dimanche 21 mai 2023

Une tronche à faire peur

 

Quand on a une dizaine d'années, on essaie de rassembler des bribes d'informations sur la vie (sur ce que les adultes appellent la vie). On arrive vite à la conclusion que c'est quelque chose qui ressemble un peu à Daniel Emilfork dans le rôle du Canaque : quelque chose d'inquiétant, quelque chose qui vous fout les jetons. Bien sûr, en grandissant, on s'aperçoit que ça ne ressemble pas exactement à Daniel Emilfork. C'est pire. 
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

samedi 20 mai 2023

Un importun

 

On sonne. Le nihilique ouvre la porte. Sur le seuil se tiennent deux « témoins de Jéhovah » dont l'un ressemble étonnamment au chanteur Gérard Lenorman. C'est lui qui parle en premier.
« Notre vieille Terre est une étoile où toi aussi tu brilles un peu.
— Admettons. Ensuite ?
— Je viens te chanter la ballade, la ballade des gens heureux.
— Dégage ! Fissa ! Je t'en foutrai des gens heureux, moi, tuouaouar ! Au cul, les gens heureux ! Au cul, le mariage d'André Salmon ! Non mais ! »
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

Drôle de corps

 

« Pour avoir assassiné le duc de Guise, Poltrot de Méré fut condamné à être tenaillé de fers chauds en quatre endroits de son corps, puis à être écartelé par quatre chevaux jusqu'à ce que mort s'ensuive. Il fut supplicié en place de Grève le 18 mars 1563 après-midi devant une foule immense. » — Quand on lit ça, on se dit que le monstre bipède est quand même un drôle de corps. Il écrit des poëmes, il compose des sonates, il peint des tableaux de peinture, mais sous ses poëmes, ses sonates et ses tableaux de peinture, se cache un fond de méchanceté. En tout cas, ça en a tout l'air.
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

Lecture

 

Il y a des gens qui lisent (du Daniel Pennac, du Christian Bobin, de l'Alice Zeniter, du Fernando Pessoa) pour éviter de penser. D'autres, ou les mêmes, le font pour éviter de vivre — ça, encore, ça peut se comprendre. — Du Fernando Pessoa ???
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

Oulipisme frénétique

 

« Et Georges Perec colporte trop l'occulte. » Cette phrase, non contente d'être un palindrome, comporte exactement sept fois la lettre e. Sept, la racine carrée de quarante-neuf !
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

vendredi 19 mai 2023

Piège nietzschéen évité de justesse


Frédéric Nietzsche : Tu dois devenir l'homme que tu es. Fais ce que toi seul peux faire. Deviens sans cesse celui que tu es, sois le maître et le sculpteur de toi-même.
Le nihilique : T'as pas dit « Jacques a dit ».
Frédéric Nietzsche : Donnerwetter ! 
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

On veut du vin chaud

 

À eux deux, Couronne Alfred (face d'alcoolique, viande grise, mou partout) et Couronne Germaine (gueule en gélatine et saindoux, trois mentons, nichons qui dévalent sur la brioche) résument l'humanité telle que la voit le nihilique. Pourquoi sont-ils venus sur terre, nom de Dieu ! Ils n'ont pas honte d'exister ?
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

Controverse de Davos

 

Cassirer : S'il y a bien un écrivain qui a tout dit, c'est Peter Handke. Avec son gardien de but... saisi par l'angoisse au moment du penalty... Que dire de plus ? C'est ça, l'être !
Heidegger : L'être ? Comment ça ? Hannah ! T'entends ce qu'il dit, ce con ?
Arendt : J'entends.
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

Comme tout

 

Le « négateur universel » Émile Cioran pensait que le bouddhisme n'était pas pessimiste. Mais pas optimiste non plus. « C'est comme tout, disait-il ; le bouddhisme, je veux dire. »
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

jeudi 18 mai 2023

Harmonie préétablie

 

Locke : Qui parle ici d'harmonie ? Ah, c'est toi Gottfried ?
Leibniz : Oui, et ?
Locke : Oh, rien. Je me demandais juste. 
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

Coup du baron

 

Le « héron mélancolique » Roland Jaccard, en se supprimant, commit à la fois un suicide et un suissecide. Mais ce n'était pas une première. Un tel « doublé » avait déjà été réalisé par Edmond-Henri Crisinel, Francis Giauque et Jean-Pierre Schlunegger.
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

Pachynihil attaque

 

Chez le nihilique, c'est le dégoût qui est « éternel, pas artificiel ». À moins que ce ne soit le chagrin ? Ou la pitié ? En tout cas, ce n'est pas l'amour, vous pouvez être tranquilles. L'amour, il se le colle au prose. Rien que d'entendre ce mot, ça lui donne de l'urticaire. Aux doubles-vécés, l'amour et tutti quanti ! Aux doubles-vécés, Aragon, Albert Cohen et tous ces faux jetons ! Du balai, les pots de pisse !
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

Poids plume

 

On a pu le constater lors du débat qui l'opposait à André Comte-Sponville sur la question des universaux : dans une controverse philosophique, Marek Halter ne fait pas le poids.
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

mercredi 17 mai 2023

Altérité radicale de l'autrui lévinassien

 

“For Levinas, as we have seen, there is a fundamental asymmetry in the face-to-face encounter; only a radical alterity can constitute the Levinassian Other.” (Marcel Campion, The Big Wheel of Destiny)

(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

Jacques non plus

 

Il est terrifiant de penser que depuis des millénaires, depuis l'ineffable homme des cavernes en fait, personne n'a été capable de comprendre à quoi rimait tout ce cirque : l'existence, le « réel » et tout le tralala. Pas même un grand savant comme Jacques Monod !
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

Goodbye, autrui lévinassien !

 

Il est tout à fait possible de couper les ponts avec l'autrui lévinassien. Il suffit de rester chez soi et de vivre, comme cela s'appelle, en autarcie (par exemple en cultivant des betteraves). L'autrui lévinassien ne peut alors plus vous atteindre, il doit exercer sa vilenie ailleurs et ça le fait bisquer.
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

Un roi de l'élégance (existentielle)

 

Inspiré peut-être par l'exemple de Bernard Bonvoisin, le nihilique ne porte pas d'emblème quand il marche dans la rue. Il aime aller incognito.
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

mardi 16 mai 2023

Complot

 

De même que « les paranoïaques aussi ont des ennemis », ce n'est pas parce qu'il y a des « complotistes » qu'il n'existe pas de complots. Et le complot par excellence est... non pas une tête de chien couché comme on pourrait s'y attendre mais l'être. Qui l'a ourdi, c'est difficile à dire, mais le but est clair : faire passer l'étant existant pour un couillon.
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

Beam me up, Scotty

 

Et si la mort (le fait de mourir) était un genre de processus de téléportation (comme dans Star Trek) ? En moins de temps qu'il n'en faut pour cuire des asperges, on se retrouverait dans l'infini infundibuliforme à discuter d'irréparable avec Émile Cioran. On flotterait, libre de toute pesanteur, au milieu d'un nuage de gluons. Ce serait choucard.
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

Trous

 

Un jour, Verlaine que ça turlupinait demanda à Rimbaud ce que c'était que ces deux trous rouges que le dormeur du val avait au côté droit. Rimbaud lui répondit que c'étaient deux trous de balle. Alors Verlaine, pensif : « Tiens, tiens. Ils sont drôlement placés. »
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

Mauvais pressentiment

 

Sans aller, ce serait un comble, et même un comble de bougre, jusqu'à se prendre pour John Fogerty, le nihilique voit une mauvaise lune se lever. Il voit des ennuis sur son chemin. Il sait que la fin approche à grands pas, tel un prophète hébreu.
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

lundi 15 mai 2023

Vive la maladie

 

Il faut chérir son hypocondrie, car elle nous sauve de la solitude. On voit des médecins, on présente sa « carte vitale »... C'est tout de même appréciable, un peu de chaleur humaine. Sans compter que la maladie, à elle seule, c'est déjà une présence... Pas ?
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

La traversée de l'existence

 

À l'instar du peintre Grandgil, le Dasein heideggérien porte des valoches de cochon entre la rue Poliveau et la rue Lepic. C'est ce qu'il appelle sa « vie ».
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

Principe du mouvement

 

Allongé sur son canapé en laine, la casquette rabattue le nez, le nihilique pense à un postulat antique sur le mouvement des animaux (énoncé par Aristote, qui dit que le principe du mouvement est l'immobile).
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

Botanique de la négation

 

Dans ses Cahiers, le « négateur universel » Émile Cioran compare Françoise Verny à une agapanthe Black Pantha. Il dit qu'elle a en commun avec cette plante d'être rhizomateuse et de posséder des inflorescences en ombelles (contrairement à Jean Paulhan). Mais il ne nous apprend rien de plus.
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

dimanche 14 mai 2023

Minestrone à la Durrell

 

On ne s'en rend pas forcément compte quand on lit le Quatuor d'Alexandrie, mais Lawrence Durrell réussissait très bien le minestrone. D'après Henry Miller, son minestrone était « d'une perfection vrombissante, avec un soupçon aromatique de légèreté et de détachement ». Miller ajoute que quand il voyait une soupière de minestrone durrellien, il s'exclamait in petto : « Foin de procrastination, il faut foncer avec sa cuillère ! »
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

Une créature prosaïque

 

La femme, cela n'est que trop connu, est un être banal, dépourvu de poésie, de finesse et d'idéalité. Jamais une personne du sexe ne fera allégeance au Rien. Pourquoi ? Pour la simple et bonne raison que, comme l'a noté Weininger, elle n'a pas d'âme. Ce n'est pas difficile à comprendre, « comme même » ! Elle peut faire « jore », elle peut s'afficher lisant du Cioran ou du Jaccard, elle peut même vous réciter de l'Ecclésiaste, elle est et restera un séide du Grand Tout (ce qui l'intéresse, c'est les pépettes).
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

Maison du Jouir

 

En 1901, le peintre Paul Gauguin construisit à Atuona, dans les îles Marquises, une maison qu'il baptisa Maison du Jouir. Et il y jouit en effet, mais d'un eczéma purulent et des derniers développements d'une syphilis qui devait l'emporter deux ans plus tard. — Une leçon à méditer pour tous les adeptes du jouir et de la « réalité empirique ».
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

Cloporte

 

Le Rouquemoute, joué par Georges Géret, est l'archétype de l'autrui lévinassien : un être dont la veulerie et la lâcheté n'ont d'égale que l'hypocrisie.
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)