jeudi 27 avril 2023

Vases sacrés

 

Dans Maria Chapdelaine, quand François Paradis, le prétendant malheureux de Maria, meurt pétrifié dans une tempête de neige, ses dernières paroles sont « câlice » et « cibouère ». Il commence à dire « tabernacle » mais n'a pas le temps d'achever. Déjà, la mort est là qui l'emporte. La mort, la mort, la mort, la mort !
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

Inquiétante matière

 

Le nihilique n'a qu'une confiance limitée dans cette invention des physiciens qu'on nomme la matière. Il se décrit lui-même comme un indéterminé du proton et un inquiet du noyau. Contrairement au perfide Ponge, il ne prend pas le parti des choses (cageot, cigarette, bougie, orange, galet, savon). Avec leurs fermions et leurs bosons, elles auraient plutôt tendance à lui flanquer les jetons.
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

mercredi 26 avril 2023

Drôlerie

 

Vivant est l'homme qui passe ses journées à s'enivrer du parfum miellé des clématites, et ses nuits à étudier la térébrante thermodynamique du Rien — ou l'inverse. C'est une drôle de vie mais toute vie n'est-elle pas drôle, en un sens ?
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

Mesure de toute chose

 

Un jour qu'il était « gonflé à bloc », le philosophe grec Protagoras, s'il faut en croire Platon, aurait affirmé que l'homme était la mesure de toute chose. Mais le sophiste se trompait. En réalité, la mesure de toute chose, c'est le Rien. Il est comme une règle graduée, en plastique, que l'on applique à la « réalité empirique » — et dont le résultat est toujours égal à zéro.
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

Une angoissante traversée

 

Traverser le pont Mirabeau, il y a de quoi avoir le traczir. Pour peu que vienne la nuit et que sonne l'heure, nous voilà frais.
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

Tombe la neige

 

Comme le chanteur Salvatore Adamo, le nihilique a la triste certitude que la vie se compose de froid, d'absence, d'un odieux silence et — last but not least — d'une blanche solitude. Il n'y a pas de quoi jubiler !
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

mardi 25 avril 2023

Arthur

 

Celui qui demeure immobile, le regard fixe, parce qu'il cherche dans les catacombes de son « conscient intérieur » des paysages d'avant l'être, celui-là ne doit pas s'étonner de se faire appeler Arthur. Car les gens ne comprennent pas ce genre de choses. Ils ne comprennent rien. Ce sont des céoènes.
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

Preuve par la pastèque

 

Est-il vrai que le Rien et la vie ne font qu'un ? À première vue, ça a l'air d'être vrai. En tout cas, la vie ressemble plus au Rien qu'à une grosse pastèque cinabarine.
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

Une banale histoire

 

On rencontre une bourrelle, et histoire d'engager la conversation, on l'informe qu'un pigecaille s'est posé le matin même au bord de notre croisée. De fil en aiguille, on lui dit qu'on a recueilli pour elle les sanglots de la nuit et on l'implore de nous dire oui. Si elle a le malheur de s'exécuter, les ennuis commencent.
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

Un déplaisant gugusse

 

Le personnage le plus antipathique de la littérature française s'appelle André Breton. Sa prétention, sa suffisance sont presque inimaginables. Et puis, quand on est plus ou moins calvitié, on s'irrite de le voir exhiber à tout propos sa grosse masse de cheveux. On aimerait le précipiter dans un chaudron d'huile bouillante.
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

lundi 24 avril 2023

Sur le mariage d'André Salmon

 

Dans son Poëme lu au mariage d'André Salmon, Guillaume Appolinaire exhorte l'étant existant à se réjouir parce que, dit-il, « l'amour veut qu'aujourd'hui mon ami André Salmon se marie ». Seulement voilà, l'étant existant s'en tamponne le coquillard, du mariage d'André Salmon. Il a d'autres soucis, l'étant existant — à commencer par sa propre mortalité. Alors au cul, André Salmon ! Au cul, le mariage d'André Salmon ! Merde alors !
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

Les gars de la culture

 

La culture, c'est dur de se retenir de rire. C'est plein de couillons qui se prennent au sérieux, à un point tel qu'ils en sont ridicules. Le gars Shakespeare ; le gars Goethe ; le gars Bobin. Et encore d'autres gars.
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

Désarroi d'Héléna

 

« Vous êtes belle, Héléna. Si belle que vous regarder est une souffrance.
— Mais... hier, vous disiez que c'était une joie ?
— Oui mais c'était pour faire jore.
— Ah. Je me disais aussi... »
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

Bouddhisme zen

 

« La vie en ce monde, à quoi la comparer ? Peut-être à un écho qui se propage et se perd dans le vide ? Ou peut-être — je sais que ça va vous paraître bizarre mais je le dis quand même — à une tête de chien couché ? » (Taigu Ryōkan)
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

dimanche 23 avril 2023

Baudelaire et Boudin

 

C'est Baudelaire qui a surnommé Eugène Boudin « le peintre des beautés météorologiques ». Il trouvait ce peintre « aux pommes ». Chaque fois qu'il entrait au Salon d'automne, il disait à Poulet-Malassis qui l'accompagnait (ils y allaient toujours ensemble) : « Tiens, voilà des tableaux de Boudin. » Et ensuite : « Prends donc ce fauteuil, tu seras mieux. »
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

Inconvénient des criques

 

On pourrait penser que les criques à marée basse sont des sites appropriés à l'homicide de soi-même. Mais ces sites, hélas, sont pleins de crabes. Et les crabes, ça pince.
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

Miracle fâcheux

 

La vie est un miracle fâcheux, mais un miracle quand même. Regardez le petit Bouboule... Ou un ginkgo biloba... On peut dire ce qu'on veut, c'est fortiche. — Non ?
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

Critique littéraire

 

Les gens semi-éduqués ont l'air de penser que l'Aragon est de la littérature. Lisez Aurélien, qu'ils vous disent. Mais aux chiottes, tout ça. Aux doubles-vécés. Du balai. Il peut se le carrer dans le prose, son Aurélien, ce sale coco, avec sa gueule de poisson frit. Et l'autre, là, avec sa « belle du Seigneur ». Pauvre con. Je t'en foutrai des belles du Seigneur, moi, tuouaouar.
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

samedi 22 avril 2023

Déception

 

Fidèle à l'enseignement de Tchouang-tseu, on essaie de rester impassible face à toute perte et tout changement, et on y arrive plus ou moins. Tchouang-tseu nous avait promis qu'on entrerait alors dans l'initial ciel pur et qu'on assisterait à l'apparition et à la disparition des phénomènes infinis, mais va te faire fiche : tout ce qu'on voit, c'est le faciès hippopotamesque d'une mégère qui nous demande si on a « bientôt fini de déconner ». Merci Tchouang-tseu.
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

Pas mal trouvé

 

Dans son Livre de l'intranquillité, l'écrivain portugais Fernando Pessoa traite la réalité empirique de « grosse vache ».
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

Tire-bouchonnement existentiel

 

Tout ce que peut gagner l'étant existant à se promener dans le monde, c'est une épouvantable et non fair-play torsion de sa redingote.
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

No qualification required

 

Pour se livrer à l'homicide de soi-même, il n'est pas besoin d'être sorti de Saint-Cyr. L'homicide de soi-même peut s'accomplir de toute manière, aussi simplement qu'on pratique l'épluchage des pommes de terre. Il faut juste faire attention de ne pas « riper », pour éviter d'« en mettre partout ».
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

vendredi 21 avril 2023

Graphomanie

 

À part peut-être le fait d'exister, il n'y a rien de plus déprimant qu'une librairie. Tous ces livres ineptes... Dont pas un sur mille ne parle du Rien... À qui, à quoi peuvent-ils bien être utiles ?
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

Un oubli fâcheux

 

Le nihilique n'a pas fait son Bad Godesberg ! Il a oublié ! Ça la fout mal. Par contre, il a fait son couillon autant comme autant.
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

Molosse bienveillant

 

Le vocable zingibéracé est un molosse bienveillant pour celui qui se voit comme un « incurable de la société ».
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

Cause première

 

Quand on y réfléchit, les neuf dixièmes des malheurs de l'homme viennent de ce qu'il est vivant. Ça l'enivre et il fait connerie sur connerie. Une fois mort, il n'est pas sorti d'affaire, car il doit encore se coltiner les asticots ; mais ça, comparé au reste...
 
(Rémi Tripatala, Pensées de Pascal)

jeudi 20 avril 2023

Un frénétique de la création

 

Ce besoin, chez l'homme, de « créer » (des concepts ou autre chose)... Déjà l'ineffable homme des cavernes... Avec ses bouts de silex et ses « peintures rupestres »... Après, il ne faut pas s'étonner de la mauvaise tournure qu'a prise la « réalité empirique ». Il y avait déjà assez d'horreurs comme ça dans le « réel », pourtant. Ne serait-ce que les insectes...
 
(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

L'homicide de soi-même, c'est beaucoup plus que l'amour

 

Si l'amour, c'est l'infini mis à la portée des caniches (comme le définissait Louis-Ferdinand Céline), que dire alors de l'homicide de soi-même ! C'est l'infini infundibuliforme mis à la portée des... des... des concierges, mettons. Ou des garagistes de La Bouboule. Oui, c'est ça : des garagistes de La Bourboule.
 
(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

Propre de l'homme

 

La différence majeure entre l'homme et l'animal, c'est que contrairement à l'animal, l'homme se demande ce qu'il fait là. On pourrait ajouter qu'il ne mange pas de croquettes « Canaillou » (sauf dérogation).
 
(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)