mardi 10 mai 2022

Préparation au non-être

 

L'homme du nihil dit que ce n'est pas la peine de se fatiguer à lire Platon ; que pour se préparer à mourir, le mieux est de penser à un point mathématique. Pas forcément tout le temps, mais de temps en temps.

(Fernand Delaunay, Glomérules)

Étapes sur le chemin de la minéralité

 

Jeune, l'homme du nihil était « l'homme qui a peur de tout ». Aujourd'hui, il est « l'homme que tout insupporte » (ce qui ne l'empêche pas d'avoir toujours peur). Bientôt, il sera « l'homme que tout indiffère ». Mais pour atteindre cet état suprêmement désirable, il faut d'abord « décéder » — et c'est plus vite dit que fait !

(Fernand Delaunay, Glomérules)

Humain, trop humain

 

Il y a des écrivains qu'on aime et qu'on admire, mais on les aimerait et on les admirerait plus encore s'ils n'avaient pas démontré, en écrivant, qu'ils étaient possédés par la sotte ambition d'« être quelqu'un ».

(Fernand Delaunay, Glomérules)

Fastidieuse haeccéité

 

Quelle patience il faut pour supporter pendant tant d'années d'être une « chose particulière »... Une « chose particulière » toujours semblable à elle-même, à quelques détails près, seulement de plus en plus décrépite... Comment se fait-il que si peu de gens semblent fatigués d'être ce qu'ils sont ? Il n'est quand même pas possible qu'ils aiment ça ? — Oh, bon Dieu ! Ils aiment ça, les salops !

(Fernand Delaunay, Glomérules)