« Quand j'entends le mot vivre, je sors mon revolver ou du poison. » (Luc Pulflop)
lundi 11 mars 2019
Puissance oppressive du fécal
Dans son Journal d'un cénobite mondain, Gragerfis, parlant de l'excrément, dit que la figure hostile du « Suisse » est peut-être née de l'interprétation que nous faisons de nos états d'impuissance. Mais il évoque aussi une autre hypothèse : la figure du « cas », dit-il, pourrait être formée par notre désir pervers de nous livrer à plus fort que nous, de nous remettre à une force étrangère, fût-elle maléfique, et de précipiter notre perte en laissant advenir le pire.
(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)
Péripate
Petit animal mou des forêts vierges d'Asie, aux mœurs nocturnes, qui capture ses proies en les engluant, intéressant par son aspect intermédiaire entre une annélide et un arthropode, le péripate ressent un plaisir suspect à manipuler, à toucher, à sentir les produits excrémenteux. Les péripates forment une classe, heureusement très peu nombreuse.
(Luc Pulflop, Prière d'incinérer. Dégoût)
Aux frontières du possible
24 février. — Polybe raconte encore qu'il naît dans les Alpes un animal d'une forme singulière ; il ressemble à un cerf, si ce n'est que par le cou et le poil il tient du sanglier. Il porte sous le menton une caroncule de la forme d'un cône, velue à son extrémité, longue à peu près d'un empan et aussi grosse que la queue d'un cheval.
(Barzelus Foukizarian, Journal ontologique critique)
Contribution au Grand Œuvre
Le suicidé philosophique dévoue toute sa ferveur à constituer quelque communion avec le Rien. Il ne dépend pas de sa volonté ni même de son talent de conférer à son œuvre la grâce ultime d'un style ; ce n'est pas là l'affaire d'une ardeur isolée, mais le fruit d'une obstination unanime. Cependant, eût-il entrepris sans espérer, qu'il n'aurait pas perdu sa peine. Il a travaillé pour sa part à rapprocher tant soit peu l'imprévisible accomplissement de la merveille : l'extinction du « monstre bipède ».
(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)
dimanche 10 mars 2019
Page de journal
23 février. — Hercule furieux est une imitation d'Euripide. On la croit de Sénèque le Rhéteur.
(Barzelus Foukizarian, Journal ontologique critique)
Voile de Poppée
Le pouvoir du Rien, si nous tentons de le décrire, nous ramène au pouvoir que détiennent, de façon assez inégale, certains objets réels (presse-purée, chambre à air de vélocipède, griffe de zingueur, etc.): ils désignent, derrière eux, un espace magique ; ils sont l'indice de quelque chose qu'ils ne sont pas. Apparaît ainsi, en vertu de l'interdiction opposée par l'obstacle, toute une profondeur essentielle, celle du pachynihil. Le regard est entraîné par le vide vertigineux qui se forme dans l'objet fascinant : un infini se creuse, dévorant l'objet réel par lequel il s'est rendu sensible et pour finir l'opérateur lui-même.
(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)
Carcinome syntagmatique
Végétation fongueuse des mots ! La pâleur rosâtre, maladive et obscène du langage désespère le népenthès et jusqu'aux orchidées obscènes d'un des Esseintes.
(Luc Pulflop, Prière d'incinérer. Dégoût)
Un goinfre
25 février. — « Albin, qui disputa l'empire à Sévère, avait la voracité des fruits. Dans une matinée, il avalait cinq cents figues sèches, cent pêches de Campanie, dix melons d'Ostie, vingt livres de raisin, cent bec-figues et quatre cents huîtres. ». (Louis Nicolardot, Histoire de la table : curiosités gastronomiques de tous les temps et de tous les pays, Paris, Dentu, 1868)
(Barzelus Foukizarian, Journal ontologique critique)
samedi 9 mars 2019
Vain bavardage
Lorsque l'évêque Alexandre et le prêtre Arius commencèrent à disputer sur la manière dont la réalité empirique pouvait être vue comme une trompeuse émanation du pachynihil, l'empereur Constantin leur écrivit ces paroles rapportées par Eusèbe et par Socrate 1 : Vous êtes de grands fous de disputer sur des choses que vous ne pouvez entendre.
1. Eusèbe de Nicomédie et Socrate le Scolastique.
(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)
Clausule didactylique
27 février. — Il semble que Théodore le Syncelle emploie avec prédilection la clausule didactylique qu'on retrouve souvent encore dans les œuvres de Théophylacte Simocatès et de Jean l'Aumônier.
(Barzelus Foukizarian, Journal ontologique critique)
Pour empêcher les cheveux de tomber
« Mettez en poudre de la graine de persil et poudrez-vous-en la tête pendant trois soirs différents ; vous recommencerez chaque année, et vos cheveux ne tomberont jamais. Une solution plus économique encore, préconisée par le philosophe Longin, est tout simplement de... se pendre. Mais oui ! » (Pierre-Joseph Buc'hoz, Manuel cosmétique et odoriférant des plantes, Paris, Bernard, 1800)
(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)
vendredi 8 mars 2019
Sombre dimanche
Sur mon front dont le cuir se craquelle toujours davantage, apparaissent les stigmates d'un horizon sanglant, d'un crucifiement de la pensée par le verbe.
(Luc Pulflop, Prière d'incinérer. Dégoût)
Miraud
4 mars. — On est myope ou presbyte, selon que la vision distincte s'opère à une distance moindre ou plus grande que la distance commune. Je note, à ce propos, que l'adjectif gibouleux est curieusement absent de tous les dictionnaires et que la guilée a disparu des plus récents. C'est — nous dit le Trévoux — une « petite pluie soudaine et de peu de durée, qui vient ordinairement au printemps. Elle surprend et tombe tout d'un coup après un beau soleil ; ce qui arrive souvent au mois de mars [...] Le mot de guilée vient d'un vieux mot français guille, ou gille, qui veut dire tromperie, parce que les guilées surprennent et arrivent sans qu'on y pense, comme les guilles, c'est-à-dire comme les tromperies. »
(Barzelus Foukizarian, Journal ontologique critique)
Le jeune homme au pistolet
Si le suicidé philosophique, par son traitement des volumes, peut être vu comme un précurseur du cubisme, il est aussi l'heureux possesseur d'un revolver Smith & Wesson chambré pour le .44 russe dont la masse grenue, comme intérieure à son être-là, est appréhendée par lui dans son hic et nunc, au cœur d'un champ perceptif qui englobe aussi son exister propre.
(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)
Hommage à Roré
Un groupe d'amis au coin de la rue, et l'après-midi s'écoule en manchettes. Mais voyons encore ceci : Soupirail ! La négligence des astres met en échec la savante astrologie.
(Luc Pulflop, Prière d'incinérer. Dégoût)
Pin maritime
21 février. — La figure que donne Mathiole du Pinus maritima major ne ressemble nullement au pin maritime des landes de Bordeaux : dans la figure, les cônes ont une queue (ils sont pédonculés) ; dans la nature, ils n'en ont point (ils sont sessiles) ; dans la figure, ils sont attachés isolément ou deux à deux sur des points différents des pousses ; dans la nature, ils sont toujours fixés circulairement sous les branches aux extrémités des pousses (ils sont terminaux), ordinairement au nombre de quatre à six, quand ils ont atteint leur maturité, mais souvent en beaucoup plus grand nombre.
(Barzelus Foukizarian, Journal ontologique critique)
jeudi 7 mars 2019
Exaltation du pachynihil
Le nihilique n'attend jamais tout du Rien. Des soucis divers continûment l'assaillent, les uns sordides, les autres admirables, plus impérieux souvent que celui du pachynihil. Quoi qu'il en soit, plus il attend de ce dernier, moins il peut s'empêcher de lui consentir les plus hautes et les plus larges prétentions. Il revendique pour lui une plénitude, une opulence, une étendue qui envahissent bientôt l'univers entier, ne laissant rien au monde qu'il n'embrasse et qu'il n'enveloppe. Le voici qui restitue au Rien les pouvoirs et les richesses dont travaillent à le priver ceux qui s'entêtent à le réduire à n'être que l'absence de quelque chose.
(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)
Une drôle de combine
En 1906, Van Dongen entre dans le groupe des fauves et y demeure plusieurs années. Il traite au cours de cette période les clowns, les danseuses, les cirques équestres, et ses œuvres sont toujours immédiates, avec de vives couleurs.
(Luc Pulflop, Prière d'incinérer. Dégoût)
Un « raisin »
22 février. — Jules Capitolin raconte que l'empereur Maximin buvait souvent dans une journée une pleine amphore de « pive », tenant environ vingt-huit pintes, et qu'il trouvait de la place pour quarante livres de viande, au besoin pour soixante, mais qu'il dédaignait les légumes.
(Barzelus Foukizarian, Journal ontologique critique)
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