« Quand j'entends le mot vivre, je sors mon revolver ou du poison. » (Luc Pulflop)
lundi 25 février 2019
Un dangereux pharmakon
C'est du jus de pruneau, ou à défaut de la rhubarbe, que le constipé attend tout secours et toute réussite. Le respect qu'il témoigne au purgatif est fait à la fois de terreur et de confiance. De terreur, car sous sa forme élémentaire, il représente avant tout une énergie dangereuse, incompréhensible, malaisément maniable. Pour qui décide d'y avoir recours, le problème consiste à capter sa puissance et à l'utiliser au mieux de ses intérêts, tout en se protégeant des risques inhérents à l'emploi d'une force si difficile à maîtriser. Un organisme non préparé ne peut supporter un tel transfert d'énergie : le corps du patient enfle, ses articulations se raidissent, se retournent, se brisent, sa chair se décompose, il meurt bientôt de langueur ou de convulsions.
(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)
Action délétère du pachynihil
Ma férocité, mes contorsions, mon esseulement, viennent des vibrations concertantes du Rien en mon intérieur frit.
(Lucc Puflop, Prière d'incinérer. Dégoût)
Page de journal
5 février. — « Ô superbe sauvagerie de l'incurable hypocondrie ! »
(Barzelus Foukizarian, Journal ontologique critique)
Désacrement du « cas »
Déféquer, c'est replacer l'excrément dans la communauté profane, en le débarrassant de son caractère sacré, en le désacrant, comme le remarquait déjà Joseph de Maistre.
(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)
Onguent de Lémery
25 juillet. — « Onguent de Lémery pour la brûlure. Émier quatre onces de pelotes de fiente de cheval récemment faites ; les mêler avec douze onces de graisse de porc dans une poêle, fricasser le mélange sur un feu modéré pendant environ un quart d'heure, remuant toujours la matière avec une spatule, puis la couler toute chaude, l'exprimant fortement au travers d'une forte toile, laisser refroidir la colature, et l'onguent est fait.
Nota. Si on n'a point de graisse de porc, faire cuire, comme il est dit ci-dessus, la fiente de cheval fraîche, avec égal poids d'huile de noix ; et faire le reste comme dessus; cette huile ainsi préparée est aussi bonne que l'onguent. »
(Dictionnaire botanique et pharmaceutique, Paris, J.-F. Bastien, 1802)
(Barzelus Foukizarian, Journal ontologique critique)
dimanche 24 février 2019
Esthétisme fécal
« Je me persuade que voici l'une des consignes fondamentales de toute pratique défécatoire tant soit peu ambitieuse : du banal, tirer l'inimitable. Au reste, il n'est pas de tâche plus malaisée. » (Edmond Chassagnol, Théorie du trop-plein)
(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)
Difficulté de dire le Rien
Comment débusquer les gouleyants phonèmes propres à dire le coulis essentiel du pachynihil ?
(Luc Pulflop, Prière d'incinérer. Dégoût)
Un quadrupède salace
26 juillet. — « Le bouc est le plus salace des quadrupèdes, et le plus porté à la reproduction. En effet, il s'accouple avec les femelles de tous les quadrupèdes, si on le laisse faire, et même avec les volatiles, comme je l'ai vu faire à un petit bouc du Cap. La dinde qu'il vouloit saillir ne se refusoit pas à ses caresses. » (Gian Rinaldo Carli, Lettres américaines, Paris, Buisson, 1788)
(Barzelus Foukizarian, Journal ontologique critique)
Déréliction
Nul mieux que Sophocle n'a peint l'expérience de la solitude absolue : elle s'incarne dans le personnage du « Suisse » abandonné par Ajax sur le rivage désert de Salamine, après que le héros a laissé sa compagne Tecmesse pour aller — selon ses dires — « se purifier » derrière un buisson.
(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)
samedi 23 février 2019
Computation
La computation est, comme le suicide, une méthode de supputation du temps.
(Luc Pulflop, Prière d'incinérer. Dégoût)
Almanach
29 juillet. — Le dix-septième jour de la lune est très heureux pour planter la vigne et pour dompter les bœufs.
(Barzelus Foukizarian, Journal ontologique critique)
Projet de roman
Au terme de son cheminement douloureux dans le « désert de Gobi de l'existence », l'homme du nihil ne trouve que solitude, déréliction et angoisse. Son ultime rencontre avec Irène, loin de marquer, comme pour Violaine et Jacques, la détente heureuse dans la confidence d'un amour sacrifié mais toujours vivace, porte au paroxysme de la cruauté le sacrifice qu'il s'impose sans le consommer jamais totalement.
(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)
Pyrrhonisme exacerbé
Je ne puis croire à l'existence de ce prosateur lyrique qu'on nomme Luc Pulflop.
(Luc Pulflop, Prière d'incinérer. Dégoût)
Zorra
28 juillet. — On admet communément sur les côtes des Asturies que les vagues se succèdent dans un ordre invariable et l'on croit dans plusieurs ports que la dixième est plus impétueuse que les autres. À Colunga c'est la neuvième et on la nomme Zorra.
(Barzelus Foukizarian, Journal ontologique critique)
vendredi 22 février 2019
Caractère tabou du « Suisse »
Le tabou qui, dans les diverses sociétés humaines, a toujours entouré l'excrément, correspond parfaitement à la définition que donne Durkheim de ce mot. « On appelle tabou, écrit-il, un ensemble d'interdictions rituelles qui ont pour effet de prévenir les dangereux effets d'une contagion magique en empêchant tout contact entre une chose ou une catégorie de choses, où est censé résider un principe surnaturel, et d'autres qui n'ont pas ce même caractère ou qui ne l'ont pas au même degré. » — Dans le cas du « Suisse », le tabou est destiné à maintenir l'intégrité du monde organisé et en même temps la bonne santé physique et morale du Dasein condamné à expulser de moment en moment des matières fécales. Il empêche celui-ci de mourir et celui-là de retourner à l'état chaotique et fluidique, sans forme et sans repos, qui était le sien avant que les dieux créateurs fussent venus y apporter l'ordre, la mesure et un assortiment d'aliments riches en fibres solubles et insolubles : choux-fleurs, épinards, navets, haricots verts, asperges, etc.
(Théasar du Jin, Carnets du misantthrope)
Aux chiottes Hegel !
La dialectique ? Nous ne goûtons point ces effusions de gerfaut moderato.
(Luc Pulflop, Prière d'incinérer. Dégoût)
Prêle fluviatile
30 juillet. — « La presle fluviatile a la tige striée et les feuilles presque simples. Elle croît sur le bord des rivières et des étangs dont l'eau est vive. Les Romains mangeoient, et encore actuellement les Toscans se nourrissent des jeunes sommités de cette plante. On les fait cuire et on les assaisonne comme les asperges. » (Nouveau dictionnaire d'histoire naturelle, Tome XVIII, Paris, Deterville, 1803)
(Barzelus Foukizarian, Journal ontologique critique)
Vérification expérimentale
« En Amérique Latine, particulièrement aux carnavals de Rio de Janeiro et de Vera-Cruz, où pendant une grande semaine toute la population d'une ville et des environs se mêle, chante et danse, s'agite et expulse des excréments dans une effervescence presque ininterrompue, j'ai pu constater que ma description de l'acte défécatoire, loin d'être chimérique, correspondait pour l'essentiel à des réalités encore vivaces et observables, bien que visiblement en décadence à cause des nécessités de la vie urbaine contemporaine. » (Edmond Chassagnol, Théorie du trop-plein)
(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)
jeudi 21 février 2019
Bucolisme pachynihilique
Dans l'ample pénéplaine du Rien, où j'erre en quête de fruits suaves, poussent, tapissant interfluves et talwegs, le fameux sabot-de-vénus, le cattleya, et même l'orpin.
(Luc Pulflop, Prière d'incinérer. Dégoût)
Sac du céphalopode
23 juillet. — « Le corps du polype étant organisé sur le type de celui des céphalopodes de grand calibre, des poulpes, des seiches, des calmars, le fourreau dans lequel il naît enveloppé, et dont il est la continuation, même après son ossification complète, ne saurait rencontrer un analogue plus frappant que dans le sac du céphalopode, grande enveloppe dont le céphalopode est la continuation, et qui en emprisonne toute la moitié inférieure. Ce sac, il est vrai, ne s'ossifie jamais et ne se transforme jamais en coquille dans les trois genres que nous venons de citer ; mais il devient coquille chez l'argonaute, comme le manteau membraneux de la limace devient coquille chez le colimaçon, comme le fourreau calcaire du polypier des corallines reste cartilagineux chez l'alcyonelle et chez les gorgones ; et cela par la seule ossification d'un organe externe, par la seule incrustation calcaire du réseau lymphatique, qui circule autour de toutes les petites cellules du tissu. Les céphalopodes sont donc des polypes isolés, comme la plupart des polypes sont des céphalopodes ramifiés. » (François-Vincent Raspail, Nouveau système de chimie organique, Paris, J.-B. Baillière, 1833)
(Barzelus Foukizarian, Journal ontologique critique)
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