samedi 14 octobre 2023

Un gautiériste

 

« Alors ? T'es mallarméen, il paraît ?
— Non, je suis gautiériste. Depuis que j'ai lu le Capitaine Fracasse, je ne jure plus que par Gautier. Je trouve que l’écriture gautiériste, tel un mécanisme en marche vers l’épiphanie poétique, tend à rendre l’art immanent à elle-même (à l'écriture gautiériste, c'est-à-dire). Jusqu’à l’effacement des sutures, mon vieux ! Jusqu’à ce que soient à la fois dépassés et effacés les artifices et instruments qui servaient jusqu’alors cette immixtion, jusqu’au point où “la sphère de la littérature renferme la sphère de l’art.”
— Bon diousse.
— Nous nous interrogerons ici sur le rôle de cette nostalgie picturale dans l’écriture : l’art de l’écrivain ne doit-il pas reconnaître une forte dépendance à cette nostalgie ?
— Ah, je ne sais pas, gars. J'avoue que je n'y ai jamais réfléchi. Bon, il faut que j'y aille. Alors ciao, hein ! Arrivederci !
— Ouais, aux fines herbes. »
 
(Marcel Rocabois, Le Néant et l'être)

Monsieur Teste et le réel

 

En juin 1925, à Alger, Paul Valéry reçut un coup de pied de cheval. Le « héros intellectuel national » en conçut un vif dépit et en éprouva une cuisante douleur dans les parties sacrées. D'après la princesse de Polignac, il ne décolérait pas. « Me faire ça à moi, qui ai consacré la majeure partie de mon existence à la vie de l'esprit ! »
 
(Marcel Rocabois, Le Néant et l'être)

Système avoir les foies

 

Selon Lucrèce, la peur de la mort gâche la vie. Sa théorie est qu'on n'arrive pas à profiter du moment présent — le fameux « carpe diem » — tellement on balise à l'idée de clamecer. Mais selon d'autres penseurs — dont Férillet Robert —, la vie fait déjà si peur qu'elle suffit à se gâcher elle-même.
 
(Marcel Rocabois, Le Néant et l'être)

Un affreux ratage

 

Ainsi il y eut un soir, et il y eut un matin : ce fut le sixième jour. Dieu vit tout ce qu'il avait fait et voici, cela était très guez.
 
(Marcel Rocabois, Le Néant et l'être)