vendredi 7 avril 2023

Monade

 

« Il rentrait chez lui, là-haut, vers le brouillard. Elle descendait dans le Midi, le Midi. » On voit que chez Michel Fugain comme chez Husserl, la monade caractérise le rapport intersubjectif — ici entre un homme qui remonte vers le brouillard et une femme qui descend dans le Midi (le Midi). Plus précisément, Fugain et Husserl désignent tous deux par le terme monade la conscience individuelle, l'individualité en tant qu'elle représente à la fois un point de vue unique, original sur le monde et une totalité close, impénétrable aux autres consciences individuelles ou individualités. Ce n'est pas du tout comme chez Leibniz !
 
(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

jeudi 6 avril 2023

Commedia dell'arte

 

C'était déjà dur de devoir vieillir, mais voilà-t-il pas qu'il va falloir être mort ! Il ne faut quand même pas pousser ! À quoi ça rime, tout ça ? C'est une farce ? C'est de la commedia dell'arte ?
 
(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

Non-aidance de Mauriac et de Claudel

 

Un quidam qui, sans avoir rien demandé à personne, s'est vu précipiter dans les eaux torrentueuses et glacées de l'être, on peut comprendre qu'il montre quelque impétuosité à regagner les rives empierrées du Rien. Mais c'est pas le mec Mauriac qui va l'aider ! Ni le gars Claudel ! Merde, alors !
 
(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

Un « connoisseur »

 

Pour faire « jore » qu'il s'y connaît, le nihilique dit qu'il ne sait pas de plus belles sculptures que les lunaires et silencieuses sculptures précolombiennes.
 
(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

Agilité presque incroyable de l'idée du Rien

 

L'idée du Rien est pareille à un gibbon qui, sans avoir l'air de prendre son élan, glisse d'une branche à l'autre. En moins de temps qu'il n'en faut pour cuire des asperges, elle s'infiltre partout, flétrit tout, contamine tout. Le Dasein perd ses illusions quant à la solidité du monde extérieur et se retrouve, comme qui dirait, « en slip ».
 
(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

mercredi 5 avril 2023

Un spectacle qui vaut le coup

 

Il n'y a rien de plus comique à observer que ces gens qui se démènent pour être « connus ». C'est comique, et pourtant, cela nous emplit d'une immense tristesse de Chopin. Tous ces pots de pisse... Qui veulent être « célèbres »... N'est-ce pas désespérant ? Quant à la nature humaine ? — Très bien, n'en parlons plus.
 
(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

Dans le même sac

 

Le nihilique ne prétend pas qu'il a souffert sous Ponce Pilate, qu'il a été crucifié, qu'il est mort et a été enseveli. Il ne va pas jusque là. Mais il a quand même bien « douillé » à cause d'une mégère difforme au faciès d'hippopotame. Et pour lui désormais, toutes les femmes ont le visage du traître Ferdonnet.
 
(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

Méthode apophatique

 

S'inspirant des grands mystiques apophatiques — Maître Eckhart, Jakob Böhme, Angelus Silesius, Nicolas de Flüe —, le nihilique est intarissable quand il s'agit de dire ce que la « réalité empirique » n'est pas. — Rassurante, par exemple.
 
(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

Barouf de l'existence

 

Vivre, ça fait trop de bruit. Il faudrait faire comme la mort et opérer dans un tragique silence. Ou mieux encore, ne pas opérer du tout.
 
(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

mardi 4 avril 2023

La gênance de penser

 

S'exprimer est toujours une combine risquée. Surtout, il y a une chose à laquelle il faut faire bien attention : dans tout ce qu'on dit, dans tout ce qu'on écrit, rien, jamais, ne doit ressembler à une « pensée ». La gênance, sinon !
 
(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

Incipit sans suite

 

« Jean-Edern se fichait du tiers comme du quart. Peu lui en chalait que François eût écrit dans Je suis partout. »
 
(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

Plus stricte intimité

 

Quand on pense aux humains qu'on a véritablement aimés durant sa vie et qu'on s'aperçoit que leur nombre est égal à zéro, on se dit que notre enterrement ne va pas être encombré, même s'ils viennent tous. Heureusement, il n'y a pas que les humains, il y a aussi les chats. Les chats, c'est autre chose, il y en a qu'on a véritablement aimés. Mais les chats ne fréquentent pas les enterrements, ils trouvent ça trop « malaisant ». Sales bêtes, va !
 
(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

Un arbitrage indiscutable

 

Dans le conflit qui l'oppose au Grand Tout, le nihilique a demandé l'arbitrage des mythiques Gennaro Olivieri et Guido Pancaldi. Ainsi, pas de discussion. S'ils disent qu'il faut se pendre, on se pendra.
 
(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

lundi 3 avril 2023

Bric-à-brac spagirique

 

Le gazugre divin. Le cénotaphe scatozigreste. La vibropondeuse rhéographique. Les matrices dématérialisantes d'Argillaceus de Kelt.
 
(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

De quoi je me mêle

 

L'écrivain Paul Léautaud vivait environné de poils de chat, et quand le chanteur Léo Ferré lui demandait si c'est ainsi que les hommes vivent, il répondait : « Me casse pas les couilles, je fais ce que je veux. »
 
(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

De mal en pis

 

Plus la plaisanterie de « l'être » se prolonge, plus notre déplaisir d'exister se dilate (comme des gaz dans le ventre d'un noyé).
 
(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

Paradoxe du mérinos

 

On peut être nihilique donc penser que « rien n'est » — et pourtant, lors de la visite d'une bergerie, s'intéresser particulièrement à la tonte des mérinos. Tant l'esprit humain est complexe ! Tant l'homme est une créature pétrie de contradictions !
 
(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

dimanche 2 avril 2023

Devancement

 

« En tant qu'il est en train d'être, le Dasein s'en vient toujours déjà jusqu'à soi, c'est-à-dire qu'il est de tout son être à venir », écrit Heidegger avant de conclure par « lol mdr ptdr xD KEKW hashtag trop grave ».
 
(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

Patate de la chute

 

Épuiser sa tête dans l'ampoulé est un passe-temps en apparence assez bénin, mais gare à la patate de la chute (cf. le destin tragique du « négateur universel » Émile Cioran, frappé de démence sénile par un démiurge malfaisant).
 
(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

Une crise du Grandiloque

 

Un jour qu'il patientait dans la salle d'attente d'un médecin, le « négateur universel » Émile Cioran fut pris d'une crise d'angoisse hégélienne et se mit à gueuler : « Tout ce qui est réel est rationnel ! Tout ce qui est réel est rationnel ! » Mais au lieu d'une réaction kierkegaardienne, nietzschéenne ou gadamérienne, tout ce qu'il obtint fut : « Cet énergumène azimuté fait peur aux enfants, il faudrait lui demander de sortir de la pièce. »
 
(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

Dérivatifs

 

Parmi les « divertissements pascaliens » qui détournent l'homme du « plus important » (to timiotaton), à savoir la pensée de l'homicide de soi-même, les plus dangereux sont à coup sûr les grappes de raisin, les muses dénudées et la poésie fantaisiste.
 
(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

samedi 1 avril 2023

Rue Monsieur-le-Prince

 

Émile Cioran : Simone, qu'est-ce que tu penses de ça : le scepticisme est l'élégance de l'anxiété. Pas mal, non ?
Simone Boué : T'es jamais en retard pour dire une connerie, toi, hein ? Tiens, nettoie plutôt ces poireaux, je vais faire une tarte. Allez, dépêche, tu feras des aphorismes un autre jour.
Émile Cioran : Oh là là ! 
 
Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

Une affaire louche

 

Il paraît que Démocrite s'arracha les yeux dans un jardin pour que la contemplation de la réalité empirique ne le gêne pas. D'après Aulu-Gelle, il estimait que ses réflexions auraient plus de vigueur s'il les délivrait des entraves apportées par les charmes séducteurs de la vue. — Tout cela est bel et bon, mais pourquoi « dans un jardin » ?
 
(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

La première gorgée de taupicide (et autres plaisirs pas si minuscules que ça)

 

« Se dissoudre dans l'effervescence d'un singulier suc phrastique ; explorer chaque stupeur ainsi qu'un entonnoir ; sentir contre son oreille la truffe tiède et limoneuse du Rien... Ah ! Quel délice ! » (Les trente-trois délices de Samuel Slippensohn, Trad. de Simon Leys)
 
(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

À la porte du garage

 

Le bonheur, on passe sa vie à l'attendre à la porte du garage, mais il ne paraît pas dans sa superbe auto. Il est peut-être en panne quelque part ? Il a peut-être un problème de « joint spi » ?
 
(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

vendredi 31 mars 2023

Dans la gibecière du Grand Tout

 

Raymond Doppelchor compare le Grand Tout à une gibecière pleine de « boyaux combinards », dans laquelle l'homme est enfermé (en compagnie desdits « boyaux combinards »). Il dit que « ce n'est pas une vie d'être bouclé dans une gibecière » et que « ça schlingue, là-dedans ; ça cocotte ».
 
(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

Zoologie comparée

 

L'homme fait honte. Il est le « roi de la gênance », avec ses grimaces de contorsionniste. Le brachiopode a plus de dignité. Non seulement il ne fait pas de grimaces, mais il possède un fossé crural appelé spondylium qui lui donne de la majesté et un air de « vrai chic parisien ».
 
(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

Alpinisme métaphysique

 

À vouloir faire le mariole, à vouloir escalader à mains nues des falaises métaphysiques aussi abruptes que les Grandes Jorasses, le nihilique s'est cassé la margoulette. Il est tombé, comme le comte de Gloucester, « de l'effrayant sommet de ces bornes crayeuses ».
 
(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

Temps mort

 

On aimerait arrêter de vivre. Peut-être seulement pour quelque temps. Le temps que ça se tasse (quoi ?)
 
(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)