vendredi 11 juin 2021

Moment d'abattement

 

Alors qu'il venait de rendre ses derniers hommages à un proche inopinément « décédé », l'homme du nihil déclara à Gragerfis que « la vie n'est certes pas quelque chose d'amusant, mais la mort... cela n'a pas l'air fifou non plus ». Gragerfis dit dans son Journal qu'il en resta « comme deux ronds de flan ». Entendre parler ainsi le chantre infatigable de l'homicide de soi-même ? La mort, « pas fifou » ?!

(Fernand Delaunay, Glomérules)

jeudi 10 juin 2021

Folle témérité du nihilique

 

« C'est une entreprise hardie, celle où s'est lancé le nihilique, qui consiste à aller dire aux hommes qu'ils ne sont que de grotesques "monstres bipèdes" et que, par-dessus le marché, "rien n'est". — Mais le moyen de réfuter ces assertions ? »
(Bossuet, Sermon sur la mort. Pour le vendredi de la IVe semaine de Carême 1662)

(Fernand Delaunay, Glomérules)

mercredi 9 juin 2021

Calamité

 

Selon Gragerfis, le seul moyen de supporter une relation de longue durée avec une personne du sexe est de voir en cette dernière une « calamité naturelle » — comme une inondation, une nuée de sauterelles, etc. — à laquelle il est impossible d'échapper. « Mais pour ça, précise-t-il, il faut être sacrément fataliste. »

(Fernand Delaunay, Glomérules)

mardi 8 juin 2021

Défense conceptuelle

 

« Par le concept de reginglette, nous nous défendons contre le monde. » (Otto Weininger, Sexe et caractère)

(Fernand Delaunay, Glomérules)

vendredi 4 juin 2021

Misanthropie

 

D'après Louyer-Villermay 1, « il n'existe aucun médicament propre à guérir la misanthropie » car « les affections de l'âme et les maladies de l'entendement sont très peu accessibles aux puissances pharmaceutiques ». — « Je t'en foutrai des maladies de l'entendement, moi, tuouaouar ! », réplique l'homme du nihil.

1. Dictionnaire des sciences médicales, Tome trente-troisième, Paris, Panckoucke, 1819.

(Fernand Delaunay, Glomérules)

jeudi 3 juin 2021

Tout s'explique

 

Ce n'est pas pour rien que les Anciens voyaient en la femme une créature satanique. Sa méchanceté, la joie qu'elle éprouve à faire le mal, son attirance pour les choses pernicieuses (les fameux « magazines féminins »), tout cela porte indubitablement la marque du « prince des ténèbres ».

(Fernand Delaunay, Glomérules)

vendredi 28 mai 2021

Brimades

 

Dans son Journal d'un cénobite mondain, Gragerfis, après avoir évoqué les brimades qu'il subit d'un certain « Valéry Réel », lance ce cri poignant : « L'idée du Rien nous protégera-t-elle de nos ennemis électriciens, magistes noirs et théosophes ? Nous préservera-t-elle des angoisses, des serrements de poitrine, des battements de cœur et, tant qu'à faire, des panaris ? » — Mais il se répond aussitôt à soi-même : « Tu rêves ! »

(Fernand Delaunay, Glomérules)

jeudi 27 mai 2021

Jérémie, XXV

 

« Depuis la treizième année de Josias, fils d'Amon, roi de Juda, il y a vingt-trois ans que la parole de l'Éternel m'a été adressée ; je vous ai parlé, je vous ai parlé dès le matin, et vous n'avez pas écouté. J'ai prononcé devant vous le vocable reginglette et vous avez fait comme si de rien n'était. Puisque c'est ainsi, tout ce pays deviendra une ruine, un désert, et ces nations seront asservies au roi de Babylone pendant soixante-dix ans. »

(Fernand Delaunay, Glomérules)

mercredi 26 mai 2021

Sur le mal radical

 

Dans sa Lettre ouverte à une bourrelle, l'homme du nihil interroge les conditions de possibilité de l'action moralement mauvaise. Il ne s'agit plus pour lui d'établir le principe objectif de la moralité — il a dépassé ce stade ! —, mais de mettre au jour les principes subjectifs pouvant conduire une « mégère difforme au faciès d'hippopotame » à adopter des maximes particulières et non universalisables c'est-à-dire non conformes à la loi morale.

(Fernand Delaunay, Glomérules)

mercredi 19 mai 2021

Interlude

 

Le mathématicien Henri Poincaré plongé dans la Mathématique du néant de Włodzisław Szczur et se disant qu'il n'a jamais lu « un tel ramassis de conneries ».

samedi 15 mai 2021

Solipsisme

 

« Si la prétendue réalité empirique n'est en fait que la projection de mon conscient intérieur, alors je devrais d'urgence consulter un psychiatre pour masochisme exacerbé », déclare Gragerfis dans son Journal d'un cénobite mondain. — Mais ce psychiatre ne serait-il pas, lui aussi, une projection du « conscient intérieur » gragerfissien ? On n'en sort pas. C'est à se taper la tête contre les murs !

(Fernand Delaunay, Glomérules)

jeudi 13 mai 2021

Idiosyncrasie du nihilique

 

L'homme du nihil diffère essentiellement du vulgum pecus par sa Weltanschauung — d'une noirceur et d'une amertume extrêmes —, ses capsules glabres, ses pédoncules rameux et multiflores, enfin par ses feuilles constamment alternes, au moins au sommet. Autre trait remarquable : son inflorescence générale est centripète, comme en témoigne l'emploi qu'il fait à tout propos des vocables reginglette, gloméruleux, zingibéracé, etc.

(Fernand Delaunay, Glomérules)

mercredi 12 mai 2021

Un être fouisseur

 

À l'instar du phacochère, l'homme du nihil se nourrit surtout d'herbes, de racines et de fruits sauvages. Il mange souvent dans la position agenouillée. C'est un ennemi des philosophes, car il bouleverse les champs de concepts des « amis de la sagesse » et autres « hommes de la Nature et de la Vérité » avec ses défenses recourbées.

(Fernand Delaunay, Glomérules)

mardi 11 mai 2021

Racines

 

Il faut surtout attribuer la force prodigieuse de l'idée du Rien au libre développement de ses racines pivotantes, qui semblent pénétrer jusque dans les profondeurs de la pachyméninge, à tel point qu'il n'a jamais été possible d'en atteindre les extrémités (tandis que l'idée du quelque chose n'a que des racines superficielles, dirigées horizontalement). De là, nul doute, la manière dont l'homme du nihil résiste à la tempête, lorsque l'homme de la Nature et de la Vérité, moins fort, moins élevé, s'incline souvent vers l'est, par l'effet du vent.

(Fernand Delaunay, Glomérules)

mardi 4 mai 2021

Interlude

 

Le « Grandiloque des Carpates » lisant l'Océanographie du Rien de Raymond Doppelchor et tentant de comprendre la notion de « sinapisation du réel » qui s'y trouve développée.

mercredi 21 avril 2021

Antidote


Selon l'homme du nihil, « le vocable reginglette est, avec le taupicide, le seul antidote possible à l'angoisse métaphysique qui mine le sujet pensant, et à cette misère existentielle où les philosophes Kant et Hegel, avec leurs terribles "concepts", ont plongé l'humanité. »

(Fernand Delaunay, Glomérules)

lundi 12 avril 2021

Sourcils sévères du nihilique


 
« On appelle nihiliques les individus dont toute la philosophie se borne à affirmer que rien n'est. Leurs caractéristiques les plus marquantes sont : un regard féroce, une grande sévérité sur les sourcils, un grand silence, une profonde méditation, un désir de la solitude, un amour et une haine opiniâtres, des présages funestes et des songes tristes. » (Pierre-Joseph Buc'hoz, Mémoire sur la manière de guérir la mélancolie par l'homicide de soi-même, Paris, 1806)

(Fernand Delaunay, Glomérules)

vendredi 2 avril 2021

Cachot

 

Ferrière a défini le cachot « un sépulcre funeste où l'on enferme des hommes vivants, où l'on ne gît que sur la paille ». Mais cette définition ne convient-elle pas, plus généralement, pour caractériser le « fétide et rébarbatif réel », ce que les philosophes appellent la « réalité empirique » ?

(Fernand Delaunay, Glomérules)

lundi 29 mars 2021

Abstention

 

Selon le père Bourdaloue, « la pensée du purgatoire, en nous donnant une idée de la sévérité de la justice divine, porte notre cœur à la pratique de toutes les vertus chrétiennes ». Cela est vrai en général, sans doute, mais la crainte de la justice divine n'empêche pas le nihilique de mettre vices et vertus dans le même sac et de ne pratiquer ni les uns ni les autres, convaincu qu'il est que « tout pue ». Sa règle de conduite est « d'attendre que ça se passe » (l'univers, le soir, lui paraît lourd de non-promesses).

(Fernand Delaunay, Glomérules)

lundi 22 mars 2021

Objet de propriété

 

L'homme du nihil ne pense pas sans frémir qu'il n'est qu'un objet de propriété : comme une chaise, un presse-purée ou — si l'on veut aller par là — le mot ours. Mais il doit se rendre à l'évidence : il ne s'appartient plus, il est l'esclave de cette « cré bon diousse d'idée du Rien » qui le bourrelle incessamment.

(Fernand Delaunay, Glomérules)

vendredi 19 mars 2021

Précipice

 

« Que penseriez-vous, mes chers enfants, d'un homme qui ne se plairait que sur le bord des précipices, qui y établirait sa demeure et y dormirait paisiblement ? Vous diriez que cet homme est un imprudent, un insensé ; qu'à force de tourner autour de l'abîme, il finira par y tomber, et qu'il sera victime de sa témérité. Voilà l'état de l'homme du nihil : il marche, il s'assoit, il s'endort sur le bord d'un précipice ; et ce précipice, c'est... l'idée du Rien. Mais oui ! » (Jean-Baptiste Martin, Recueil d'instructions pour la première communion, Bourg, Bottier, 1841)

(Fernand Delaunay, Glomérules)

lundi 15 mars 2021

L'art de déplaire

 

Si quelqu'un mérite le nom de « porphyrogénète dévoyé », c'est bien l'homme du nihil. En effet, il est né dans la pourpre et... il est dévoyé. Mais oui !

(Fernand Delaunay, Glomérules)

dimanche 28 février 2021

Pouvoir de la mijole

 

Grâce à ses « biberons Robert », à son fondement — de l'historialité du Dasein ? — et à sa « mijole », la femme, malgré son incurable stupidité, est parvenue à établir son empire sur le monde. Ô vanité ! ô néant ! « ô aueuglement estrange des hommes, gloriatur in malitia sua ! »

(Fernand Delaunay, Glomérules)

mercredi 17 février 2021

Lectures inutiles

 

Quoique douloureusement conscient de « l'opulente inanité d'une érudition complètement étrangère à sa destinée » — destinée qu'il identifie au taupicide —, le nihilique lit sans discontinuer. Hélas ! de chaque livre, il ressort « gros-jean comme devant ». L'auteur, soit fait le malin, soit « met à côté de la plaque » ! Ô vanité des vanités ! Ô rictus bestial de l'existence !

(Fernand Delaunay, Glomérules)

vendredi 12 février 2021

Gelée blanche

 

Ce n'est pas « au séjour des frimas » que l'homme du nihil va chercher le calme — comme Macedonio Fernández, il tient à son confort thermique — mais dans la suprêmement onctueuse pensée de se détruire.

(Fernand Delaunay, Glomérules)

lundi 8 février 2021

Réclame

 

« Vous êtes fatigué d'être ceci ou cela ? Retrouvez la sérénité primordiale du Rien grâce au taupicide foudroyant Moulin. Dix grammes, en une seule prise. Une solution jeune. » (Sur une brochure publicitaire vantant le « taupicide foudroyant Moulin »)

(Fernand Delaunay, Glomérules)

lundi 1 février 2021

Un destin clownesque

 

Rien de ce qui est humain n'échappe au ridicule, sauf peut-être la souffrance — en particulier celle due à un panaris.

(Fernand Delaunay, Glomérules)