« Quand j'entends le mot vivre, je sors mon revolver ou du poison. » (Luc Pulflop)
vendredi 19 juin 2020
lundi 15 juin 2020
Circularité du Rien
« Le Rien est rond comme la
roue d'une berouette » écrit l'homme du nihil à André Salmon. Et il
ajoute : « Rien mieux que le cercle ne peut abriter cette polysémie
énergétique qui caractérise le pachynihil. Enfin, n'est-il pas évident
que le Rien forme un tout, à l'instar d'une roue ? D'une part, il
enferme en lui-même, comme une circonférence, tout sans restriction ; il
transcende tout, personne ne peut le fragmenter, ni le compléter.
D'autre part, il tourne sur lui-même, comme une roue, car il opère sans
cesse à l'intérieur de la sphère de sa propre révélation. »
(Lucien Pellepan, Énantioses profectives)
vendredi 12 juin 2020
Genèse
« Or le pachynihil vit qu'il y avait, du
côté de l'Aquilon, une place vide et qui ne servait à rien, et il voulut
y installer le siège de sa puissance pour opérer une création plus
abondante que celle de Dieu, sans connaître la volonté qu'avait celui-ci
de créer toutes les autres créatures. Et c'est ainsi que du néant fut
tiré le fameux "autrui" du philosophe Levinas, autrement dit le monstre
bipède. »
(Lucien Pellepan, Énantioses profectives)
jeudi 4 juin 2020
Astrologie nihilique
L'une des « idées » de l'homme du nihil vient tout droit des astrologues de l'Antiquité, par le relais de Bède le Vénérable : il s'agit de déterminer la probabilité qu'un individu en arrive — par désespoir ! — à prendre du taupicide, d'après le quantième de son jour de naissance dans le cycle lunaire !
(Lucien Pellepan, Énantioses profectives)
jeudi 28 mai 2020
Paradoxe du crocodile
Un crocodile
s'empare d'un bébé et dit à la mère : « Si tu devines ce que je vais
faire, je te rends le bébé, sinon je le dévore. » En supposant que le
reptile soit digne de confiance, que doit dire la mère pour qu'il lui
rende l'enfant ? La réponse usuelle fournie par les individus de
tendance « nihilique » est : « rien n'est ». Le crocodile se trouve alors
dans l'impossibilité de dévorer quoi que ce soit — puisque lui-même n'est pas. Mais une réponse plus subtile est : « reginglette ». Le
saurien, complètement dérouté, perd ses moyens et prend ses jambes à son
cou.
(Lucien Pellepan, Énantioses profectives)
jeudi 21 mai 2020
Vivant
L'homme se croit « vivant » parce qu'il parle, écrit, crée
des concepts, manie la brouette, charroie des cailloux et fait des
plates-bandes... Mais un tel mode d'existence est larvaire car
terriblement limité. Ce n'est qu'après qu'il a vu le pachynihil que les
énergies transfiguratrices qu'il porte en lui jaillissent et deviennent
opérantes. De nouveaux sens se forment ainsi que des organes subtils.
L'homme retrouve son unité primordiale et s'équilibre dans son corps,
son âme et son esprit. Le voici, grâce à l'idée du Rien, affranchi de la
morsure des événements provenant de la « réalité empirique », qui
auparavant le rendaient comparable à une épave ballottée par les flots.
(Lucien Pellepan, Énantioses profectives)
mercredi 20 mai 2020
Désert
Le désert est un symbole cher aux nihiliques : il
représente le renoncement (au « fétide et rébarbatif réel ») et la pureté
(du pachynihil). Le sol du désert résulte d'une usure. Ayant perdu en
quelque sorte sa substance, il échappe à toute corruption. Situé à la
cime du dépouillement, il peut être à la fois stérile ou fécond, tout
comme l'idée du Rien.
(Lucien Pellepan, Énantioses profectives)
lundi 18 mai 2020
dimanche 17 mai 2020
Sanctuaire
Il existe des « lieux saints » où l'on ne peut pénétrer
sans préparation, et qui ne sont accessibles qu'à certaines personnes.
A. J. Festugière cite le cas de Thoas qui, n'osant pénétrer dans
l'adyton du temple de Tauride, appelle Iphigénie de l'extérieur en lui
demandant de s'avancer vers la porte. Le pachynihil est l'un de ces
lieux saints. Pour avoir le droit d'y entrer, il faut d'abord passer
avec succès l'épreuve dite « du taupicide ». Quant à ceux qui échouent, on
leur fait subir — pour leur apprendre à vivre ? — une deuxième
épreuve dite « du lavage d'estomac ».
(Lucien Pellepan, Énantioses profectives)
samedi 16 mai 2020
Surdité
Dans son De ædificio Dei, Gerhoch von Reichersberg écrit
que « la structure de l'univers est ordonnée comme il convient » (tota
universatis structura convenienter ornatur). Interrogé à ce sujet par
Georges Charbonnier, l'homme du nihil lui répondit qu'il préférait « entendre ça que d'être sourd ».
(Lucien Pellepan, Énantioses profectives)
vendredi 15 mai 2020
Cogito
Son sens aigu du ridicule conduisit très tôt l'homme du nihil à mettre une certaine distance entre lui-même et ses « pensées ».
(Lucien Pellepan, Énantioses profectives)
jeudi 14 mai 2020
Comme tout
M. Bouboule : Alors, ça boume ?
L'homme du nihil :
J'expérimente une solitude au sein de laquelle on ne peut plus qu'aller
et venir à l'intérieur de son propre cerveau.
M. Bouboule : Ah ? Ça ne doit pas être drôle.
L'homme du nihil : Non, mais... c'est comme tout.
M. Bouboule : Eh oui... c'est comme tout...
(Lucien Pellepan, Énantioses profectives)
mercredi 13 mai 2020
Au théâtre ce soir
La vie de l'homme du nihil n'est pas un mélodrame à la Pixérécourt ; c'est une comédie larmoyante à la Nivelle de la Chaussée.
(Lucien Pellepan, Énantioses profectives)
mardi 12 mai 2020
lundi 11 mai 2020
Justification
« L'homme du nihil se
méprisait tellement lui-même et tout ce qu'il faisait, que jamais il
n'aurait mis au jour aucun de ses ouvrages, s'il n'eût consulté que
l'humble opinion de son cœur. Plein de la pensée et du sentiment de son
néant, qui ne le quittaient point, il redoutait tout ce qui pouvait le
faire estimer des hommes et lui attirer de la considération. S'il prit
la plume pour composer quelques ouvrages baroques, ce fut uniquement
dans le désir de répandre les flammes du pur dégoût qui le dévorait
intérieurement. » (Stylus Gragerfis, Une vie dans le Rien)
(Lucien Pellepan, Énantioses profectives)
dimanche 10 mai 2020
À Amsterdam
De passage à Amsterdam et confronté au choix de visiter le musée Van Gogh, celui de la maison de Rembrandt, les deux, ou rien, l'homme du nihil choisit... — rien.
(Lucien Pellepan, Énantioses profectives)
samedi 9 mai 2020
Adieux à Gand
Dans un beau passage, Ménandre compare la vie à une foire : partout foule, bruits, voleurs, joueurs de dés, divertissements de toute sorte. Plus tôt on s'en va, mieux cela vaut. Si l'on tarde et s'obstine, on se condamne à subir les affres du vieillissement, et à passer d'ennuyeuses soirées auprès du feu, face à une « mégère difforme au faciès d'hippopotame ». Pour s'en aller, Ménandre préconise l'emploi du taupicide ou d'un revolver Smith & Wesson chambré pour le .44 russe.
(Lucien Pellepan, Énantioses profectives)
vendredi 8 mai 2020
Mousserons
« J'ai passé ma vie à faire le mort, déclara l'homme du nihil. Allongé sur mon matelas-tombeau, un torchon sur les yeux, les mains croisées sur la poitrine...
— Et les mousserons ? » demanda le père Théraponte.
(Lucien Pellepan, Énantioses profectives)
jeudi 7 mai 2020
Paradoxe de Liem
Le paradoxe de Liem réside dans la divergence constatée entre le régime alimentaire de certains vertébrés et celui auquel leur denture paraît adaptée. Il a d'abord été observé par le biologiste américain Karel F. Liem chez un poisson d'eau douce mexicain, Herichthys minckleyi. L'une des variétés de ce poisson, un cichlidé endémique de Cuatro Ciénegas (nord du Mexique), a des dents pharyngiennes plates, qui semblent adaptées à l'écrasement d'objets durs tels que des coquilles. Pourtant, ces poissons négligent les escargots et consomment essentiellement des aliments tendres. Autre exemple : les gorilles de la forêt de Bai Hokou (réserve de Dzanga-Sangha, Centrafrique), qui ont des molaires aiguisées propres à broyer des végétaux durs (tiges, feuilles) et un système digestif capable d'assimiler la cellulose, mais recherchent pourtant les fruits tendres et sucrés. Enfin, les mangabeys à joues blanches du parc de Kibale (sud-ouest de l'Ouganda) ont des molaires plates et recouvertes d'un émail épais adaptées à la fracturation d'aliments durs et cassants comme des noix et des graines. Malgré cela, ils mangent surtout des fruits charnus et des feuilles jeunes.
Une explication possible de ce paradoxe, avancée par le biologiste « nihilique » Alvin J. Merriwether, met en jeu l'idée du Rien : la denture est en fait adaptée à des conditions difficiles, rares mais cruciales pour la survie de l'espèce, celles où la « réalité empirique » perd son sens. Et de fait, il a été observé que les gorilles et les mangabeys à joues blanches se rabattent sur des végétaux ou des graines durs quand les poigne la pensée que « rien n'est ».
(Lucien Pellepan, Énantioses profectives)
mercredi 6 mai 2020
Paradoxe de l'amitié
Le paradoxe de l'amitié est un phénomène découvert par le sociologue Scott L. Feld, qui consiste en ceci qu'un individu possède en moyenne moins d'amis que ses amis. Il ne s'agit d'un paradoxe qu'en apparence, car ce phénomène bien réel peut s'expliquer par certaines propriétés mathématiques des « réseaux sociaux » (l'inégalité de Cauchy-Schwarz notamment). Fait remarquable, l'homme du nihil constitue un cas d'inapplicabilité de la règle car il n'a pas d'amis : il est ce qu'on appelle vulgairement un « rémi ».
(Lucien Pellepan, Énantioses profectives)
mardi 5 mai 2020
Déplaisir
Après qu'il eut été comme qui dirait « mis au monde », l'homme du nihil se trouva fort marri (il eut un extrême déplaisir) de se voir affublé d'un Moi.
(Lucien Pellepan, Énantioses profectives)
lundi 4 mai 2020
Source
Dans le recueillement et la concentration, l'homme se saisit dans son écrasante solitude. Qu'il persévère, qu'il pénètre plus avant dans le mystère de son intériorité, le voici animé, s'abreuvant à la source d'eau vive qui ruisselle en lui : le pachynihil.
(Lucien Pellepan, Énantioses profectives)
dimanche 3 mai 2020
Paradoxe de Moravec
Le paradoxe de Moravec tient en ceci que « le plus difficile en robotique est souvent ce qui est le plus facile pour l'homme ». Énoncé par le roboticien Hans Moravec, ce paradoxe indique qu'il est beaucoup plus facile de faire simuler par un programme informatique le raisonnement de haut niveau que les aptitudes sensorimotrices humaines. Selon Marvin Minsky, cette situation paradoxale peut s'expliquer par le fait que, lorsque le cerveau humain maîtrise parfaitement une tâche, celle-ci ne s'exécute pas consciemment et n'est donc pas reconnue comme difficile. Il n'en va pas de même des tâches faisant intervenir des notions complexes telles que celle de pachynihil. Et il est exact qu'attraper un tournevis dans une boîte à outil paraît — à tort s'il faut en croire Minsky — plus facile que de concevoir que « rien n'est » !
(Lucien Pellepan, Énantioses profectives)
samedi 2 mai 2020
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