« Quand j'entends le mot vivre, je sors mon revolver ou du poison. » (Luc Pulflop)
dimanche 13 mai 2018
La solitude des fêtes foraines
Parmi toutes les sortes de solitude que doit affronter l'homme durant sa vie, la plus terrible est sans conteste la solitude des fêtes foraines. L'étant existant s'y sent comme devant un écran transparent mais épais qui arrêterait les échos de la vie. La foule de badauds semble composée de petits personnages sortis de terre, dérisoires, grimaçants, comme exhumés d'une nécropole aztèque.
Les montagnes russes, les grandes roues, les chenilles, les nacelles en tout genre qui vous secouent dans tous les sens et vous mettent la tête en bas, les cylindres où l'on se place le dos à la paroi et où l'on fait l'expérience de la force centrifuge, tout cela a quelque chose d'infernal et le sujet pensant, réalisant enfin qu'il s'est fourvoyé dans un lieu festif de mort, se prend à envier la solitude infiniment plus bénigne des deux alcooliques du Verre d'absinthe de Degas ou celle des vieillards croqués par le cruel Daumier.
(Raymond Doppelchor, Océanographie du Rien)
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