mardi 17 octobre 2023

Comment réussir quand on est guez et calvitié

 

Le nihilique en est persuadé : la renommée mondiale lui apporterait un confort de vie supérieur (en termes de personnes du sexe notamment). Très bien, mais comment acquérir cette renommée quand on n'a aucun talent et qu'on est partiellement calvitié ? Il a beau réfléchir, il ne voit pas. Non, vraiment, il n'a rien de remarquable, si ce n'est peut-être la taille de son armoire à pharmacie qui pourrait, sans trop d'exagération, être qualifiée de « gouldienne ».
 
(Marcel Rocabois, Le Néant et l'être)

lundi 16 octobre 2023

Suicide vs. ville la nuit

 

L'homicide de soi-même est presque aussi beau qu'une ville la nuit — presque, mais pas tout à fait car il y manque les guirlandes de lumière.
 
(Marcel Rocabois, Le Néant et l'être)

Gros dégoûtant

 

Il y a chez le monstre bipède un goût de l'excrémentitiel et une volupté du sale. Ainsi de l'historien Michelet.
 
(Marcel Rocabois, Le Néant et l'être)

Angulosité du réel perçu

 

Dans la réalité empirique, presque tout est rigide et anguleux. Il faut faire attention de ne pas se cogner si on ne veut pas attraper des hématomes (de Savoie ou autre). Quant à s'asseoir, il ne faut même pas y songer, ça pique trop boufigue.
 
(Marcel Rocabois, Le Néant et l'être)

Désespérante robustesse de la raison pure

 

En détournant le sens des mots — et notamment de ceux reginglette et zingibéracé —, le nihilique voulait mettre à bas la muraille de la raison pure, mais c'est à peine s'il a disjoint quelques blocs. Juste assez pour créer quelque fente, une cassure ça et là — « dont profitent le fraisier pendant et le dur pissenlit », comme dirait l'autre.
 
(Marcel Rocabois, Le Néant et l'être)

dimanche 15 octobre 2023

Frage nach dem Ding

 

Martin Heidegger se posait la question « Qu'est-ce qu'une chose ? » Le voyant se casser la tête, Hannah Arendt fut assez charitable pour lui dire qu'il s'agissait tout simplement d'un objet.
 
(Marcel Rocabois, Le Néant et l'être)

Le raté se parfume à la dynamite

 

Quand on a raté sa vie, on essaie de se convaincre que les autres aussi ont raté la leur ; que sa vie, on ne peut que la rater. Mais au fond de soi-même on sait que ce n'est pas vrai, on sait qu'il y a des gens dont la vie fut en tout point parfaite, par exemple l'animateur de télévision Michel Drucker (on pourrait citer aussi le comédien Roger Hanin).
 
(Marcel Rocabois, Le Néant et l'être)

Salut par le piccolo

 

Si Fernando Pessoa, au lieu de broyer du noir et d'être intranquille, avait appris à jouer du piccolo, il aurait pu agrémenter sa morne existence de quelques soli de piccolo. Ça l'aurait peut-être aidé à voir la vie en beau ? C'est joli, le son du piccolo.
 
(Marcel Rocabois, Le Néant et l'être)

Les gentils et les méchants

 

Le starets Zosime nous fait caguer. Quant à cette chochotte d'Aliocha, n'en parlons pas. En littérature, ce que nous voulons, c'est des méchants. Des méchants ! Des méchants, sinon nous étouffons !
 
(Marcel Rocabois, Le Néant et l'être)

samedi 14 octobre 2023

Un gautiériste

 

« Alors ? T'es mallarméen, il paraît ?
— Non, je suis gautiériste. Depuis que j'ai lu le Capitaine Fracasse, je ne jure plus que par Gautier. Je trouve que l’écriture gautiériste, tel un mécanisme en marche vers l’épiphanie poétique, tend à rendre l’art immanent à elle-même (à l'écriture gautiériste, c'est-à-dire). Jusqu’à l’effacement des sutures, mon vieux ! Jusqu’à ce que soient à la fois dépassés et effacés les artifices et instruments qui servaient jusqu’alors cette immixtion, jusqu’au point où “la sphère de la littérature renferme la sphère de l’art.”
— Bon diousse.
— Nous nous interrogerons ici sur le rôle de cette nostalgie picturale dans l’écriture : l’art de l’écrivain ne doit-il pas reconnaître une forte dépendance à cette nostalgie ?
— Ah, je ne sais pas, gars. J'avoue que je n'y ai jamais réfléchi. Bon, il faut que j'y aille. Alors ciao, hein ! Arrivederci !
— Ouais, aux fines herbes. »
 
(Marcel Rocabois, Le Néant et l'être)

Monsieur Teste et le réel

 

En juin 1925, à Alger, Paul Valéry reçut un coup de pied de cheval. Le « héros intellectuel national » en conçut un vif dépit et en éprouva une cuisante douleur dans les parties sacrées. D'après la princesse de Polignac, il ne décolérait pas. « Me faire ça à moi, qui ai consacré la majeure partie de mon existence à la vie de l'esprit ! »
 
(Marcel Rocabois, Le Néant et l'être)

Système avoir les foies

 

Selon Lucrèce, la peur de la mort gâche la vie. Sa théorie est qu'on n'arrive pas à profiter du moment présent — le fameux « carpe diem » — tellement on balise à l'idée de clamecer. Mais selon d'autres penseurs — dont Férillet Robert —, la vie fait déjà si peur qu'elle suffit à se gâcher elle-même.
 
(Marcel Rocabois, Le Néant et l'être)

Un affreux ratage

 

Ainsi il y eut un soir, et il y eut un matin : ce fut le sixième jour. Dieu vit tout ce qu'il avait fait et voici, cela était très guez.
 
(Marcel Rocabois, Le Néant et l'être)

vendredi 13 octobre 2023

Les routiers

 

La vie est une suite presque ininterrompue de frustrations. Rien n'est comme on le voudrait. Les garagistes de la Bourboule sont des canailles et les femmes des vipères. Il y aurait de quoi désespérer, mais heureusement il y a aussi... la philosophie de Maritain ! Le thomisme ! Pas, Bébert ?
 
(Marcel Rocabois, Le Néant et l'être)

Pires choses

 

Les Japonais ont raison de dire que parmi les choses les pires, il y a manger des fraises dans l'obscurité. Mais on pourrait citer aussi le fait d'exister — qui est assez gratiné, dans son genre.
 
(Marcel Rocabois, Le Néant et l'être)

Sans le savoir, hein ?

 

Il est presque impossible d'être heureux sans le savoir, vu qu'il est presque impossible d'être heureux en général. Le « bonheur » demande un effort quasi surhumain d'autopersuasion. Par conséquent, ceux qui prétendent avoir été heureux sans le savoir, on peut parier sans trop de risque qu'ils font les intéressants. Ils font « jore » !
 
(Marcel Rocabois, Le Néant et l'être)

Les profonds

 

Ce que le nihilique reproche à Blanchot, Bataille et consorts, ce n'est pas le lourd badigeon de leur gros style, ni même l'immondice de leurs idées ; c'est de se prendre tellement au sérieux. Mais il faut dire aussi que les gusses, ils sont profonds ! Faut voir comme !
 
(Marcel Rocabois, Le Néant et l'être)

jeudi 12 octobre 2023

Hideux dans leur apothéose

 

S'il n'y avait que les rois de la mine et du rail, pour dévaliser le travail et saigner le malheureux... Mais il y a aussi l'être. L'être !
 
(Marcel Rocabois, Le Néant et l'être)

Tournée à l'américaine

 

Englué dans la routine du quotidien, l'étant existant rêve de changement. Comme il aimerait, l'étant existant, imiter le facteur François et une fois, rien qu'une fois, faire sa tournée à l'américaine !... Mais au lieu de ça, c'est la même sempiternelle et indicible rémoulade, avec son terrible cortège de mouches bleues de la viande — et de mouches grises.
 
(Marcel Rocabois, Le Néant et l'être)

Nevermore

 

Si on savait qu'on est en train de faire telle ou telle chose pour la dernière fois de sa vie, on enverrait le truc aux chiottes. À quoi bon se fatiguer à faire une chose pour la dernière fois ? On est quand même des êtres humains, merde !
 
(Marcel Rocabois, Le Néant et l'être)

Vaines quêtes

 

L'être humain passe sa vie à chercher des choses que jamais il ne trouve : David Vincent, un raccourci ; Émile Cioran, deux robinets pour sa cuisine, « vieux modèle, hélas » ; Heidegger, ce que c'est que l'être ; Mallarmé, un mot qui rime avec Styx qui ne soit ni onyx, ni phénix, ni patafix ; tout un tas de couillons, l'amour ; et ainsi de suite. Il ne lui vient pas à l'esprit, à l'être humain, que peut-être ces choses n'existent pas. Il s'acharne, le pot de pisse !
 
(Marcel Rocabois, Le Néant et l'être)

mercredi 11 octobre 2023

Mieux vaut tard

 

Nous avons tant souffert par le simiesque Nougaro, il incarnait si bien tout ce que nous détestons chez le monstre bipède, que nous avons souhaité plus d'une fois qu'il disparaisse. Et miracle, une fois n'est pas coutume, nous avons été exaucé (ça a quand même pris un peu de temps).
 
(Marcel Rocabois, Le Néant et l'être)

Marinade existentielle

 

Comme Diogène de Sinope, le nihilique s'exerce à essuyer des échecs. Diogène le faisait en demandant l'aumône à une statue, le nihilique en demandant aux personnes du sexe si elles « marinent chez leurs harengs ».
 
(Marcel Rocabois, Le Néant et l'être)

Balnéarité du Moi

 

Pour échapper au ridicule d'être nihilique, on peut bien sûr se qualifier de balnéaire. Mais en un sens, c'est encore pis.
 
(Marcel Rocabois, Le Néant et l'être)

Fatalitas

 

On est solitaire comme on aime les choux de Bruxelles. Ce n'est pas un choix. Ça vous tombe dessus. Et dans les deux cas, ça se termine mal. Par la solitude pour le solitaire, par un largage de « caisses » pour l'amateur de choux de Bruxelles.
 
(Marcel Rocabois, Le Néant et l'être)

mardi 10 octobre 2023

Prélude à l'après-midi d'un gluon

 

Le matin, pour être prêt à assurer l'interaction forte durant le reste de la journée, le gluon ingurgite de grandes quantités de feuilles de salade ainsi que des cerneaux de noix (riches en lipides et en fibres). C'est Louis Leprince-Ringuet qui le dit, dans son ouvrage Des atomes et des hommes.
 
(Marcel Rocabois, Le Néant et l'être)

Pour cause de décès

 

Que ne pouvons-nous dîner chez les Henri de Régnier avec Francis Jammes et Chaumeix ! Nous discuterions de Gide et des protestants, ce serait d'un spirituel et d'une verve intarissables. Mais Régnier, Jammes, Chaumeix, ils sont tous « décédés », les petits sacripants.
 
(Marcel Rocabois, Le Néant et l'être)

Voracité des bêtes à Michaux

 

Être l'ami de Cioran n'était pas une sinécure. Un jour, il accusa Henri Michaux d'avoir laissé sa jument et le petit poulain de cette dernière passer dans le pré, avec comme résultat qu'il n'y avait plus de foin. Pour donner plus de poids à son accusation, il prétendit qu'il entendait le loup, le renard et la belette. Référence à Mircea Eliade et à ses « mythes » ? En tout cas, le pauvre Michaux en resta « comme deux ronds de flan ».
 
(Marcel Rocabois, Le Néant et l'être)

Congédiement de Michaux

 

« Sire, comme j'ai eu l'honneur de l'expliquer dans mon ouvrage Connaissance par les gouffres, votre Majesté signe dans ce moment la gloire de la nation et le salut de l'Europe. » L'empereur congédia Michaux d'un signe de tête.
 
(Marcel Rocabois, Le Néant et l'être)