samedi 16 avril 2022

Présence de l'âme

 

Nous ne sentons vraiment que nous avons une âme que lorsque nous écoutons de la musique ou que nous nous comparons à une personne du sexe.

(Fernand Delaunay, Glomérules)

Rétroaction

 

Quand l'homme du nihil se sent bien, il trouve cela extrêmement louche. Il se dit que quelque chose ne tourne pas rond, qu'il y a une « couille dans le pâté » 1. Cette inquiétude ne tarde pas à dégénérer en angoisse et... vous avez compris.

1. Dans le Bade-Wurtemberg, la couille ou touille désigne une grande cuillère en bois qui sert à cuisiner.

(Fernand Delaunay, Glomérules)

vendredi 15 avril 2022

Green

 

« Voici des fruits, des fleurs, des feuilles et des branches. Et puis voici du taupicide, au cas où les fruits, les fleurs, et cetera (le réel, quoi) vous donnerait des courbatures. »

(Fernand Delaunay, Glomérules)

jeudi 14 avril 2022

Une trop fragrante solitude

 

L'homme du nihil a toujours jalousé la solitude du « pue des pieds » — encore plus extrême selon lui que celle du « pue de la gueule ».

(Fernand Delaunay, Glomérules)

Caillou sur le chemin de la sagesse

 

Pour parvenir à la sagesse et trouver ainsi le repos, l'homme du nihil s'efforce de n'avoir aucune opinion sur rien. Mais comment faire quand une « mégère difforme au faciès d'hippopotame » vous poursuit de sa vilenie ? On est bien forcé d'avoir une opinion sur cette grosse vache, non ? N'est pas Pyrrhon qui veut !

(Fernand Delaunay, Glomérules)

mercredi 13 avril 2022

Miracle de la « mijole »

 

« Hier, dimanche 3 juin, dans le train qui me ramenait de Compiègne à Paris. En face de moi, une jeune fille (dix-neuf ans ?) et un jeune homme. J'essaie de combattre l'intérêt que je prends à la jeune fille, à son charme, et pour y arriver, je m'efforce de me convaincre que c'est une cruche. Je l'imagine lisant du Daniel Pennac, du Christian Bobin ou — horresco referens — du Philippe Delerm. Rien n'y fit. Le charme qu'elle dégageait s'exerçait toujours sur moi. Tel est le miracle de la “mijole”, des “biberons Robert” et du fondement (de l'historialité du Dasein). » (Stylus Gragerfis, Journal d'un cénobite mondain)

(Fernand Delaunay, Glomérules)

mardi 12 avril 2022

Irréalité

 

Le penseur roumain Émile Cioran se vantait de savoir que tout est irréel, mais admettait ne savoir comment le prouver. Pourtant, une solution simple existe : enfermer un philosophe dans une vessie pour observer s'il va « produire du concept » — que l'on verrait alors suinter à travers la membrane. S'il n'en produit pas, c'est que l'univers est effectivement irréel — et le philosophe aussi, donc.

(Fernand Delaunay, Glomérules)

Symptôme

 

Quelqu'un qui agit — un « agisseur » — montre par là qu'il n'a pas toute sa tête.

(Fernand Delaunay, Glomérules)

lundi 11 avril 2022

Éplorement bovin

 

Comme une vache cantabrienne rassasiée de silence et de ciel, se laisser submerger par la tristesse d'être.

(Fernand Delaunay, Glomérules)

Divertissement

 

L'homme fait « jore » qu'il s'intéresse aux tableaux de peinture, aux pièces de théâtre ou aux courses de bourrineaux, mais en réalité il veut juste oublier qu'il est en train de clamecer car « ça fout trop les jetons ». Ceci est une pensée renouvelée de Blaise Pascal.

(Fernand Delaunay, Glomérules)

Définition de la tristesse

 

Quelqu'un — Luc Pulflop ? — a défini très justement la tristesse comme « une sorte de babiroussa ». On pourrait préciser : « une sorte de babiroussa qui suit la douleur ».

(Fernand Delaunay, Glomérules)

All is of no avail

 

Puisque (selon Pindare), « l'homme est le rêve d'une ombre », pourquoi se fatiguer à se laver les pieds ? Bien sûr, en ne le faisant pas, on s'expose à être traité de « grand saligaud », mais quand on est « le rêve d'une ombre », quelle importance ? 

(Fernand Delaunay, Glomérules)

Obstacle à l'avancement métaphysique

 

Émile Cioran a raison de dire que si l'on veut éviter le surplace métaphysique, il faut fuir les bonnes femmes comme la peste (il ne l'exprime pas exactement ainsi mais c'est bien le fond de sa pensée).

(Fernand Delaunay, Glomérules)

dimanche 10 avril 2022

I can't get no

 

Comme le chanteur Michael Jagger mais pour d'autres raisons, l'homme du nihil est un être condamné à l'insatisfaction.

(Fernand Delaunay, Glomérules)

À méditer

 

Ce terrible proverbe : « Pendant que le sage se gratte le prose, le fou aussi se gratte le prose... »

(Fernand Delaunay, Glomérules)

Définition

 

Rien ne définit mieux l'homme du nihil que cette formule : « un étant réfractaire à l'Être ».

(Fernand Delaunay, Glomérules)

Confession

 

Je n'ai jamais prononcé ou écrit le mot cyclomoteur sans ressentir une sorte de volupté.

(Fernand Delaunay, Glomérules)

Mais la vie continue

 

« C'était en bas des falaises de Varengeville. Devant cet étalage de roc, je ressentis jusqu'à l'épouvante l'horreur d'avoir un Moi. Mais comme il n'y avait pas moyen d'y couper — sinon par l'homicide de soi-même —, je fis contre mauvaise fortune bon cœur, mangeai quelques petits gâteaux et cessai bientôt d'y penser. » (Stylus Gragerfis, Journal d'un cénobite mondain)

(Fernand Delaunay, Glomérules)

Viscères

 

Le corps, la chair, les organes sont des réalités suffisamment atroces. Mais il faut encore subir ces mots hideux : corps, chair, organes — et les adjectifs afférents, tout aussi hideux — par exemple charnel. Non, vraiment, ça commence à bien faire ! On a compris !

(Fernand Delaunay, Glomérules)

samedi 9 avril 2022

Omniprésence de l'autrui lévinassien

 

Si l'homme du nihil exècre tant l'autrui du philosophe Levinas, c'est parce que ce fâcheux l'oblige à jouer un rôle, à feindre de s'intéresser à des choses qui ne lui importent aucunement. Il n'y a que seul qu'il peut laisser libre cours à sa morosité. Si seulement cet autrui lévinassien pouvait débarrasser le plancher... Mais comme Lucien Rebatet et Pierre-Antoine Cousteau, il est partout !

(Fernand Delaunay, Glomérules)

Brucolaque

 

Le mot brucolaque désigne, chez les Grecs modernes, le cadavre d'un excommunié, animé par le démon et qui interpelle les vivants. — Robert Férillet, écrivain brucolaque. (Léon Bloy, La Femme pauvre, 1897, p. 148)

(Fernand Delaunay, Glomérules)

vendredi 8 avril 2022

Picucule

 

D'aussi loin qu'il me souvienne, je n'ai jamais cru qu'aux vertus du vocable, et en particulier de celui picucule — le nom usuel du dendrocolapte —, pour dissoudre une bonne fois l'assommante « réalité empirique ». (Stylus Gragerfis, Journal d'un cénobite mondain)

(Fernand Delaunay, Glomérules)

Intentionnalité longitudinale

 

« Trouver dans un coin un bout de fromage jeté là depuis longtemps, qu'entoure une armée d'insectes noirs... Profiter de cette rencontre pour penser à son propre cadavre et aux métamorphoses horribles auxquelles il sera soumis... Ah, quel délice ! » (Les trente-trois délices de Fernand Delaunay, Trad. de Simon Leys)

(Fernand Delaunay, Glomérules)

Agrume

 

Cette nuit, j'ai pensé au mot agrume (du latin médiéval acrumen désignant une substance de saveur aigre), qui exprime le sentiment de vanité, de frustration, d'inanité. Un sentiment de « néantité ». Marcel Jutique compare d'ailleurs les humains à des « agrumes désaxés » sortis de quelque cauchemardesque « champ agricole ». (Stylus Gragerfis, Journal d'un cénobite mondain)

(Fernand Delaunay, Glomérules)

jeudi 7 avril 2022

Une « idée à la con »

 

Héraclite, pourtant le plus grand génie que l'humanité ait produit, eut l'idée baroque de s'enduire de bouse de vache pour guérir de son hydropisie. D'après Néanthe de Cyzique, il resta comme momifié par la bouse qui durcit en séchant, et fut mangé par des chiens. Gragerfis écrit dans son Journal que cette fin tragique « serait presque à vous dégoûter de vous enduire de bouse de vache ».

(Fernand Delaunay, Glomérules)

mercredi 6 avril 2022

Cri du cœur

 

Les dernières paroles de l'homme du nihil : « Me faire ça, à moi ?! » — À tort ou à raison, il s'est toujours pris pour quelqu'un de spécial — et il est indéniable que la mort manque parfois de tact.

(Fernand Delaunay, Glomérules)

mardi 5 avril 2022

Au secours

 

Le vocable reginglette — et parfois, dans une moindre mesure, celui zingibéracé — joue pour l'homme du nihil le rôle que Simone Boué a joué pour Cioran : celui d'un instrument de sauvetage. Quand la pensée de se détruire siffle et souffle dans la mâture, on se raccroche à ce qu'on peut.

(Fernand Delaunay, Glomérules)

Titre alléchant


Un livre à lire : L'Art de ne pas naître, de Mosagre Vuntic, un contemporain de Théasar du Jin.

(Fernand Delaunay, Glomérules)

Mots interdits

 

« Si j'étais président de la République, j'interdirais sous peine de mort de proférer le mot luminaire. Quant à l'énonciation du vocable batracien, elle serait punie d'emprisonnement à perpétuité. » (Stylus Gragerfis, Journal d'un cénobite mondain)

(Fernand Delaunay, Glomérules)