jeudi 6 mars 2025

Une sacrée prouesse

 

« Arriver à combiner, comme Claude Simon, la créativité du poëte avec une conscience profonde du temps dans la représentation de la condition humaine, c'est ça qui serait choucard. Pas, Dédé ?
— Ouais, sûr. »
 
(Gilbert Garistre, Aveux et anatropes)

Plus fort que Nizan

 

Nous ne laisserons personne dire, premièrement, que vingt ans est le plus bel âge de la vie, deuxièmement, que Jan Lechoń « l'altissimo » est le plus grand poëte de tous les temps. Si quelqu'un dit l'une ou l'autre chose, ça va barder.
 
(Gilbert Garistre, Aveux et anatropes)

Un apéro indiscutable

 

Le guignolet est selon Kant un apéritif qui ne souffre pas d'objection ; un apéritif sans condition ni alternative, pour tout dire catégorique.
 
(Gilbert Garistre, Aveux et anatropes)

mercredi 5 mars 2025

Notes Dosto

 

Comme elles sont de la plume de Dostoïevski, on peut à bon droit appeler les Notes d'hiver sur impressions d'été des « notes Dosto » — de même d'ailleurs que les Notes d'un souterrain. L'écrivain russe a laissé beaucoup de « notes Dosto ». Mais il faut dire qu'il était épileptique, aussi.
 
(Gilbert Garistre, Aveux et anatropes)

Les liseurs

 

La plupart de ceux qui lisent des livres ne le font pas parce qu'ils aiment ça, mais pour se voir (et se faire voir aux autres) comme des liseurs de livres. Ils « croivent » que ça les pose là. Ils font « jore ». Ils ne comprennent rien ou pas grand chose à ce qu'ils lisent mais ce n'est pas très grave vu qu'il n'y a souvent rien à comprendre (même quand ce n'est pas écrit par le pénible Joyce ou l'extrapénible Blanchot).
 
(Gilbert Garistre, Aveux et anatropes)

Dosto

 

Il devrait falloir un permis, pour lire certains auteurs. Cela nous éviterait d'entendre des pots de pisse ramener Dostoïevski à leur niveau, le qualifier de poussif et s'autoriser à l'appeler Dosto.
 
(Gilbert Garistre, Aveux et anatropes)

Un cadeau ouais tu parles

 

Il se peut que les gens possèdent des qualités que l'on ignore, mais ce sont quand même de sacrées canailles. Prenez le poëte Bobin. Il dit que la vie est un cadeau dont on défait les ficelles chaque matin au réveil, le salop !
 
(Gilbert Garistre, Aveux et anatropes)

mardi 4 mars 2025

Changement de doctrine

 

Le solipsisme, ça va quand on est en bonne santé, mais quand on a un pet de travers on tombe tout de suite dans l'objectivisme. Malheur !
 
(Gilbert Garistre, Aveux et anatropes)

En jouant au billard avec Husserl au bar Le Marigny

 

« Dis donc Edmond, il paraît que t'as dit comme ça que toute conscience est conscience de quelque chose ? Ce serait pas ce qu'on appelle parler pour ne rien dire, par hasard ? Le prends pas mal, hein ? Va pas faire une fausse queue... Joue plutôt la rouge, là, elle est plus facile. Et pas d'intentionnalité anticipatrice, hein ? Sinon elle risque d'être verte et bosselée de l'autre côté. T'entends ce que je dis, Edmond ? »
 
(Gilbert Garistre, Aveux et anatropes)

Défense de biffer Magritte

 

On peut ne pas aimer le surréalisme en peinture, ce n'est pas une raison pour biffer Magritte ni pour l'abaisser. Il faut s'en prendre aux bonnes personnes, quand on n'est pas content !
 
(Gilbert Garistre, Aveux et anatropes)

Aux écrivains-voyageurs

 

Bouvier ! Chatwin ! Et toi, Leigh Fermor ! Arrêtez de nous faire chier avec vos voyages ! Est-ce que nous voyageons, nous ? Nous ne voyageons pas ! Nous exécrons le voyage et jusqu'à l'idée même de voyager. Est-ce que c'est clair, cette fois ?
 
(Gilbert Garistre, Aveux et anatropes)

lundi 3 mars 2025

Inimaginable

 

Le plus extraordinaire, avec les écrivains, c'est qu'ils arrivent à trouver des poires qui prennent au sérieux ce qu'ils écrivent. Qui achètent leurs livres. Qui trouvent ça « sublime ». — Inimaginable !
 
(Gilbert Garistre, Aveux et anatropes)

Malempis

 

La vie, ce n'est pas Phalempin, le personnage interprété par le fantaisiste Sim dans le film Elle boit pas, elle fume pas, etc. ; ce serait plutôt Malempis.
 
(Gilbert Garistre, Aveux et anatropes)

Cavale existentielle

 

Le nom ? L'étant existant alias le Dasein. La destination ? Le couloir de la mort. L'ironie de la chose ? Le Dasein est innocent. C'est un manchot qui a fait le coup. Mais le lieutenant Philippe Gérard ne veut pas le croire, et Heidegger non plus.
 
(Gilbert Garistre, Aveux et anatropes)

Épistémè

 

Faire l'histoire de la connaissance, c'est faire l'histoire de la bêtise. Le « structuralisme » !... La « physique des particules » !... Le « noumène » !... Gombrowicz a raison : plus c'est savant, plus c'est bête. Tous les efforts du prétentieux monstre bipède se résument à ba, be, bi, bo, bu. Ce n'est pas de chance, hein ?
 
(Gilbert Garistre, Aveux et anatropes)

dimanche 2 mars 2025

Aux chiottes Le Clézio

 

On ne fait pas plus antipathique que Le Clézio. Avec sa petite voiture de sport... Et sa petite bonne femme sortie d'un magazine de mode... Et que ça écrit des romans « qui baignent dans les ténèbres impénétrables d'un désespoir absolu »... Et que ça se donne des airs d'être habité par le tragique, le vide, la solitude, l'absurde, la mort, et cætera, et cætera... Céoène ! Pot de pisse ! Euh... escroc !
 
(Gilbert Garistre, Aveux et anatropes)

Un parrainage embarrassant

 

Le pis qu'il puisse arriver à un auteur est d'être adoubé par Blanchot et Bataille. C'est ce qui est arrivé à Louis-René des Forêts. Après, il était perdu de réputation. Dans l'esprit du public, il était associé à ces deux abominables « golmons ».
 
(Gilbert Garistre, Aveux et anatropes)

Errance ochsienne

 

Vivre, c'est aller au petit bonheur la chance, au hasard. Un jour on est à Far Rockaway (dans le quartier de Queens), le lendemain on se retrouve on ne sait comment à Perrysburg (dans l'ouest de l'État de New York), un autre jour on est à Colombus (dans l'Ohio). C'est une errance ochsienne.
 
(Gilbert Garistre, Aveux et anatropes)

Conscience morale du bourru

 

Le bourru, on peut lui reprocher beaucoup de choses, mais pas d'avoir été aimable avec qui que ce soit. Et encore moins d'avoir léché le moindre fiacre, pas même celui de madame Bovary.
 
(Gilbert Garistre, Aveux et anatropes)

samedi 1 mars 2025

Un importun

 

Louis-René des Forêts se moque de notre confiance envers les mots ! Il dénonce la vacuité du langage ! Pis que bouffigue, il se fait passer pour un écrivain discret, peu sûr de lui, ironique, tendre et extrêmement brillant ! Mais il oublie une chose, ce monsieur-le-malin, c'est qu'on ne l'a pas sonné !!!
 
(Gilbert Garistre, Aveux et anatropes)

En rade

 

Ce qui rend la vie si déplaisante, c'est qu'on n'y peut faire fond sur rien. Fuyant son Moi névropathe, on va se réfugier dans un château de la Brie auprès de cousins paysans, mais rien n'est comme il faudrait. Le château est une ruine, la campagne est sinistre, et les cousins paysans sont de patibulaires canailles. C'est la déconfiture sur toute la ligne. Et tout est comme ça !
 
(Gilbert Garistre, Aveux et anatropes)

Contrepoil occulte

 

Pour un occultiste, il n'y a pas pire humiliation que de se faire envoyer bouler par l'abbé Boullan. Pensez ! L'abbé Boullan ! Le successeur de Vintras !
 
(Gilbert Garistre, Aveux et anatropes)

Antipathie

 

Butor dit que l'auteur de Biffures « l'hérisse ».
 
(Gilbert Garistre, Aveux et anatropes)

vendredi 28 février 2025

Tâtement lacanien

 

Le psychanalyste Lacan était un organiste très capable. Non seulement il touchait à Buxtehude, mais il tâtait de Bach.
 
(Gilbert Garistre, Aveux et anatropes)

Ésotérisme jardinier


C'est à la fin du dix-neuvième siècle, en 1888, que, pour ramasser les feuilles mortes, les martinistes Pappus et Stanislas de Guaita ont imaginé d'utiliser une « pelle à dents » (un râteau). L'idée sera reprise ensuite par les rosicruciens.
 
(Gilbert Garistre, Aveux et anatropes)

Plan de Zurich

 

Le 27 août 1911, Franz Kafka écrit dans son Journal : « Achat d'un plan de Zurich ». Évidemment, ce qu'il veut dire, c'est que la vie est un mystère irrésolu, un labyrinthe ; que l'homme est condamné à évoluer dans un monde incompréhensible où il est livré, impuissant, à des forces inconnues. Dans ces quelques vocables, tout ce qui constitue l'humaine condition — tout ce que Malraux exposera laborieusement plus tard — est resserré avec une force et un bonheur d'expression suprêmes. Oui, en vérité, « achat d'un plan de Zurich ».
 
(Gilbert Garistre, Aveux et anatropes)

Réfutation esthétique de Taine

 

Joséphin Péladan dînait à l'huile, il trouvait cela plus sain que de dîner au beurre. Sa maîtresse Henriette Maillat également. Mais pour le mage, c'était aussi un moyen de réfuter esthétiquement Taine. Ce dernier, en effet, ne jurait en art que par le beurre (Rubens, le Corrège, Boucher, etc.).
 
(Gilbert Garistre, Aveux et anatropes)

jeudi 27 février 2025

Arman les collectionne

 

Le plasticien Arman était un vrai benêt. À cause de sa balourdise, il se retrouvait sans cesse dans des situations impossibles, ce qui avait le don d'énerver sa bonne femme. « Tu les accumules », lui lançait-elle (voulant dire les conneries).
 
(Gilbert Garistre, Aveux et anatropes)

Une difficultueuse traversée

 

La mort est un peu profond ruisseau, sans doute, mais l'homme est mal armé pour le traverser. Faute de bottes en caoutchouc — métaphysiques ! —, il est voué à se mouiller les doigts de pied. Évidemment, ce n'est pas une raison pour calomnier ce ruisseau : après tout, ce n'est pas sa faute.
 
(Gilbert Garistre, Aveux et anatropes)