mardi 22 mars 2022

Une aventure qui finit mal

 

Le 21 novembre 1968, l'aphoriste roumain Émile Cioran essaie de réparer le lavabo de son appartement où il a constaté une fuite. Il y arrive mais se fait mal à la main. Il déclare : « C'est toujours de cette façon que finissent mes aventures de plombier. » Toute la doctrine nihilique est resserrée dans cette phrase avec une force et un bonheur d'expression suprêmes. Oui, en vérité, c'est toujours de cette façon que finissent nos aventures de plombier.

(Fernand Delaunay, Glomérules)

Programme


L'homme du nihil en a ras la casquette de la réalité empirique qu'il juge « fétide », « mal agencée » et « barbante ». S'inspirant des peintres abstraits, et notamment de Jean Bazaine, il a décidé de procéder à l'anéantissement systématique de l'espace. Mais il ne compte pas s'arrêter là : au moyen de vocables tels que reginglette et zingibéracé, il entend mettre sur pied un nouveau réel doté de structures à l'unisson de celles de la musique concrète. Il va ouvrir une nouvelle ère dans l'évolution du cosmos. Du moins, c'est son intention.

(Fernand Delaunay, Glomérules)