« Quand j'entends le mot vivre, je sors mon revolver ou du poison. » (Luc Pulflop)
mercredi 15 août 2018
Bâfrement coupable
Dans sa Métaphysique des mœurs, Kant rappelle que la volonté de l'être fini et raisonnable qu'est l'homme n'est pas toute puissante : l'homme est un être dépendant dans son existence mondaine, par exemple quand il est invité à un coquetèle. Il peut être tenté de s'empiffrer de canapés et autres petits fours — puisque tout est « à l'œil » —, mais les tentations ne sont pas des contraintes ; la volonté est libre, mais l'homme fait le mal.
Et c'est ici, au plus fort du coquetèle, qu'éclate le scandale du mal radical. Si l'homme succombe à la tentation de s'empiffrer, c'est qu'il veut succomber ; selon Kant, il doit, donc il peut obéir à la loi que la raison pratique se donne et qu'il connaît immédiatement comme un fait. Il n'obéit pas à la loi, donc il ne veut pas obéir. L'être qui constitue, en tant qu'il est moral, le sens du monde et en justifie l'existence — toujours selon Kant — est immoral et pas seulement faible ; il a choisi sa faiblesse, il a voulu le mal : « sa nature est dépravée, il l'a dépravée ». — Et tout ça pour des « petits fours » ! Ô vanité ! ô néant ! « ô aueuglement estrange des hommes, gloriatur in malitia sua ! »
(Léon Glapusz, Mélancolie bourboulienne)
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