lundi 27 septembre 2021

Existentialisme ichtyologique

 

L'anchois n'a pas à être sa propre potentialité sur le mode du pas-encore. Ni le pilchard, d'ailleurs.

(Fernand Delaunay, Glomérules)

dimanche 26 septembre 2021

Misère de l'en soi

 

Le philosophe Jean-Paul Sartre était, comme on le sait, un scélérat doublé d'un « mange-merde » (Gragerfis), mais il a tout de même exprimé une pensée juste : « L'en soi n'a pas à être sa propre potentialité sur le mode du pas-encore ».

(Fernand Delaunay, Glomérules)

samedi 25 septembre 2021

Genèse

 

Au commencement était le verbe acerchier (qui signifie parcourir, fouiller, chercher). Puis vinrent quelques adjectifs : gloméruleux, exophtalmique, zingibéracé... Enfin parut le vocable reginglette : les jeux étaient faits, rien n'allait plus.

(Fernand Delaunay, Glomérules)

vendredi 24 septembre 2021

Déchéance

 

On a trente ans, puis quarante, puis cinquante, etc., et on se transforme insensiblement en « vieux jeton ». C'est intolérable, il y a de quoi devenir maboul, mais personne ne dit rien. Tout le monde fait « jore ». Oh, bon Dieu !

(Fernand Delaunay, Glomérules)

jeudi 23 septembre 2021

Bon à rien

 

Pour agir, il faut une forte dose de fatuité. Un homme sans prétention un homme « à la bonne franquette », qui ne brigue pas le titre glorieux de « Dasein », un homme dans le genre de celui dit « du nihil » — n'est bon à rien. Ou plutôt, il n'est bon à presque rien — car il peut toujours ratiociner sur l'haeccéité, la temporalité du temps, la mortalité de l'être mortel, et cetera, et ça, ce n'est pas exactement « rien ».

(Fernand Delaunay, Glomérules)

mercredi 22 septembre 2021

What the world needs now

 

L'homme n'est pas fait pour vivre longtemps : il est vite corrompu par la « réalité empirique » et son hideux cortège de « phénomènes ». Le monde n'a besoin que de jeunesse et de suicidés philosophiques.

(Fernand Delaunay, Glomérules)

mardi 21 septembre 2021

La paix maintenant

 

Avez-vous jamais essayé de convaincre une bourrelle de sa vilenie ? Impossible, direz-vous. Et ça l'est en effet. Ce que l'on peut faire, en revanche, c'est mettre un terme définitif à la vilenie de ladite bourrelle en l'amenant à avaler du taupicide. Pour y parvenir, la technique consiste à lui tirer l'oreille pour l'obliger à desserrer la mâchoire. La bourrelle ne récrimine guère, c'est tout juste si elle maugrée vaguement, heureuse de s'en tirer à si bon compte. Son éloquence ravalée avec le pharmakon, elle n'émet que des borborygmes avant de se taire à jamais.

(Fernand Delaunay, Glomérules)

lundi 20 septembre 2021

Contamination langagière

 

D'après Gragerfis (Journal d'un cénobite mondain), l'homme du nihil, de retour d'un bref séjour à Bondy (Seine-Saint-Denis), montrait un comportement des plus bizarres. Il accusait le réel de le « mal regarder », il lui intimait l'ordre de « baisser les yeux », et quand le réel s'exécutait, il s'écriait : « Voilà ! »

(Fernand Delaunay, Glomérules)

dimanche 19 septembre 2021

Quiproquo

 

Jean Giono se trompe : ce n'est pas dans la « sensualité » qu'il y a « une sorte d'allégresse cosmique » mais dans l'homicide de soi-même. Dans la sensualité, l'allégresse — si tant est qu'elle existe — n'est que comique.

(Fernand Delaunay, Glomérules)

samedi 18 septembre 2021

Impudence

 

Non seulement le monstre bipède, à l'instar de la plus infime paramécie, veut être, mais en plus, comble d'impudence, il veut « être quelqu'un » !

(Fernand Delaunay, Glomérules)

vendredi 17 septembre 2021

Histoire de Ouin-Ouin

 

« C'est Ouin-Ouin qui va chercher sa femme à la gare de Neuchâtel.
― Et ?
― En cours de route, il change d'avis ; il décide de mettre fin à ses jours et se jette dans le lac.
― Ça alors !
― Oui.
― Voilà qui rappelle étrangement l'histoire d'Edmond-Henri Crisinel.
― Sauf que ce dernier n'était pas marié.
― Mais il s'est quand même suicidé, va savoir pourquoi.
― Il paraît qu'il avait une vision quasi mystique de l'être.
― Ah. Ça doit être ça. »

(Fernand Delaunay, Glomérules)

jeudi 16 septembre 2021

Nœud du problème

 

« Il était né, voilà ce qu'il avait. » (Gragerfis, à propos de la mélancolie de l'homme du nihil)

(Fernand Delaunay, Glomérules)

mercredi 15 septembre 2021

Prière

 

Les êtres nobles aiment rarement la vie, ils lui préfèrent le pachynihil. Ceux qui se contentent de la vie et se livrent avec délices à de coupables exsufflations sont toujours des ignobles. Seigneur ! épargnez-nous de ressembler à l'affreux « monstre bipède » !

(Fernand Delaunay, Glomérules)

mardi 14 septembre 2021

Un être néantique

 

La femme, avec son terrible cortège de duplicité, d'absence d'âme et de sottise satisfaite d'elle-même, représente non pas la vie — comme le croient certains esprits simplets américanisés — mais « le néant du monde en proie à sa grimace ».

(Fernand Delaunay, Glomérules)

lundi 13 septembre 2021

Agression chosesque

 

On se croit complètement désabusé, on pense s'attendre à tout, être revenu de tout, quand soudain surgit... une théière ! Oh, bon Dieu !

(Fernand Delaunay, Glomérules)

dimanche 12 septembre 2021

Un imposteur

 

Considérez un homme taraudé incessamment par l'idée du Rien. Pouvez-vous l'imaginer un seul instant se livrer au canotage ? Non. Bien sûr que non. Pourtant, le satiriste roumain Emil Cioran, qui passe pour le champion toutes catégories de la désespérance nihilique, écrit (dans ses Aveux et anathèmes) : « Étang de Soustons, deux heures de l'après-midi. Je ramais. » Je RAMAIS ! — Conclusion ?

(Fernand Delaunay, Glomérules)

samedi 11 septembre 2021

Aux chiottes les phénomènes

 

« Le réel est un salop et je le crèverai » aurait déclaré le « penseur privé » Robert Férillet au phénoménologue Edmond Husserl au cours d'une réception pour les soixante-dix ans de ce dernier. Avant d'ajouter : « Aux chiottes, les phénomènes ! » — D'après Karl Jaspers qui assistait à la scène, le philosophe en resta « comme deux ronds de frite ».

(Fernand Delaunay, Glomérules)

vendredi 10 septembre 2021

Synthèse

 

Pour qui sait lire entre les lignes, tout ouvrage de littérature peut se résumer en une phrase : « Untel est un salop et je le crèverai. » Shakespeare, Cervantes, Dostoïevski, Flaubert, et avec eux tous les écrivains depuis l'Antiquité, n'ont finalement écrit que cela : « Untel est un salop et je le crèverai. »

(Fernand Delaunay, Glomérules)

jeudi 9 septembre 2021

Accumulation d'opprobres

 

Comme si l'haeccéité, la temporalité du temps, la mortalité de l'être mortel ne suffisaient pas à son malheur, l'homme du nihil habite encore dans des « territoires » situés dans la « France périphérique » et est un « perdant de la mondialisation » (comme l'écrivain portugais Fernando Pessoa, for that matter).

(Fernand Delaunay, Glomérules)

mercredi 8 septembre 2021

Argument d'autorité

 

Vauvenargues — qui était, comme on le sait, un « homme au jugement ferme, lucide et pondéré, non dénué de finesse » — dit que les bonnes femmes sont complètement siphonnées. Alors ?

(Fernand Delaunay, Glomérules)

mardi 7 septembre 2021

Vainement oint


« Croyant ma dernière heure venue, j'ai fait venir un prêtre et il m'a oint. Mais c'était une fausse alerte, hélas ! » (Stylus Gragerfis, Journal d'un cénobite mondain)

(Fernand Delaunay, Glomérules)

lundi 6 septembre 2021

Entrepreneuriat et homicide de soi-même

 

Guillaume le Taciturne avait raison : il n'est pas nécessaire d'espérer pour entreprendre. Cela est particulièrement vrai de l'entreprise consistant à ingérer du taupicide. Dans ce genre d'affaire, il serait même plutôt recommandé d'être désespéré.

(Fernand Delaunay, Glomérules)

dimanche 5 septembre 2021

Réminiscences littéraires

 

Confronté à la vilenie, à la bassesse, à la méchanceté pharamineuse d'une bourrelle qui l'a trahi après l'avoir tourmenté jusqu'à le faire tourner en bourrique, l'homme du nihil ne peut que s'exclamer, comme le rêveur de la fiction de Jean-Paul (la Nuit du nouvel an) : « Vieille bique ! Va te faire voir chez Plumeau ! » Et encore (un ajout de son cru) : « Carogne ! »

(Fernand Delaunay, Glomérules)

samedi 4 septembre 2021

Couru d'avance

 

« En début de soirée, j'ai le choix entre 1) regarder le journal télévisé ; 2) lire un livre ; 3) contempler, devant la maison, l'étang tout brillant de la lumière flavescente du pachynihil et, environné d'arbres aux mille verts des jeunes feuilles de printemps, caresser pour la millionième fois la pensée de me détruire. — Je choisis la troisième solution. » (Stylus Gragerfis, Journal d'un cénobite mondain)

(Fernand Delaunay, Glomérules)

vendredi 3 septembre 2021

Persécuté

 

Quand on lui demande pourquoi il pense que le réel lui en veut personnellement, l'homme du nihil mentionne ordinairement « les emballages à ouverture dite facile ». Mais il dispose de pléthore d'autres preuves !

(Fernand Delaunay, Glomérules)

jeudi 2 septembre 2021

Âcres ressouvenirs

 

Quand il pense aux multiples fois où il a été ridicule, l'homme du nihil aurait envie de rassembler tous les témoins de ses déconfitures et de les jeter dans le Bosphore, enfermés dans un sac de cuir plein de vipères, comme on faisait jadis aux parricides. Mais en formant ce projet, il est encore ridicule !

(Fernand Delaunay, Glomérules)

mercredi 1 septembre 2021

Rhétorique

 

Pas plus que la métonymie, la vie n'est à proprement parler une « figure ». Il s'agit plutôt d'un ensemble de problèmes hétérogènes — Bukowski dirait : « une suite d'emmerdes ». On a subordonné à la métonymie des tropes antithétiques comme la synecdoque et l'hypallage. Mais quant à la vie, impossible d'en extraire le moindre trope : c'est un phénomène trop absurde pour qu'on puisse en tirer autre chose qu'un sentiment d'intense dégoût. 

(Fernand Delaunay, Glomérules)

mardi 31 août 2021

Sisyphe et le taupicide

 

Pour imaginer Sisyphe heureux (au sens schopenhaurien du terme), il faut d'abord se le représenter commettant l'homicide de soi-même par ingestion de taupicide. Adieu rocher ! Adieu gravelle et rhumatismes ! Adieu Bourboule aimée, dont la tête hardie défie les hauteurs des cieux ! Adieu philosophie marcellienne !
 
(Fernand Delaunay, Glomérules) 

lundi 30 août 2021

Aller bien

 

Quand, par pure politesse, l'homme du nihil les interroge sur leur état, quatre-vingt-dix-neuf fois sur cent les gens répondent qu'ils vont bien, merci. Mais comment font-ils pour aller bien ? Voilà ce qu'il faudrait savoir ! Ou bien... mentiraient-ils ?... Sûrement ils mentent, les salops ! — Mais pourquoi ? 

(Fernand Delaunay, Glomérules)