« Quand j'entends le mot vivre, je sors mon revolver ou du poison. » (Luc Pulflop)
samedi 2 février 2019
L'hygiéniste parle
« Je suis le sergent d'armement Touraine et votre chef instructeur. Ici, vous n'êtes que des vrais connards, est-ce que c'est clair ?
Tous : Chef, oui, chef !
Sergent Touraine : Ici, il est interdit de boire et de fumer ! Vous devez manger cinq fruits et légumes par jour ! Vous allez durer, bande d'enfoirés ! Est-ce bien clair ?
Tous : Chef, oui, chef !
Sergent Touraine : Mon cul, je n'entend rien ! Montrez-moi que vous en avez une paire !
Tous : Nous allons durer, chef !
Sergent Touraine : C'est ça ! Sinon, vous me ferez du parcours à en crever la gueule ouverte !! Vous me ferez du parcours à en têter du p’tit lait par le fion... »
(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)
Idée fixe
Quand je me promène, insoucieux des chausse-trapes, dans le steppe interminable des heures vagues, ma morosité me ramène à ce point fixe : l'extinction des possibles.
(Luc Pulflop, Prière d'incinérer. Dégoût)
Dualisme minoen
Les scènes de défécation représentées sur les fresques de Knossos montrent bien le dualisme fondamental de la société minoenne : l'extrême élégance de l'art au service des plus nocturnes phénomènes vitaux. Tel un « boyau culier », le monde des anciens Crétois paraît être régi par des forces profondes, des impératifs dyonisiaques, des impulsions telluriques. On est loin de l'intellectualisme des Milésiens, incomparablement plus riche en fibres, solubles et insolubles !
(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)
vendredi 1 février 2019
Un moderne Fantômas
L'excrément joue, dans l'imaginaire moderne, le rôle que tenait jadis dans le roman policier le fameux « Homme-aux-verres-fumés » si bien décrit par Pierre Véry dans Les Métamorphoses : « l'empereur de l'épouvante, le maître des transformations saugrenues, celui qui modèle à volonté son visage et dont le costume, perpétuellement changeant, défie toute description ; celui à qui ne s'applique aucun signalement..., celui sur qui les balles ne portent pas, sur qui s'émoussent les lames, qui absorbe les poisons comme d'autres le lait ». — Ces quelques traits ne peignent-ils pas le « Suisse » tout entier et tout nu ?
(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)
Branle du Poitou
Indifférent au cataclysme destinal, à la tragi-comédie du devenir, comment trouvé-je encore le ressort suffisant pour bousculer le squelette vermoulu de l'historicité 1, et le mien propre ?
1. Rappelons que l'historicité « se dit du Dasein dans son avoir-à-être ».
(Luc Pulflop, Prière d'incinérer. Dégoût)
Sacralité du « cas » en Afrique
Hermann Baumann discerne dans l'ensemble des mythes africains la figure d'un démiurge guérisseur, démon de la campagne et du maquis, qui trouve habituellement sa matérialisation concrète dans l'excrément. Parmi ces dieux malodorants, on peut citer, au premier plan, Kaggen des Boschimans, Nava, des Khun, Gamab, des Heikom et des Bergmada, Hise des Naron, Huwe des Khun de l'Angola, mais il faut aussi mentionner comme leur étant étroitement apparentés Tule chez les Azande, Tere chez les Banda, Mba chez les Babua, Nvene chez les Mogwandi, Azapane chez les Mangbetou et Leh chez les Barambo, participant dans une mesure variable de deux types extrêmes particulièrement nets : Kaggen, l'étron fuselé — le « cigare japonais » — qu'adorent les Boschimans, et Ananse, l'excrément en forme de tourte vénéré par les Aschanti, à l'ouest du Soudan.
(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)
Rien n'arrive (sauf la mort)
Heureux celui qui, comme Schopenhauer, pense que seul le pire arrive. En fait, rien n'arrive : c'est toujours l'ennui, le vide, la léthargie, à perte de vue...
(Luc Pulflop, Prière d'incinérer. Dégoût)
jeudi 31 janvier 2019
Dévitalisation
L'assimilation au Rien vers laquelle tend le suicidé philosophique s'accompagne obligatoirement d'une diminution du sentiment de la personnalité et de la vie. Le suicidé philosophique mime le minéral — schiste, gneiss, feldspath, grauwacke selon les cas — et dissimule ou abandonne ses fonctions de relations. La vie recule d'un degré.
(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)
Apostrophe au Mômo
Le souffle du pachynihil congèle la pensée, précipitant la stratification puis l'érosion de l'esprit. Pas vrai Artaud ?
(Luc Pulflop, Prière d'incinérer. Dégoût)
Monarque temporaire
Il semble bien qu'il faille reconnaître dans l'excrément un exemple du monarque temporaire, prêtre, sorcier et dieu tout ensemble, si bien défini et illustré par Frazer. Les témoignages de Platon, de Strabon et de Denys d'Halicarnasse se laissent aisément interpréter à cette lumière.
(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)
mercredi 30 janvier 2019
Avant-dernier refuge
Las de l'inanité d'une existence convulsive, mastiquer les filandreuses fougères de l'aliénation mentale.
(Luc Pulflop, Prière d'incinérer. Dégoût)
Espace noir
À la question : « où êtes-vous ? », les suicidés philosophiques répondent invariablement : « je sais où je suis, mais je ne me sens pas à l'endroit où je me trouve. ». L'espace semble à ces esprits dépossédés une puissance dévoratrice qui les poursuit, les cerne, et les digère en une phagocytose géante. À la fin, il les remplace. C'est ce qui arriva au poëte lausannois Edmond-Henri Crisinel, dit « le Nerval vaudois ». Le 25 septembre 1948, se sentant devenir « de l'espace noir, où l'on ne peut mettre de choses », il choisit de se donner la mort en se jetant dans le lac Léman.
(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)
Ça commence bien...
Clinique du Grand Rien, deux heures de l'après-midi. J'attends mon tour dans une atmosphère d'éther et de crachats, recroquevillé sur une chaise en fer qui me brûle l'échine. Diable ! Que la vie s'annonce glaciale !
(Luc Pulflop, Prière d'incinérer. Dégoût)
mardi 29 janvier 2019
Jettatura
Le nom de stercoris, prophète, que les anciens ont donné à l'excrément, est significatif. Son apparition annoncerait la famine, sa sinistre teinte un malheur à toutes les créatures qu'il dévisage. Aristarque rapporte qu'on lui attribuait le mauvais œil. On emploie son nom pour désigner les gens insolents. À Rome, son pouvoir magique était très connu : si quelqu'un tombait malade, on lui disait : « l'excrément t'a regardé ». Il paraît même avoir joué un rôle religieux défini : il figure en effet sur une monnaie proserpinienne, à côté de l'épi sacré des Mystères d'Éleusis. Dioscoride enfin rapporte qu'on l'utilisait comme médicament.
(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)
Commissoire
Commissoire ! Telle est une clause dont l'inexécution annule l'acte qui la contient : pacte commissoire. Concluons un pacte commissoire avec le Grand Rien.
(Luc Pulflop, Prière d'incinérer. Dégoût)
Catalepsie
Des attitudes cataleptiques aident parfois le suicidé philosophique à rejoindre le règne minéral, ou à défaut le végétal : immobilité du poëte vaudois Edmond-Henri Crisinel, tandis que le philosophe Weininger laisse pendre ses longs bras, sans parler de la rigidité d'un Albert Caraco qui évoque à certains égards la contracture hystérique. Inversement, le balancement machinal de l'écrivain dadaïste Jacques Rigaut n'est-il pas comparable à un tic ?
(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)
lundi 28 janvier 2019
Baciccia
Baciccia se distingue par sa pénétration psychologique et un accent de cordialité qui révèle la familiarité du peintre avec le milieu papal.
(Luc Pulflop, Prière d'incinérer. Dégoût)
Vieille feuille
À force d'acharnement, la jankélévitchienne « temporalité du temps » finit par donner au Dasein des allures de vieille feuille. « On ne saurait mieux marquer le caractère foncièrement déficient, tourné vers l'immobilité et le retour à l'inorganique, qui me paraît l'essentiel de ce processus mortel qu'on nomme la vie », note à ce sujet Gragerfis dans son Journal d'un cénobite mondain.
(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)
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