« Quand j'entends le mot vivre, je sors mon revolver ou du poison. » (Luc Pulflop)
vendredi 19 octobre 2018
Crabe estropié
Selon Gragerfis, l'homme du nihil acharné à dilacérer son Moi « présente quelque similitude avec ces crabes dont on a brisé les pattes dans le milieu de quelques-unes de leurs parties, soit cuisse, jambe ou tarse, et qui se hâtent, par un mouvement brusque d'extension, de détacher le tronçon de la partie brisée et se mettent ainsi à l'abri de l'hémorragie qui les ferait périr. »
(Marcel Banquine, Exercices de lypémanie)
Sidération du Dasein
« Quand la douleur corporelle se trouve écrasée par les réalités bétonnées de l'objet, la douleur psychique se perd, elle, dans l'inconsistance du vide, courant d'un objet à l'autre, qu'elle s'obstine à solliciter comme vital et à rejeter comme détestable, et sachant, rappelons-le, que l'être peut aussi bien se tenir, pour les mêmes raisons, dans l'apparente sidération. » — Les « réalités bétonnées de l'objet » ! Comme cela est beau et nous émeut au suprême !
(Marcel Banquine, Exercices de lypémanie)
Esprit de contradiction
Le suicidé philosophique est comme ce prisonnier qui, voyant que l'on dresse un gibet dans la cour, croit que c'est à lui qu'on le destine, s'évade la nuit de son cachot, pénètre dans la cour et se fracasse la tête contre la muraille après s'être gargarisé, en guise de poison mortel, du vocable « reginglette ».
(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)
Prodiges nihiliques
Au dire de Pline l'Ancien, l'idée du Rien, parmi une foule d'autres choses, « arrête l'action de la justice », « éteint les feux de l'amour » et « protège les femmes enceintes ». — Voilà qui est à peine croyable, et il faut toute l'autorité du célèbre naturaliste pour nous convaincre de la réalité de ces prodiges !
(Marcel Banquine, Exercices de lypémanie)
Vice de conformation
« Chez de nombreux suicidés philosophiques, le Moi est rétréci obliquement, c'est-à-dire dans la direction du diamètre qui croise celui qui, du point de vue de l'ankylose, s'étend à la cavité cotyloïde du côté opposé, tandis que ce dernier diamètre, au contraire, n'est point diminué et offre même, quand le vice de conformation est considérable, plus d'étendue que dans l'état normal. » (Franz Karl Naegele, Des vices de conformation du Moi, et spécialement du rétrécissement oblique, J.-B. Baillière, Paris, 1840)
(Marcel Banquine, Exercices de lypémanie)
Un vrai pastis
Le réel mérite un grave reproche : quoique excellent dans le fond, il manque absolument d'ordre, et la distribution des matières y est on ne peut plus mauvaise, ce qui le rend très difficile à comprendre 1.
1. Heureusement, M. Choron en a donné une nouvelle édition mieux ordonnée et distribuée, à laquelle il a ajouté un traité du contrepoint simple.
(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)
Violon tzigane
Otto Weininger affirme que la musique tzigane « touche particulièrement les êtres sensibles et parfois déséquilibrés ». Il cite à l'appui de sa thèse l'un des héros du roman Anna Karénine, Nikolaï, frère de Konstantin Lévine, un ivrogne qui « adorait les Tziganes et les chansons russes ». Est-ce un abus de musique tzigane qui poussera le penseur viennois, le 4 octobre 1903, à mettre fin à ses jours, à l'âge de vingt-trois ans, dans la maison même où Beethoven rendit son dernier souffle ? Nous ne pouvons ici que poser la question.
(Marcel Banquine, Exercices de lypémanie)
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