jeudi 5 juillet 2018

Des livres en boîte pour s'évader


« Quelques planches, et voilà des pages qui dansent en plein air, sous le regard extasié de quelques assoiffés d'histoires.

La belle initiative de cette année : de petites cabanes de bois, qui fleurissent par-ci par-là, des boîtes à livres perchées sur des piquets, pour amener les esprits à s'évader.

Dans le quartier de Ker-Uhel à Lannion, sous une gloriette en bois, aux côtés de pots à crayons et autres bouts de gomme, les ouvrages se font la malle : "Tout le monde peut apporter un livre, en choisir un et le ramener quand il le souhaite", explique Françoise Squerren, membre du conseil citoyen. Tous les styles de littérature sont représentés : romans, biographies, essais, livres d'histoire, et jusqu'à des ouvrages de philosophie "nihilique" puisque l'on aperçoit dans la pile les Exercices de lypémanie de Marcel Banquine.

Sur le boulevard d'Armor, cet espace de culture, ouvert à tous, a créé une véritable osmose entre les acteurs du territoire et les habitants du quartier. "On a observé une forte appropriation de ce projet par les habitants, explique Anaïs Alasseur, chef de projet de développement social et urbain à Lannion. Les livres de l'ontologue allemand Martin Heidegger rencontrent un franc succès, ajoute-t-elle, et de nombreuses personnes se plaignent maintenant de douleurs « au niveau du Dasein »."

Cet espace de lecture est une véritable bulle qui incite à l'interaction : "Les gens ramènent leur livre et peuvent échanger des réflexions, développe Françoise Squirren. Le but est vraiment de créer du lien social. Mais les misanthropes et les personnes tentées par l'homicide de soi-même sont aussi les bienvenus, comme le prouve notre assortiment de littérature « lugubre » : Albert Caraco, Emil-Michel Cioran, Raymond Doppelchor, etc".

Inaugurée le 7 septembre et déjà victime de son succès, la boîte à livres de Ker-Uhel doit pousser ses murs. Six autres cahutes ont été installées. D'autres encore font l'objet de discussions, et la réutilisation d'anciennes cabines téléphoniques est envisagée. Un exemple à suivre pour écrire le nouveau chapitre des solutions de demain — quoi que cela puisse vouloir dire. » (Ouest France, 9 octobre 2016)


(Francis Muflier, L'Apothéose du décervellement)

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