Le chanteur Serge Lama, pour ne pas rester « seul avec son
désespoir », se plonge dans l'Océanographie du Rien de Raymond
Doppelchor.
« Quand j'entends le mot vivre, je sors mon revolver ou du poison. » (Luc Pulflop)
dimanche 10 octobre 2021
samedi 9 octobre 2021
Lunatisme gidien du nihilique
Une immense pitié et
un immense dégoût : voilà les sentiments qu'inspire le « monstre bipède »
à l'homme du nihil. Un jour c'est la pitié qui l'emporte, un autre jour
le dégoût — selon qu'il y a de la lune ou qu'il n'y en a pas.
(Fernand Delaunay, Glomérules)
mercredi 6 octobre 2021
Consolation par le vocable
Rien ne nous console de
la misère d'exister, si ce n'est la beauté de vocables tels que
reginglette et forcipressure dont la folle poignance nous fait « entrevoir l'essentiel » (comme dirait Cioran).
(Fernand Delaunay, Glomérules)
mardi 5 octobre 2021
Puanteur
Le nihilique transporte
partout avec soi le cadavre de la réalité empirique, et comme ce dernier
finit par sentir, on ne l'invite plus dans les coquetèles — mais le
nihilique, qui s'est habitué à l'odeur, ne comprend pas pourquoi.
(Fernand Delaunay, Glomérules)
lundi 4 octobre 2021
Chimie organique et homicide de soi-même
Le chimiste Kekulé von Stradonitz, connu pour avoir découvert la formule développée du benzène, nécessite une solide enquête.
(Fernand Delaunay, Glomérules)
dimanche 3 octobre 2021
Interprétations divergentes
Lao
Tseu prétend que la solitude est une prison. Mais Gragerfis dit qu'il se
trompe et que c'est plutôt une tête de chien couché.
(Fernand Delaunay, Glomérules)
jeudi 30 septembre 2021
Un vocable pernicieux
« Ah ! Monsieur, on ne se
méfiera jamais assez du vocable zingibéracé. Il prépare immanquablement
le règne de la confusion, de l'anarchie, et de toutes les déviations
mentales et sentimentales. » (Marcel Aymé, Le Confort intellectuel, 1949)
(Fernand Delaunay, Glomérules)
(Fernand Delaunay, Glomérules)
mercredi 29 septembre 2021
Un démiurge sarcastique
Dieu créa l'homme du nihil
et, ne le trouvant pas assez seul, il créa le « monstre bipède » pour lui
faire mieux sentir sa solitude.
(Fernand Delaunay, Glomérules)
samedi 25 septembre 2021
Genèse
Au commencement était le
verbe acerchier (qui signifie parcourir, fouiller, chercher). Puis
vinrent quelques adjectifs : gloméruleux, exophtalmique, zingibéracé...
Enfin parut le vocable reginglette : les jeux étaient faits, rien
n'allait plus.
(Fernand Delaunay, Glomérules)
vendredi 24 septembre 2021
Déchéance
On a trente ans, puis quarante, puis
cinquante, etc., et on se transforme insensiblement en « vieux jeton ».
C'est intolérable, il y a de quoi devenir maboul, mais personne ne dit
rien. Tout le monde fait « jore ». Oh, bon Dieu !
(Fernand Delaunay, Glomérules)
jeudi 23 septembre 2021
Bon à rien
Pour agir, il faut une forte dose de
fatuité. Un homme sans prétention — un homme « à la bonne franquette »,
qui ne brigue pas le titre glorieux de « Dasein », un homme dans le genre
de celui dit « du nihil » — n'est bon à rien. Ou plutôt, il n'est bon à presque rien — car il peut toujours ratiociner sur l'haeccéité, la
temporalité du temps, la mortalité de l'être mortel, et cetera, et ça,
ce n'est pas exactement « rien ».
(Fernand Delaunay, Glomérules)
mercredi 22 septembre 2021
What the world needs now
L'homme n'est pas fait
pour vivre longtemps : il est vite corrompu par la « réalité empirique »
et son hideux cortège de « phénomènes ». Le monde n'a besoin que de
jeunesse et de suicidés philosophiques.
(Fernand Delaunay, Glomérules)
mardi 21 septembre 2021
La paix maintenant
Avez-vous
jamais essayé de convaincre une bourrelle de sa vilenie ? Impossible,
direz-vous. Et ça l'est en effet. Ce que l'on peut faire, en revanche,
c'est mettre un terme définitif à la vilenie de ladite bourrelle en
l'amenant à avaler du taupicide. Pour y parvenir, la technique consiste à
lui tirer l'oreille pour l'obliger à desserrer la mâchoire. La
bourrelle ne récrimine guère, c'est tout juste si elle maugrée
vaguement, heureuse de s'en tirer à si bon compte. Son éloquence ravalée
avec le pharmakon, elle n'émet que des borborygmes avant de se taire à
jamais.
(Fernand Delaunay, Glomérules)
lundi 20 septembre 2021
Contamination langagière
D'après Gragerfis
(Journal d'un cénobite mondain), l'homme du nihil, de retour d'un bref
séjour à Bondy (Seine-Saint-Denis), montrait un comportement des plus
bizarres. Il accusait le réel de le « mal regarder », il lui intimait
l'ordre de « baisser les yeux », et quand le réel s'exécutait, il
s'écriait : « Voilà ! »
(Fernand Delaunay, Glomérules)
mercredi 15 septembre 2021
Prière
Les êtres nobles aiment
rarement la vie, ils lui préfèrent le pachynihil. Ceux qui se contentent
de la vie et se livrent avec délices à de coupables exsufflations sont
toujours des ignobles. Seigneur ! épargnez-nous de ressembler à
l'affreux « monstre bipède » !
(Fernand Delaunay, Glomérules)
lundi 13 septembre 2021
Agression chosesque
On se croit
complètement désabusé, on pense s'attendre à tout, être revenu de tout,
quand soudain surgit... une théière ! Oh, bon Dieu !
(Fernand Delaunay, Glomérules)
dimanche 12 septembre 2021
Un imposteur
Considérez un homme
taraudé incessamment par l'idée du Rien. Pouvez-vous l'imaginer un seul
instant se livrer au canotage ? Non. Bien sûr que non. Pourtant, le
satiriste roumain Emil Cioran, qui passe pour le champion toutes
catégories de la désespérance nihilique, écrit (dans ses Aveux et
anathèmes) : « Étang de Soustons, deux heures de l'après-midi. Je
ramais. » Je RAMAIS ! — Conclusion ?
(Fernand Delaunay, Glomérules)
(Fernand Delaunay, Glomérules)
samedi 11 septembre 2021
Aux chiottes les phénomènes
« Le
réel est un salop et je le crèverai » aurait déclaré le « penseur privé »
Robert Férillet au phénoménologue Edmond Husserl au cours d'une
réception pour les soixante-dix ans de ce dernier. Avant d'ajouter : « Aux chiottes, les phénomènes ! » — D'après Karl Jaspers qui assistait à
la scène, le philosophe en resta « comme deux ronds de frite ».
(Fernand Delaunay, Glomérules)
vendredi 10 septembre 2021
Synthèse
Pour qui sait lire entre les lignes, tout
ouvrage de littérature peut se résumer en une phrase : « Untel est un
salop et je le crèverai. » Shakespeare, Cervantes, Dostoïevski, Flaubert,
et avec eux tous les écrivains depuis l'Antiquité, n'ont finalement
écrit que cela : « Untel est un salop et je le crèverai. »
(Fernand Delaunay, Glomérules)
jeudi 9 septembre 2021
Accumulation d'opprobres
Comme si
l'haeccéité, la temporalité du temps, la mortalité de l'être mortel ne
suffisaient pas à son malheur, l'homme du nihil habite encore dans des « territoires » situés dans la « France périphérique » et est un « perdant de
la mondialisation » (comme l'écrivain portugais Fernando Pessoa, for
that matter).
(Fernand Delaunay, Glomérules)
(Fernand Delaunay, Glomérules)
dimanche 5 septembre 2021
Réminiscences littéraires
Confronté à la vilenie, à
la bassesse, à la méchanceté pharamineuse d'une bourrelle qui l'a trahi
après l'avoir tourmenté jusqu'à le faire tourner en bourrique, l'homme
du nihil ne peut que s'exclamer, comme le rêveur de la fiction de
Jean-Paul (la Nuit du nouvel an) : « Vieille bique ! Va te faire voir
chez Plumeau ! » Et encore (un ajout de son cru) : « Carogne ! »
(Fernand Delaunay, Glomérules)
vendredi 3 septembre 2021
Persécuté
Quand on lui demande pourquoi il pense
que le réel lui en veut personnellement, l'homme du nihil mentionne
ordinairement « les emballages à ouverture dite facile ». Mais il dispose
de pléthore d'autres preuves !
(Fernand Delaunay, Glomérules)
dimanche 29 août 2021
Anywhere out of this world
« Mon royaume, mon royaume 1 pour un cheval-vélo ! »
1. Ce que l'homme du nihil nomme son « royaume » n'est rien autre chose que... le Rien (le pachynihil). Mais oui ! (NdE)
(Fernand Delaunay, Glomérules)
1. Ce que l'homme du nihil nomme son « royaume » n'est rien autre chose que... le Rien (le pachynihil). Mais oui ! (NdE)
(Fernand Delaunay, Glomérules)
mardi 24 août 2021
Intentionnalité anticipatrice
Conscient
des dangers de l'intentionnalité anticipatrice husserlienne, l'homme du
nihil se garde de concevoir aucun projet grandiose. Celui d'aller faire
les courses est déjà assez formidable pour lui, et il s'en passerait
avec joie, mais, comme l'a dit René Char 1, « il faut bien becqueter »...
1. Dans un entretien avec Aimé Césaire.
(Fernand Delaunay, Glomérules)
1. Dans un entretien avec Aimé Césaire.
(Fernand Delaunay, Glomérules)
lundi 23 août 2021
Auto-radicalisation
Quoi de plus
radical que la pensée que rien n'est ? Mais ici, attention : ce n'est
pas dans une mosquée de la rue Jean-Pierre Timbaud que l'homme du nihil
s'est radicalisé — il ne croit pas à ces deux abstractions (mosquée,
rue Jean-Pierre Timbaud), chères au démagogue. Il l'a fait simplement en
constatant que la prétendue « réalité empirique » n'est qu'une masse
duveteuse, inconsistante, un agrégat d'atomes qui se dispersent comme
une fumée dès qu'on prononce devant eux le vocable reginglette.
(Fernand Delaunay, Glomérules)
mercredi 18 août 2021
Bilan
Quand l'homme du nihil fait le
bilan de sa fastidieuse épopée dans le « désert de Gobi de l'existence »,
l'expression qui lui vient à l'esprit est « une vie pour rien ». Il a beau
refaire l'addition, le total est toujours égal à zéro. Mais pourquoi te
frapper, homme du nihil ? Tu sais bien, et depuis longtemps, que toute
vie est « pour rien », non ? — Si, si... je le sais, mais... c'est tout
de même un peu fort de café !
(Fernand Delaunay, Glomérules)
mardi 17 août 2021
Empaillé !
À le voir marcher,
parler, se gratter le nez, et cetera, on jurerait que l'homme du nihil
est un être vivant, mais non : il est mort depuis belle lurette. Selon
Gragerfis, s'il a l'air si vivant, c'est sans doute qu'il a été « naturalisé par Chuck Testa ».
(Fernand Delaunay, Glomérules)
samedi 14 août 2021
Inconscience coupable
Rigaut, Essénine, Crevel,
Garchine, Maïakovski, Crisinel... Cent pour cent des suicidés
philosophiques n'étaient pas vaccinés (contre l'odiosité de
l'existence).
(Fernand Delaunay, Glomérules)
vendredi 13 août 2021
Haeccéité et taupicide
Dans son ouvrage intitulé
L'Alternative, le philosophe Jankélévitch, avec sa perspicacité
habituelle, note qu'« être, c'est encore être ceci ou cela, n'être que
ceci ou que cela, selon certaines circonstances de temps et de lieu qui,
en nous assignant une place dans l'étendue et une date dans la durée,
nous empêchent d'être tout le monde, d'être partout, d'être aujourd'hui
et hier à la fois ». Rien n'est plus vrai et c'est bien cela qui, pour
l'homme du nihil, constitue la torture suprême, c'est bien cela qui,
dans l'être, lui paraît intolérable car exorbitamment grotesque. Et
quand Jankélévitch ajoute qu'« ici il faut choisir : ou être en fait, et
n'être que ce que l'on est, ou être infiniment, à condition de n'être
plus rien », l'homme du nihil ne peut que souscrire à cet éloge discret
du taupicide.
(Fernand Delaunay, Glomérules)
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