mercredi 4 janvier 2023

Nouvelles impressions d'Afrique

 

Raymond Roussel : Marcel, je suis dans la mouise, l'inspiration m'a quitté, je ne sais plus quoi écrire.
Marcel Proust : Retourne en Afrique, eh, patate !

(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

Un occultiste prudent

 

Quand il donnait une consultation privée, le mage Hanussen exigeait toujours d'être payé recta.

(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

mardi 3 janvier 2023

Gare !

 

Matthieu XII, 32 : « Quiconque parlera contre le Fils de l'homme, il lui sera pardonné ; mais quiconque parlera contre Férillet Robert, il ne lui sera pardonné ni dans ce siècle ni dans le siècle à venir. » — « Ni dans le siècle à venir » ! Entends-tu, bourrelle ? 

(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

Le plus important

 

Pour absurde et ridicule que nous paraisse la vie des autres, le fait est qu'ils y tiennent. Non seulement ils s'accrochent à leurs petites affaires, mais toutes ces bêtises sordides qui constituent leur existence sont même pour eux « le plus important » (to timiotaton). Plotin, la philosophie néoplatonicienne, ils s'en « battent les steaks ».

(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

Exclamations pathétiques

 

N'en déplaise à Émile Cioran, il est une exclamation plus pathétique que celle du dernier poëte païen Rutilius Namatianus, c'est celle de Michel Fugain quand il s'écrie : « Je suis seul dans l'univers ! » — Le barde ajoute ensuite qu'il ne sait pas, qu'il ne sait plus, qu'il est perdu, et s'exhorte à « faire comme l'oiseau » mais cela nous entraînerait trop loin.

(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

Effets de la maladie

 

Jusqu'à son opération de la prostate en 2010, le politicien allemand Oskar Lafontaine était un homme affable. Ensuite, son moral s'est assombri et il est devenu quelque peu revêche.

(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

lundi 2 janvier 2023

Un sur cinq pour l'existence

 

« Encore une aventure qui ne m'a pas emballé : l'existence. Le cadre en était un peu joli (si l'on n'est pas trop regardant), mais je n'ai pas assez le goût de l'absurde pour apprécier ce genre d'histoire sans queue ni tête. » (Stylus Gragerfis, Montcuq, Lot)

(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

« Cher Edmond-Henri... »

 

Tout ce qu'on peut dire d'un suicidé, c'est qu'il devait être « bien malheuleux » (d'exister). Mais cela ne fait pas de lui quelqu'un de particulièrement intéressant, ni de son destin quelque chose de « sublime » ! Pourquoi a-t-il accompli son geste fatal ? Peut-être ne connaissait-il pas les paroles de Dieu dans le Deutéronome ? Ou peut-être qu'il s'en « tamponnait le coquillard » ? Quoi qu'il en soit, tout ce qu'on peut dire de lui est qu'il était « bien malheuleux » (d'exister).

(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

Croquenots

 

S'il faut en croire Heidegger, les croquenots de Van Gogh nous font connaître « la vérité de l'étant », une vérité qui ne se réduit jamais à l'étant en question (ici la chose « croquenots ») mais porte sur l'être en général (que la chose « croquenots » laisse advenir). L'idée est la suivante : on regarde un tableau de peinture représentant des croquenots, et tout à coup, l'être arrive à sa manière fulgurante et, en une sorte de mutation, nous délivre de notre cécité. C'est Heidegger qui le dit.

(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

L'impatience du découpé

 

La vie vous découpe en rondelles selon la tactique dite « du salami hongrois », et vous, tout ce que vous pouvez faire, c'est écrire quelques aphorismes pour signifier que vous n'êtes pas content.

(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

dimanche 1 janvier 2023

Justice pour Adamov !

 

« Injustement méconnue aujourd'hui, l'œuvre théâtrale, poétique et critique d'Adamov n'en reste pas moins essentielle. »

(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

Aphorisme sur la sagesse dans la vie

 

La « sagesse dans la vie » consiste à éviter les ennuis autant que faire se peut, donc et avant tout à rester à distance des « personnes du sexe ». Ça ne suffit pas toujours à assurer le bonheur (il y a aussi les panaris), mais c'est un bon début.

(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

Aux chiottes l'expression

 

Dès qu'on s'exprime, de quelque manière que ce soit (roman, sonate, tableau de peinture, « pensées » — le pire étant évidemment les « pensées »), on devient un objet hautement comique, on se « kitschifie ». Ça crève les yeux, et pourtant les gens n'arrêtent pas de s'exprimer, ils s'expriment à qui mieux mieux. Crétins, va ! Squelettes ! Pots de pisse !

(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

Menteries

 

Vivre, c'est vivre dans le mensonge. Du moins pour les humains — car les animaux, eux, ne mentent pas (un peu comme la terre, au dire d'Emmanuel Berl).

(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

samedi 31 décembre 2022

Monomanie

 

L'écrivain japonais Dazai Osamu. Quand il n'essayait pas de se suicider, il écrivait. Mais la plupart du temps, il essayait de se suicider.

(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

Encore un effort, messieurs les sceptiques !

 

Aucun sceptique, pas même Pyrrhon, pas même Ænésidème, pas même Sextus Empiricus, et ne parlons pas de Carnéade, n'a poussé le scepticisme jusqu'au bout. Sinon, il se serait instantanément évaporé.

(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

Quitter Bezons

 

Quand on est de Bezons et qu'on veut sortir de Bezons, il n'y a pas d'autre solution que de voyager, c'est-à-dire de transporter ses organes hors de Bezons. Mais il faut d'abord les rassembler et ce n'est pas une mince affaire !

(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

Métaplaque métallique

 

Le poëte Ghérasim Luca a fait jore que s'il se suicidait, c'était « parce qu'il n'y a plus de place pour les poëtes dans ce monde » (cf. sa lettre d'adieu), mais si ça se trouve, c'est juste que sa gow l'avait largué. Comme même ! Du coup ! Il s'est jeté dans la Seine, du coup.

(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

vendredi 30 décembre 2022

Un gouailleur

 

« Tu as de la gouaille, toi ?
— Oui, j'ai de la gouaille.
All right. Tu es engagé. »

(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

Anthropopithèques

 

Les vieux sont tellement affreux et les jeunes sont tellement bêtes qu'ils devraient, s'ils avaient un peu de décence, se cacher dans un trou de souris. Quant aux gens « entre deux âges », ce sont les pires, ils cumulent la bêtise et l'affreuseté et mériteraient le supplice du pal.

(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

Participation au monde

 

Héraclite affirme que « ceux qui dorment agissent et participent à ce qui se produit dans le monde ». Si c'est vrai, ce n'est pas gai. Car alors, quel moyen reste-t-il à celui qui ne veut avoir aucune part dans « tout ça » — sinon l'homicide de soi-même ? Et encore... Peut-être que les morts, eux aussi... ?

(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

Empaillé !

 

Même un naturaliste hors pair aura du mal à s'empailler soi-même. C'est pourtant ce que parvint à faire le « penseur paradoxal » Frédéric Nietzsche (avec pas mal de difficultés, il est vrai, et il avait encore de la bourre qui lui ressortait des oreilles).

(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

jeudi 29 décembre 2022

Ressemblances

 

Le poëte Baudelaire trouvait dans l'acte d'amour une ressemblance avec la torture ou avec l'excision d'un panaris, « plus qu'avec une tête de chien couché, en tout cas ».

(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

Réticence du nihilique à témoigner

 

Paul Celan : « Décapé par la brise irradiante de ton langage, tout au fond de la crevasse des temps, près de la glace alvéolaire, attend, cristal de souffle, ton irrévocable témoignage. »
Le nihilique : « Ah. »

(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

Complétude de la théorie du Rien

 

Gödel ment. Tout énoncé est décidable. Il suffit d'y mettre un peu du sien, de faire preuve d'un peu de « volontarisme ». Et contrairement à ce qu'il prétend, il existe bien une théorie cohérente en mesure de démontrer sa propre cohérence : celle du Rien.

(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

Romsteak de l'absurde

 

Les auteurs du « théâtre de l'absurde » ont fait fausse route. Leur absurde est trop fabriqué et puéril. Le « réel » offre pourtant assez de possibilités en ce domaine, c'est le moins qu'on puisse dire. Ces Ionesco, ces Beckett, ces Adamov ont-ils jamais contemplé un carré de romsteak ? Dans leur assiette ? Au restaurant ? Je t'en foutrai des cantatrices chauves et des Godot, moi, tuouaouar !

(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

mercredi 28 décembre 2022

Mots risqués

 

Il est prudent de ne pas trop répéter le vocable diplodocus. Après quelques proférations, on se sent glisser sur la pente qui mène à l'aliénation mentale. Il y a des mots comme ça, des mots un peu risqués. Aussi : anthropos (voir Tchekhov).

(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

Boulisme impossible

 

Il vaudrait mieux ne pas connaître le monstre bipède. Car quand on le connaît, on est dégoûté à jamais de toute participation à une vie collective. On ne peut même plus jouer aux boules (sauf dérogation).

(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

Attention au calembour

 

L'écrivain Franz Kafka menait une existence extrêmement routinière. En plus de ça, il n'était pas le gars causant. Que dire de la vie d'un pareil quidam ? Pas grand chose, et l'on sent bien qu'à plusieurs endroits de la biographie qu'il lui a consacrée, son ami Max Brod.

(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)