« Quand j'entends le mot vivre, je sors mon revolver ou du poison. » (Luc Pulflop)
mardi 23 avril 2019
Bas les masques
La « raison pure » prétend nous protéger de la présence inquiétante, sauvage du Rien : « Nous avons figé, épaissi les notions abstraites et les avons finalement confondu avec l'insaisissable réel », affirme Gragerfis dans son Journal d'un cénobite mondain. Embrasser le pachynihil consiste à enlever ce masque, à rejeter cette réalité familière, mais mensongère, et à nous mettre en présence des « choses mêmes » (pour parler comme Husserl). C'est là un geste spécifiquement métaphysique ! L'idée du Rien s'impose alors comme un regard neuf (ou un retour à un très ancien regard) qui, au lieu d'éloigner, rapproche — de l'infini infundibuliforme.
(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)
Phycis
10 mai. — Guillaume Morel écrit que « le phycis de Pline est un poisson de mer que nous nommons mole, et les Vénitiens lepo ».
(Barzelus Foukizarian, Journal ontologique critique)
Incomplétude et glomérulosité du réel
« Étrange réalité ! Quelque chose semble manquer en elle... » (Erwin Schrödinger, L'esprit et la matière, p. 191) — Ce jugement est confirmé par Gragerfis qui précise dans son Journal qu'« il a toujours trouvé à la réalité empirique quelque chose de louche et même de gloméruleux ».
(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)
lundi 22 avril 2019
Inferno
L'enfer, ce sont les gros viscères anonymes de la matière.
(Luc Pulflop, Prière d'incinérer. Dégoût)
Une abominable gastronomie
9 mai. — Malinowski raconte qu'aux îles Trobriand (dans le Pacifique), les enfants d'un homme « décédé » le déterrent après plusieurs semaines, ouvrent sa jambe en décomposition et sucent la moëlle du tibia.
(Barzelus Foukizarian, Journal ontologique critique)
Étonnement
À chaque instant, l'étonnement rajeunit le regard : « rester là comme un enfant à m'étonner et me réjouir en silence quand je suis dehors sur la plus proche colline » : telle est pour Hölderlin l'attitude du poëte. Et de même l'homme du nihil :
« n'importe quoi me surprend : une touffe d'herbe sous des
arbres, l'ombre, la couleur pâle, presque surnaturelle, du
pachynihil, la temporalité du temps, la mortalité de
l'être mortel, l'haeccéité... »
Eh oui, cher homme du nihil. L'idée du Rien a le pouvoir de nous faire redevenir des enfants émerveillés et joyeux. Mais il arrive que s'y mêle le sentiment du mystère, et même la sorte de crainte qu'inspire toute rencontre authentique avec l'« absolu ténébreux ». Alors... achtung bicyclette !
(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)
Cœnure
Au dire de Gragerfis, le cœnure serait la larve d'une espèce de ténia vivant dans le cerveau des moutons et dans la cavité viscérale des lapins.
(Luc Pulflop, Prière d'incinérer. Dégoût)
Garum
8 mai. — Rondelet (De piscibus marinis, p. 141) parle d'une espèce de garum que l'on préparait de son temps, en laissant fondre des picarels dans la saumure, et dont il avait goûté d'excellent chez le célèbre évêque de Montpellier, Guillaume Pélicier ; mais on n'en trouve pas mention dans les auteurs plus modernes, et il ne semble pas que l'usage s'en soit conservé.
(Barzelus Foukizarian, Journal ontologique critique)
dimanche 21 avril 2019
Questions de granit
La constatation du Rien (Claudel l'a dit en termes inoubliables) est en relation avec une certaine réalité démesurée, non mesurable, qui échappe aux « mouches molles du savoir » (Jutique). Toute révélation du pachynihil naît de la rencontre avec une démesure qui déchire le Dasein et l'ouvre à l'« infini infundibuliforme » (Banquine) ; elle naît de l'étonnement et de l'incertitude. C'est pourquoi la « philosophie » de l'homme du nihil est toute pleine de points d'interrogation, de ces questions à la fois frivoles et pondéreuses — que Gragerfis appelle des « questions de granit » — celles que posent à la fois les fous et les métaphysiciens et auxquelles il n'y a de réponse qu'ailleurs.
(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)
Fatalitas !
Le boyau culier est comme une antichambre de l'inéluctable.
(Luc Pulflop, Prière d'incinérer. Dégoût)
Page de journal
7 mai. — Sous Psamménit, fils d'Amasis et son successeur, le cruel Cambyse, roi de Perse, envahit l'Égypte, tua le roi et les principaux citoyens, exerça partout une égale fureur et y mit le comble par le meurtre sacrilège du bœuf Apis.
(Barzelus Foukizarian, Journal ontologique critique)
Interlude
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radical quinquet la passion que nourrissait Simenon pour
la philosophie, et tout particulièrement pour l’infernale
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Une idée vivifiante
L'idée du Rien n'est pas un jeu, un divertissement en marge de la vie : elle nous est indispensable ; elle nous ranime en débrouillant nos relations avec la « réalité empirique ». Bref, elle nous rend à nous-mêmes en même temps qu'elle nous ramène à notre vraie patrie : le pachynihil.
(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)
Un « roi de la déconne »
6 mai. — Xénophane croit que, par ses parties inférieures, la terre a jeté des racines à une profondeur infinie, et qu'elle est un composé d'air et de feu.
(Barzelus Foukizarian, Journal ontologique critique)
samedi 20 avril 2019
Phares
Les suicidés philosophiques sont les médiateurs du « lointain » ; ils ont, comme disait Vigny, le « regard tourné vers l'horizon [du Rien] » ; ils nous entraînent ainsi au-delà de nous-mêmes. Leurs œuvres fulgurantes et brutales sont « de petites lanternes où brille le reflet du pachynihil » (Gragerfis), lumière qui nous attire, nous appelle parce qu'elle est accordée à ce qu'il y a en nous de plus secret. C'est pourquoi « tout homicide de soi-même s'ouvre comme une porte, comme une fenêtre », nous aidant à respirer mieux.
(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)
Acétabule
L'acétabule, cette cavité où s'insère la patte de derrière des insectes, a elle aussi sa place dans la réalité empirique, immense capharnaüm de tous les déclassés.
(Luc Pulflop, Prière d'incinérer. Dégoût)
Crocus
5 mai. — Selon Idace, c'est au début du cinquième siècle que Crocus, roi des Vandales, fit irruption dans les Gaules. Grégoire de Tours, cependant, place cette irruption dans le troisième siècle. Se peut-il qu'il ait confondu avec un autre Crocus ?
(Barzelus Foukizarian, Journal ontologique critique)
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Positivisme logique
« L'homicide de soi-même, écrivait en 1932 Rudolf Carnap, est le moyen d'expression adéquat, la métaphysique le moyen d'expression inadéquat d'un sentiment de l'existence. » Pour surprenante qu'elle puisse paraitre, cette déclaration n'a rien que de logique venant du flambeur invétéré du Cercle de Vienne. On sait à quel point Carnap a réduit l'aire de pertinence du langage, évacuant les énoncés non vérifiables, les concepts sans fondement « positif », toutes les facilités de l'expression abstraite qui font illusion et encombrent. Or, une fois mis au rancart tout ce « saint-frusquin » (Gragerfis), que reste-t-il pour exprimer son sentiment de l'existence sinon le taupicide ?
(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)
vendredi 19 avril 2019
Révulsif
Les vésicatoires, les sinapismes et les rubéfiants agissent assez souvent comme des révulsifs. Le monstre bipède — le fameux « autrui » du philosophe Levinas — également.
(Luc Pulflop, Prière d'incinérer. Dégoût)
Tonnerre
4 mai. — Le vénérable Bède dit que saint Ceadde, qui fut évêque d'York au septième siècle, avait une peur effroyable du tonnerre ; et que quand il s'élevait quelque orage, il se mettait en prières et rassemblait le peuple à l'église pour apaiser la colère divine.
(Barzelus Foukizarian, Journal ontologique critique)
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