dimanche 10 février 2019

Morphologie du « cas »


Pourquoi les choses — si véritablement « choses » il y a — sont-elles comme elles sont ? Pourquoi tel excrément a-t-il la forme d'une tourte, quand tel autre mérite bien le surnom de « cigare japonais » que lui attribue le vulgum pecus ? Parmi les spécialistes, plusieurs théories s'affrontent, chacune privilégiant une influence particulière parmi celles qu'inévitablement subit le sujet déféquant. L'un croit que dans l'économie réside la cause dernière de la conformation du « cas » : il invoque la distribution des richesses, le régime de la propriété, la baisse des salaires, la lutte des marchés... Un autre, cependant, aperçoit la raison d'être de toute chose dans un ensemble de conflits psychologiques dont l'énergie sexuelle est le ressort principal, sinon unique. Pourquoi pas ? Mais ces théories, à se concentrer sur l'artiste, oublient trop le chef-d'œuvre sur lequel il s'agissait au départ d'apporter des lumières. Ne peut-on regarder cette réussite de l'art comme un signe qui se suffit à soi-même, témoignage absolu et comme anonyme, qu'il faudrait tenir comme tombé du ciel, qui seul enfin est digne d'attention et non celui qui l'a fait ?

(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)

Vernichtung !


Le suicide compulsif ne suffit pas. Ce qu'il faut, c'est détruire la tourbe polychrome du réel !

(Luc Pulflop, Prière d'incinérer. Dégoût)

Apothécie eulécanorine


25 décembre. — « Si l'on fait abstraction de quelques apothécies eulécanorines cupulées inférieures, ces hyphes sont empruntées au système fastigié radial que nous avons reconnu dans l'excipulum proprium des apothécies des discolichens. » (R. Dughi, « Un problème de lichénologie non résolu : l'origine et la signification de l'apothécie eulécanorine », in Revue bryologique et lichénologique, Ann. Fac. Se. Marseille, sér. II, 21, fasc. 3, 219-241, 1954)

(Barzelus Foukizarian, Journal ontologique critique)

Interlude

Jeune femme lisant le Monocle du colonel Sponsz de Hermann von Trobben

Art pour l'art


Platon, Lucrèce et Dante avaient des ambitions plus étendues que l'homme-sur-le-trône — le fameux « étant déféquant » des existentialistes. Philosophie, physique, théologie, rien ne les effrayait. Un vaste dessein les tenait, et non celui de ciseler quelque bibelot exquis, d'un travail irréprochable, mais dont l'utilité demeure mince, même si on ne le réduit pas à n'être qu'ornement.

(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)

Archives


Je conserve dans un bocal mes fièvres passées.

(Luc Pulflop, Prière d'incinérer. Dégoût)

Du « vuide »


18 juillet. — « Ce qui estant ainsi, il est très-faux de dire que la nature abhorre le Vuide, puisqu'elle ne pourroit pas subsister sans le Vuide susdit. Que si elle n'en a point d'horreur, voire mesme qu'elle s'y délecte, pourquoy auroit-elle peine à souffrir un Vuide un peu plus grand et tout continu, comme dans un boisseau, dans un muid, ou dans une chambre ? Pour moy, ie ne le comprends pas. Car le Vuide absolu n'est rien ; le rien ne peut détruire ce qui est réel. » (Charles-Augustin Bourgoing, La Vérité du Vuide contre le Vuide de la Vérité, Paris, Jean Hénault, 1664) 

— Oh ! Oh ! Comme tu y vas, mon ami !

(Barzelus Foukizarian, Journal ontologique critique)