vendredi 1 avril 2022

Comprendre

 

L'homme ne peut que constater, mais quant à comprendre, cela est hors de sa portée. On ne devrait jamais utiliser ce verbe. Comprend-on un bigaradier, un porcus singularis ou une biscotte confiturée ? Allons, mes amis !

(Fernand Delaunay, Glomérules)

Une belle mort

 

Mourir en lisant Poteaux d'angle, foudroyé par l'optimisme de Michaux.

(Fernand Delaunay, Glomérules)

Pensée étranglée

 

« La vie n'est rien autre chose que — (... le téléphone ayant sonné, je ne sais plus ce que je voulais dire.) » (Stylus Gragerfis, Journal d'un cénobite mondain)

(Fernand Delaunay, Glomérules)

jeudi 31 mars 2022

Silence noético-noématique

 

S'il faut en croire Gragerfis, Jean-Paul Sartre resta pendant trois ans — de 1980 à 1983 — sans prononcer une parole. Dans son Journal, Gragerfis explique cette débauche de silence par le fait que le philosophe était, comme on dit, « décédé ». Et il en conclut que le « décès » a parfois du bon.

(Fernand Delaunay, Glomérules)

Misanthropie

 

« Je hais les gens qui usent en public du vocable bouillabaisse, et je ne hais pas moins ceux qui s'abstiennent de le faire. » (Stylus Gragerfis, Journal d'un cénobite mondain)

(Fernand Delaunay, Glomérules)

mercredi 30 mars 2022

René et le parfait

 

Dans ses Méditations, Descartes entreprend de démontrer l'existence de Dieu à l'aide de la « preuve par l'idée de parfait ». Il imagine un parfait au chocolat et... — Oh, assez de ces bêtises !

(Fernand Delaunay, Glomérules)

Bien dit

 

« Rien ne console, parce que rien ne remplace. » (Marie Lenérouge)

(Fernand Delaunay, Glomérules)

mardi 29 mars 2022

Absence de frisson désespéré

 

« Hier, enveloppé dans la brume sur un chemin qui domine la Seine, je me suis répété ce mot de Luc Pulflop : “les falaises d'Étretat et l'évidence de n'être rien”, sans en éprouver aucun frisson désespéré. Une grande assurance au contraire, le sentiment d'une certitude sans faille. » (Stylus Gragerfis, Journal d'un cénobite mondain)

(Fernand Delaunay, Glomérules)

lundi 28 mars 2022

Frisson désespéré

 

« Je pense à ce mot de Valéry : “le sentiment d'être tout et l'évidence de n'être rien”, et je me dis que pour une fois, ce couillon a eu le nez creux. Mais je ne sais que faire de ce mot. À tout hasard et faute de mieux, j'en retire un frisson désespéré. » (Stylus Gragerfis, Journal d'un cénobite mondain)

(Fernand Delaunay, Glomérules)

dimanche 27 mars 2022

Haeccéité

 

Ce n'est pas que le Moi n'existe pas (là-dessus, les bouddhistes japonais de la secte Kousha se trompent). Non, le problème c'est qu'il est grotesquement ridicule à force d'être « comme ci et comme ça ». S'il n'était pas « comme ci et comme ça », ça pourrait encore aller (peut-être).

(Fernand Delaunay, Glomérules)

samedi 26 mars 2022

Nouveauté

 

« A rollicking good time! Fernand Delaunay is known for his razor-sharp wit, and Glomérules is no exception. Hilarious and thought-provoking, this book had me laughing out loud from beginning to end. An absolute delight, compulsively readable. I can't wait to see what Fernand Delaunay does next. » 
 
(The Alaska Quarterly Review)

La souffrance d'être heureux

 

« Mon Cicciobello, tes joues sont rouges, tu es malade ! Vite, ta température ! Oh là là, tu as de la fièvre ! Vitamines, lait... du sirop ! Tiens, mon Cicciobello ! Oh, tu es toujours malade ! Essayons une piqûre ! Ah, ça y est, je t'ai guéri. Cicciobello bobo, il a toujours besoin de toi. » — Pour pénétrer quelqu'un, pour le connaître vraiment, il me suffit de voir comment il réagit à cette publicité pour le poupon Cicciobello. S'il ne comprend pas tout de suite, inutile de continuer. (Stylus Gragerfis, Journal d'un cénobite mondain)

(Fernand Delaunay, Glomérules)

« Tonton Sigmund »

 

Gragerfis à propos de Freud : « C'est un con. » — Et en effet, il y avait en lui du fanatique, de l'homme de l'ancienne Alliance.

(Fernand Delaunay, Glomérules)

Didactisme pachynihilique

 

« Savez-vous ce que signifie le mot pachynihil ou voulez-vous que je vous l'explique ? » — Toute l'Allemagne est là. Nation atrocement didactique.

(Fernand Delaunay, Glomérules)

Présomption bipédique

 

Au dire de Gragerfis, ce qui exaspère le plus l'homme du nihil, c'est le fait que les « monstres bipèdes » qu'il côtoie ont tous l'air de juger leur existence nécessaire (quand la sienne propre ne lui semble même pas probable). — Oh, ces salops ! Comme il les hait !

(Fernand Delaunay, Glomérules)

Conjuration

 

Dire à l'idée du Rien : Sors de cette pachyméninge ! — Cela est absurde et beau — mais surtout inutile.

(Fernand Delaunay, Glomérules)

vendredi 25 mars 2022

Gênance

 

Selon Gragerfis, l'homme du nihil considère que toute personne prononçant les mots Bhagavad-Gita prouve par là même qu'elle n'a aucun amour-propre ni aucun sens du ridicule. Idem — en un peu moins grave pour le nom Vishnou.

(Fernand Delaunay, Glomérules)

L'art de déplaire

 

Complexe d'infériorité ? Timidité congénitale ? Sentiment de culpabilité lié à son statut de rescapé ? Toujours est-il que l'homme du nihil n'a jamais cru possible que l'on s'intéressât à lui. Et les faits lui ont donné raison — mais il faut avouer qu'il y a mis du sien, avec sa calvitie précoce, son emploi fautif du vocable reginglette et son penchant immodéré pour le grinçant.

(Fernand Delaunay, Glomérules)

jeudi 24 mars 2022

Nouveauté

 

Dans cet opus, Fernand Delaunay déchaîne toute sa puissance phrastique et l'être en prend pour son grade.

          En vente ici au prix de 9,99 €.

     « A real page-turner ! » (The New York Review of Books)

Commediante ! Tragediante !

 

Il est difficile de prendre au sérieux quelqu'un qui se proclame le plus grand solitaire que la terre ait jamais porté tout en se vantant de passer ses soirées à « discuter le bout de gras » pendant des heures avec Beckett, Ionesco, Henri Michaux et tutti quanti — et qui en outre a vécu des décennies avec une certaine Simone Boué. L'homme du nihil, lui, ne fréquente ni Beckett, ni Ionesco, ni Michaux — il faut dire qu'ils sont, comme cela s'appelle, « décédés ». Il passe ses soirées en compagnie de son chat Bouboule et de sa chienne Pipik et « c'est déjà pas mal ».

(Fernand Delaunay, Glomérules)

mercredi 23 mars 2022

Le fonds pervers des choses

 

Tôt ou tard, tout ce que le monstre bipède invente, tout engin, tout ustensile — fût-ce un simple ouvre-boîte — en arrive à agresser l'homme du nihil — jusqu'à parfois lui entailler cruellement le « fondement de l'historialité du Dasein ». On pourrait appeler ce phénomène « la malignité des objets ».

(Fernand Delaunay, Glomérules)

Mot qui sauve

 

« J'ai bien souvent noté dans mon journal que le vocable strapontin est le souverain antidote de mes pires états intérieurs. » (Stylus Gragerfis, Journal d'un cénobite mondain, p. 383)

(Fernand Delaunay, Glomérules)

mardi 22 mars 2022

Une aventure qui finit mal

 

Le 21 novembre 1968, l'aphoriste roumain Émile Cioran essaie de réparer le lavabo de son appartement où il a constaté une fuite. Il y arrive mais se fait mal à la main. Il déclare : « C'est toujours de cette façon que finissent mes aventures de plombier. » Toute la doctrine nihilique est resserrée dans cette phrase avec une force et un bonheur d'expression suprêmes. Oui, en vérité, c'est toujours de cette façon que finissent nos aventures de plombier.

(Fernand Delaunay, Glomérules)

Programme


L'homme du nihil en a ras la casquette de la réalité empirique qu'il juge « fétide », « mal agencée » et « barbante ». S'inspirant des peintres abstraits, et notamment de Jean Bazaine, il a décidé de procéder à l'anéantissement systématique de l'espace. Mais il ne compte pas s'arrêter là : au moyen de vocables tels que reginglette et zingibéracé, il entend mettre sur pied un nouveau réel doté de structures à l'unisson de celles de la musique concrète. Il va ouvrir une nouvelle ère dans l'évolution du cosmos. Du moins, c'est son intention.

(Fernand Delaunay, Glomérules)

lundi 21 mars 2022

Le réel, et maintenant ça !

 

Depuis qu'il est frappé de calvitie galopante, l'homme du nihil voue une haine féroce aux individus « à grosse touffe de cheveux ». Il a particulièrement dans le collimateur le cinéaste espagnol Pedro Almodóvar — dont il n'a par ailleurs jamais apprécié les films.

(Fernand Delaunay, Glomérules)

Libre arbitre

 

« Il est probable que si le nihilique était doué de raison, il revendiquerait la liberté de son comportement et imaginerait de plausibles motifs pour justifier son élan incoercible vers le Rien. » (Jean Rostand, La Vie et ses problèmes, Paris, Flammarion, 1939, p. 86)

(Fernand Delaunay, Glomérules)

dimanche 20 mars 2022

Scepticisme lotois

 

« Une seule chose est sûre en ce bas monde : c'est que rien ne l'est.
― Qui a dit ça ? Pyrrhon ? Sextus Empiricus ? Ænésidème ?
― Non, c'est une vérité sortie de Montcuq (Lot). »

(Fernand Delaunay, Glomérules)

samedi 19 mars 2022

Un dabe

 

« L'homme du nihil, un jour que je lui parlais de l'homicide de soi-même, me dit qu'il mettait le suicidé philosophique au-dessus de tous les poëtes et de tous les penseurs, et qu'il ne pouvait le comparer qu'à une tête de chien couché. » (Stylus Gragerfis, Journal d'un cénobite mondain)

(Fernand Delaunay, Glomérules)

vendredi 18 mars 2022

Un peu de modestie

 

Le « nihilique » doit se garder de prendre des poses avantageuses et des airs supérieurs, car le terrain métaphysique où il se meut est mou, marécageux et plein de roseaux. Et si le Rien n'était qu'une coquecigrue ? Et si l'idée du pachynihil ne procédait que d'un désordre chimique dans les synapses, les dendrites, les axones ou le péricaryon ? La plus grande illusion est peut-être que tout est illusion ! — Un commentaire, Cioran ?

(Fernand Delaunay, Glomérules)