mardi 21 mars 2023

Gingerbread sadness

 

Sans se prendre pour le poëte Fernando Pessoa — « Ô roues, ô engrenages, r-r-r-r-r-r-r éternel ! Violent spasme retenu des mécanismes en furie ! » —, on sent confusément que la tristesse est comme le pain d'épice, mais on est incapable d'expliquer pourquoi. La spongiosité, peut-être ? La bourrativité ?
 
(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

Spleen de Bezons

 

Quand on est de Bezons et qu'on possède une âme (ou équivalent), il est fréquent que cette âme soit, comme la poésie d'Alfonsina Storni, « voilée d'une douce et terrible noirceur » et « envahie par deux images obsédantes : la mer et la mort ». Mais la mer, à Bezons, ce n'est pas la porte à côté. Alors...
 
(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

De la certitude

 

La certitude que quelque chose existe était pour le philosophe Ludwig Wittgenstein ce que le lundi au soleil était pour le chanteur Claude François : une chose qu'on n'aura jamais.
 
(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

lundi 20 mars 2023

Appareil de Golgi

 

L'appareil de Golgi, avec ses dictyosomes et ses saccules, est le lieu de passage dans lequel les protéines et les lipides fabriqués dans le réticulum endoplasmique subissent les transformations nécessaires à leur action. Comme tous les lieux de passage (galeries, couloirs mal éclairés, boyaux), il est imprégné de cette sorte d'angoisse intérieure que produit une pérégrination étouffante. Le peintre et sculpteur Alberto Giacometti a-t-il connu de première main cette détresse née du séjour dans un appareil de Golgi ? À voir ses œuvres, on le jurerait.
 
 (Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

Aux chiottes les heureux

 

Les gens heureux n'ont aucune pudeur. Ils mériteraient le supplice du pal. Comment peut-on être heureux quand on sait ce qu'on sait et qu'on voit ce qu'on voit ? Ils n'ont pas lu la lettre de Biélinski, ces salops ? Le pal ! De suite ! Je vais t'apprendre à être heureux, moi, tuouaouar !
 
(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

Inc'oyable

 

« Quant à Férillet Robert, il dormait. » (Matthieu, 8:24)
 
(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

La vie !... « Comme même » !...

 
Ce que c'est que de nous ! Hier encore, on écrivait des aphorismes « nihiliques », on broutait l'herbe tendre du Rien, et aujourd'hui on cuit, on cuit dans la marmite de la Louise !
 
(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

dimanche 19 mars 2023

Outrance mystique

 

D'après Léon Bloy, sainte Marie Alacoque avait un tel désir de mortification qu'elle se plongeait parfois jusqu'à des trois minutes dans l'eau bouillante !
 
(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

Échappatoire

 

Pour chasser de sa pensée une mégère difforme au faciès d'hippopotame qui vous persécute incessamment, la philosophie hindoue est d'un grand recours, en particulier la Vajracchedikâ Prajnâpâramitâ où sont exposés les principes de la doctrine de la vacuité. Sa stance finale, l'une des plus belles de toute la littérature bouddhique, en exprime la quintessence sous une forme extrêmement poétique. Alors attention, hein !
 
(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

Un mensonge du Grandiloque

 

Le « négateur universel » racontait partout que son père était pope, sans doute pour donner un surcroît de piquant à sa négation. Mais des recherches menées à l'état-civil de Răşinari nous révèlent qu'Emilian Cioran, loin d'être ecclésiastique, était vétérinaire ! Il soufflait dans le derrière des chevaux ! Avec un petit tube en verre ! Pour les rendre très gros très gros (soi-disant) ! Alors en fait de pope, hein !
 
(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

Féminisation malvenue


Michel Barbier est le nouveau maire d'Eu

Même si l'édile en question était une femme, il ne faudrait pas dire « les dents de la maire d'Eu » mais « les dents du maire d'Eu » (en Normandie).
 
(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)
 
 

samedi 18 mars 2023

Pas de grandiloques à la Muette

 

Émile Cioran aimait bien Léo Malet, mais avec une pointe de jalousie. Il trouvait que Micmac moche au Boul' Mich' était supérieur à Syllogismes de l'amertume comme titre. Ça le courrouçait de ne pas y avoir pensé le premier. Ç'aurait quand même sonné moins prétentieux. Mais enfin, c'était comme ça, c'était comme ça.
 
(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

Origine impure des romans, des sonates et des tableaux de peinture

 

Tous ces romans, toutes ces sonates, tous ces tableaux de peinture, à quelle fin ont-ils été créés  ? À une seule et unique fin : promouvoir le Moi de leur auteur. — C'est effrayant, quand on y pense.
 
(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

Principe d'identité

 

À force de pratiquer le doute systématique, on en vient à se demander si Leibniz avait raison et si véritablement la capitale du Guatemala est la capitale du Guatemala (ou si elle n'est pas, par exemple, celle du Honduras).
 
(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

Husserl revisité

 

Toute conscience est conscience de quelque chose, sauf dérogation.
 
(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

vendredi 17 mars 2023

Boursouflés Unlimited

 

La passion que nourrissait le « négateur universel » Émile Cioran pour le dramaturge William Shakespeare n'est pas étonnante. Entre grandiloques...
 
(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

Dialogue philosophique


Martin Heidegger : Dis donc, Hannah, il y a une question qui me turlupine. À quoi pense-t-on quand on ne pense à rien ? À un point mathématique ? Au pape François ?
Hannah Arendt : Au pape François.
Martin Heidegger : Ah. Danke.
 
(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

Roi de la Création

 

Ouvrez un crâne au hasard, vous verrez qu'il ne contient qu'une boue visqueuse faite de fragments de poëmes, de slogans publicitaires et de bribes de chansons de Michel Fugain. Il n'y a pas de quoi être fier. Pourtant, le monstre bipède arbore un air avantageux. Il est le roi de la Création, le céoène !
 
(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

Tuouaouar

 

Les ceusses qui aiment la vie s'exclament chaque matin en s'éveillant : « Ô joie suprême ! Ô bonheur ineffable ! Nous sommes vivants ! » Et en effet ils sont vivants, les bredins. Mais ils ne paient rien pour attendre. Il y a des limites à la provocation. Tuouaouar !
 
(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

jeudi 16 mars 2023

Chasse au concept

 

« 7 octobre. Je rencontre Bergson, fusil en bandoulière. “Bonne chasse ?” Il ne répond pas mais me gratifie d'un sourire jusqu'aux oreilles, ouvre son carnier et me montre les concepts qu'il a dégommés, parmi lesquels se trouve... l'élan vital ! Je n'en crois pas mes yeux. » (Léon Brunschvicg, Journal spinoziste, Paris, Alcan, 1907)
 
(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

Comme l'oiseau

 

À la fin de sa vie, atteint de démence sénile, le « négateur universel » Émile Cioran se prenait pour un tarier pâtre. Il se posait en bout de branche et était sans cesse inquiet du ciel. Délivré depuis longtemps de la vindicte de Lucien Goldmann, il se croyait maintenant, à l'instar de la mésange, la proie des crécerelles véloces.
 
(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

Un chef-d'œuvre de grinçant

 

La vie... Tellement horrible qu'on dirait un simulacre, une parodie, une caricature croquée par le cruel Daumier.
 
(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

Le salut par le Tigron

 

Pour supporter les crises d'asthme que lui donnait le réel, il arrivait que le « négateur universel » Émile Cioran envoyât Simone à l'épicerie du coin lui acheter une ou deux bouteilles de Tigron.
 
(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

mercredi 15 mars 2023

Bisourcisme du Grandiloque

 

Bergsoniste enragé, le « négateur universel » Émile Cioran en tenait pour les deux sources.
 
(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

Tristesse du monde

 

S'il n'existait rien de plus triste, dans la « réalité empirique », qu'une fête foraine, on pourrait dire que le monde est triste comme une fête foraine. Mais il y a plus triste qu'une fête foraine, il y a... un bal de mariage. Il faudra donc dire que le monde est triste comme un bal de mariage.
 
(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

Procréation

 

Un être humain qui naît — un de plus ! —, c'est une victoire du méphitique Grand Tout. Mais ce n'est ni le lieu ni le moment d'en parler.
 
(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

Première rencontre avec le Rien

 

On est âgé de huit ans à peu près. Au milieu de la nuit, on entend du bruit dans la cuisine, on se lève et on découvre son père — son propre père ! — occupé à découper un morceau de lard rôti ! Cette terreur qui vous envahit alors, comment ne pas penser qu'elle cache quelque chose de gigantesque ? 
 
(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

mardi 14 mars 2023

Baldaquin

 

On croyait avoir regagné un semblant d'équilibre, on pensait s'être débarrassé de cette sensation d'inquiétante étrangeté devant le réel, et voilà que surgit... le mot baldaquin ! Ça ne finira donc jamais ?  
 
(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)

Pourquoi ?

 

L'homme sait ou du moins devine que l'homicide de soi-même est un puits de jouvence, mais au lieu de plonger, il reste prostré et mutique sur la margelle. Pourquoi ?  
 
(Samuel Slippensohn, Follicules palingénésiques)