On
n'aime pas son Moi, on l'exècre même, mais on aime encore moins celui
des autres. Si minable soit-il, le nôtre a du moins la décence de ne pas
prendre toute la place avec ses gros genoux.
Avec
l'autrui lévinassien, on n'est jamais déçu. Est-on derrière lui dans
une file d'attente, on peut être sûr qu'il va engager la conversation — il va « tailler une bavette » — avec l'employé au guichet. Il se
fiche complètement qu'il y ait des gens après lui qui attendent. C'est
un vilain mâtin.
Il
y a des moments dans la vie où l'on n'aimerait rien tant que d'aller
devant le palais de justice de Troyes et de hurler à s'en faire éclater
les poumons : « À mort, Buffet ! À mort, Bontems ! Vous allez crever,
bande de salops ! Et ce sera bien fait pour votre gueule ! Pots de pisse ! Euh... affreux ! » Si on ne le fait pas, c'est pour l'unique raison
qu'on n'aime pas se donner en spectacle. Mais ça nous soulagerait. Car
l'existence nous pèse.
Le
monstre bipède est désespérément prévisible. Même les moines zen sont
prévisibles dans leur imprévisibilité. Et le pis, c'est qu'ils se
croient malins, ces trous de balle, quand ils disent que le Bouddha est
un navet de deux livres acheté au marché de Chaozhou. Nous t'en foutrons
des navets de deux livres, nous, tuouaouar ! Dans le fiak, oui !
Le
personnalisme, qu'il soit berdiaévien ou mouniérien, met en lumière la
notion de personne, l'expérience que ladite personne fait de son être,
sa rencontre avec les autres, sa transcendance, sa subjectivité et sa
liberté. En résumé, que des trucs « guez ».
Réagir
à des stimuli, c'est toute la vie du monstre bipède. Ôtez-lui ses
stimuli, il n'y a plus personne. Il nous fait penser à un animal-machine
de René Descartes, le gusse.
Si
vous voulez sauver Bébert (le neveu de la concierge), vous devez aller
chercher conseil auprès d'un grand spécialiste de la typhoïde, le
docteur Parapine. C'est la leçon du Voyage au bout de la nuit. Bébert
mourra mais vous aurez vu Parapine.
L'abbé
Protiste du Voyage au bout de la nuit est un ecclésiastique eucaryote à
organisation cellulaire dite simple. Ce n'est ni un animal, ni un
champignon, ni une plante. Cet abbé célinien constituait, en
classification classique, le quatrième règne des eucaryotes, mais comme
ce regroupement est paraphylétique, ce taxon n'est en fait pas valide.
Celui
qui soutient que le risque zéro n'existe pas doit en être récompensé
d'un bon coup sur le cassis. Cela le confirmera dans sa conviction mais
nous soulagera quelque peu. Que de bêtises il ne faut pas entendre, dans
ce « monde de néant » ! Le risque zéro existe ! Il suffit de rester seul
dans sa chambre à ne rien faire, allongé et gémissant. Quel est le
risque, alors ? Un effondrement du plafond ? Une myocardite ? Allons
donc !
Le
blanchotiste est batailleur mais la réciproque n'est pas vraie. Quant
au zélateur de Klossowski, c'est autre chose, lui renaît tout simplement
des forêts. Drôle de gars... et tant pis, con !
La
légende dit que Démocrite s'est arraché les yeux pour pouvoir penser
tranquille — sans être distrait par la « réalité empirique » — mais
qu'il a été « déçu du voyage ». Il n'aurait jamais cru que la pensée
puisse être aussi guez. Et c'est vrai qu'on pense toujours aux mêmes
choses, plus ou moins. À aller acheter une boule de campagne à la
boulange... Au pronom zibun en japonais... Pas de quoi s'arracher les
yeux. Mais enfin, ça ou autre chose...
Nous
ne voulons pas donner de conseils, mais si nous en avions un à donner à
l'écrivain René Étiemble, ce serait de se faire appeler simplement
Étiemble. Car René Étiemble, ça ne sonne pas bien.
Ô
Grandiloque ! Grandiloque des Carpates ! Nous auras-tu assez désopilé
avec tes aveux, tes anathèmes, tes larmes et tes saints ! Tu étais un
vrai « roi de la déconne », toi, hein ? Oh là là !
Malgré
tout notre bon vouloir, il nous est impossible de lire des livres
mettant en scène des personnages affublés de noms aussi absurdement
ridicules que Fabrice del Dongo ou Charles de Beauvoisis. Nous pouvons
accepter sans difficulté Ernest Grafouillères ou Jean-Marie Laprune,
mais pas Fabrice del Dongo ni Charles de Beauvoisis. De tels noms nous
courroucent. Et comment lire quand on est courroucé ?
Quand
vous entendez certains acronymes, c'est un peu comme quand vous
boulottez une madeleine : votre enfance resurgit. Ainsi de la Cidunati
(de Gérard Nicoud) et du CNPF (de François Ceyrac et d'Yvon Gattaz).
L'autrui
lévinassien ressemble à un sépulcre blanchi. Au-dehors il fait bonne
figure — du moins il essaie —, mais au-dedans, il est plein
d'ossements et de toute espèce d'impuretés. Par-dessus le marché, c'est
un vrai pot de pisse.
De
nombreux indices laissent à penser que cette bourgade de la Manche dont
Cervantes ne veut pas se rappeler le nom n'est autre que Saint-Lô. Ce
n'est pas absolument certain, cependant. Car il y a aussi des éléments
qui ne collent pas : l'intrigue a l'air de se passer en Espagne, et
cætera.
Vous
croyez peut-être qu'il n'est pas possible d'avoir pour seule « raison
d'être » de dénigrer — le monde, la mer, les forêts ; les roses que
l'hiver prépare en secret —, mais nous pouvons vous assurer que si. Ce
n'est pas une vie, mais c'en est une quand même.
Le
Rien est un pari, et comme tout pari il présente une part de risque.
Si, avant de clamecer, on s'aperçoit qu'en réalité il y avait de l'être,
on va l'avoir sec. Mais on va sûrement l'avoir sec de toute façon. Et
puis, qu'aurait-on fait de différent, si on avait su pour cet être ?
Rien, probablement... L'être... Il n'y a pas de quoi se taper le cul par
terre, quand on y réfléchit.
Dans
la vie, finalement, la seule chose amusante est le vocable zingibéracé.
Peut-être aussi, dans une moindre mesure, celui hystricognathe. Le
reste... c'est plutôt lugubre. — Deux mots... Il n'y a pas de quoi
pavoiser.