir, un meurtre a été commis à Mainbressy (Ardennes). Adéon Ducat, cultivateur, a tiré un coup de fusil sur le plasticien Hans Bellmer, le prenant pour la veuve Thiébault-Poncelet, la mère de son épouse avec laquelle il était en bisbille. La mort a été instantanée.
 
(Gilbert Garistre, Aveux et anatropes)

jeudi 17 avril 2025

Un piètre banquet

 

Au banquet de la vie, il n'y a pas à tortiller, on a été un infortuné convive. La boustifaille était infecte — les haricots n'étaient pas salés, le pivois avait un goût de bouchon — et les autres participants étaient de vraies têtes de con.
 
(Gilbert Garistre, Aveux et anatropes)

Mariage d'André Salmon

 

Nul événement mondain ne nous aura autant irrité que le mariage d'André Salmon. Dans son poëme, Apollinaire répète on ne sait combien de fois qu'aujourd'hui son ami André Salmon se marie, et à la fin on en a plein le dos. La patience n'est pas notre fort, il est vrai — à cause de cette sacrée « mortalité de l'être mortel » qui nous met les nerfs en boule.
 
(Gilbert Garistre, Aveux et anatropes)

Empiffrez-vous

 

Quand on réfléchit bien à la question, on arrive à la conclusion qu'absorber des aliments est une activité d'un ridicule inconcevable et — osons le mot — dégradante. Pourtant, personne n'a l'air de s'en rendre compte. Les gens ne réfléchissent pas à la question, il faut croire, puisqu'ils bouffent. Ils s'empiffrent. Eh bien c'est ça : empiffrez-vous, bande de sagouins !
 
(Gilbert Garistre, Aveux et anatropes)

On n'est pas Thucydide

 

Entre le Moi et l'autrui lévinassien, c'est un combat à mort, une véritable guerre du Péloponnèse. Pourtant, le Moi est plutôt bon gars, il ne se pousse pas du col. Il existe à peine, en fait. Il n'est qu'une série incohérente et discontinue d'états de conscience (selon Hume). Mais c'est l'autrui lévinassien, aussi, il a des manières faut voir — des vraies manières de pot de pisse. Il faudrait être Thucydide, pour supporter ça sans prendre le mors aux dents.
 
(Gilbert Garistre, Aveux et anatropes)

mercredi 16 avril 2025

Réticence à exister du Grandiloque

 

Le négateur Émile Cioran n'était pas tellement partisan d'exister. Il trouvait que cela présentait plus d'inconvénients que d'avantages et aurait préféré ne pas venir au monde. Mais pour nous autres lecteurs, ç'eût été dommage : rien que l'histoire de sa mésaventure à l'étang de Soustons, le jour où il a été foudroyé par une réminiscence de vocabulaire... non, c'est trop poilant.
 
(Gilbert Garistre, Aveux et anatropes)