« Quand j'entends le mot vivre, je sors mon revolver ou du poison. » (Luc Pulflop)
mercredi 24 octobre 2018
Un passe-temps comme un autre
J'étudie les boues liquides, la poussière, les scories infundibuliformes.
(Luc Pulflop, Prière d'incinérer. Dégoût)
Une fin laborieuse
« Malgré les efforts des chevaux qui étaient jeunes et vigoureux (et peut-être trop) ce dernier supplice durait depuis plus d'une heure, sans qu'on en put prévoir la fin. Les médecin et chirurgien attestèrent à Messieurs les Commissaires qu'il était presque impossible d'opérer le démembrement si l'on ne facilitait l'action des chevaux en coupant les nerfs principaux qui pouvaient bien s'allonger prodigieusement, mais non pas être séparés sans une amputation ; sur ce témoignage, Messieurs les Commissaires firent donner ordre à l'exécuteur de faire cette amputation, d'autant plus que la nuit approchait, et qu'il leur parut convenable que le supplice fût terminé auparavant. En conséquence de cet ordre, aux jointure des bras et des cuisses on coupa les nerfs au patient ; on fit alors tirer les chevaux, après plusieurs secousses, on vit se détacher une cuisse et un bras, Damiens regarda encore cette douloureuse séparation : il parut conserver la connaissance après deux cuisses et un bras séparés de son tronc ; ce ne fut qu'au dernier bras qu'il expira. » (A.-A. Le Breton, Pièces originales et procédures du procès fait à Robert-François Damiens, tant en la prévôté de l'Hôtel qu'en la Cour de Parlement, Pierre-Guillaume Simon, Paris, 1757)
(Thésar du Jin, Carnets du misanthrope)
Navigateur en solitaire
L'homme du nihil est pareil à un Lapon qui court les mers, seul sur son bateau dans la tempête, fouetté par les embruns du Grand Rien.
(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)
Principe de l'angoisse
Jacob Boehme affirme que « la troisième qualité de la Nature est le brisement de la dureté astringente ; elle est le principe de l'angoisse et de la volonté propre, où la volonté éternelle veut se manifester, c'est-à-dire, elle veut être un feu et une lumière, un éclair et un éclat, où paraissent les puissances, les couleurs et les vertus. » — « C'est bien ce que je pensais », murmure l'homme du nihil en serrant convulsivement son flacon de taupicide.
(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)
Raphé du mésolobe
« La couche corticale, réduite en bouillie, se détache par plaques larges et épaisses. Toute la matière qui constitue le mésolobe et ses irradiations du côté droit, est ramollie, diffluente, de couleur rosée mêlée de tâches d'un rouge plus vif. L'altération s'étend à la substance blanche, qui double les circonvolutions de la région supérieure ; elle s'arrête à un millimètre du raphé du mésolobe. » (Maximien Parchappe, Traité théorique et pratique de la folie, Paris, 1841)
(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)
Le Prisonnier
Encellulé dans une haeccéité phrastique semblable à celle du lycaon.
(Luc Pulflop, Prière d'incinérer. Dégoût)
Capharnaüm
Curieux cabinet que le conscient intérieur d'un suicidé philosophique ! On y trouve des pieuvres réfrigérées, un couteau de cuisine, quatre demi-bœufs, une fine tranche d'un désespoir véliforme et zingibéracé, une barrique de rhum, des scarabées gigoteux, un peu de poudre et une poignée de cartouches Vertterli. Il n'y manque que la chaise percée du Dalaï Lama.
(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)
mardi 23 octobre 2018
Origines britanniques du Moi ?
Le Moi, par ses manières de butor, sa balourdise et son enflure, évoque assez ces « polypes charnus, gigantesques zoophites fongueux et spongieux, indigènes de la Grande-Bretagne » satirisés par Pétrus Borel dans Madame Putiphar.
(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)
Entéléchie
En 1891, le biologiste Hans Driesch a montré, en dissociant deux blastomères d'oursin, que chacun des blastomères peut se développer d'une façon complète. Faut-il en conclure que l'autonomie de la vie est réalisée par l'intermédiaire de l'entéléchie ? Ce serait tout de même « un peu fort de café » !
(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)
Fugacité
Dans le cas d'un mélange gazeux, la quantité correspondant au produit de la pression partielle et du coefficient d'activité a la dimension d'une pression et est nommée — thaumaturgie du mot ! — fugacité.
(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)
Contre William Blake
Le grain de sable ne contient rien autre chose que sa propre ineptie.
(Luc Pulflop, Prière d'incinérer. Dégoût)
Nuisances sonores
Quoi qu'en pense le solipsiste, il nous paraît, à nous du Jin, que l'existence du monstre bipède — le fameux « autrui » du philosophe Levinas — est suffisamment attestée par le bruit infernal dont il accable sans cesse nos tympans — le bruit même de l'haeccéité. Le poète Tibulle semble en avoir souffert de même, puisqu'on lit dans ses Élégies : Nunc ego me surdis auribus esse velim !
(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)
Interrogation
Le suicidé philosophique qui manque à lui-même n'est-il pas toujours un suicidé philosophique défectueux ?
(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)
De la certitude
« Messieurs, j'ai bien l'honneur de vous assurer que ceci est ma main. »
(Luc Pulflop, Prière d'incinérer. Dégoût)
Huile de tourlourou
« M. Virey a fait connaître à la section de Pharmacie de l'Académie royale de Médecine, un médicament huileux employé par les nègres pour soulager les douleurs dues à l'haeccéité. Cette huile s'obtient en exposant les viscères, le foie, les intestins du crabe, à l'action de la chaleur, exprimant ensuite, et tirant à clair. » (A. Chevalier, A. Richard, J.-A. Guillemin, Dictionnaire des drogues simples et composées, Béchet jeune, Paris, 1828)
(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)
lundi 22 octobre 2018
Abomination
Peu importe à l'homme du nihil de savoir qui a conçu l'abomination que les philosophes nomment « réalité empirique », ni pourquoi elle est là, car il faut lui rendre cette justice qu'elle est d'une laideur assez éloquente pour frapper d'inutilité toutes les explications possibles. Le fait est qu'elle est là, qu'elle s'est introduite par force dans son « conscient intérieur », et le scandale est grand.
(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)
Oubli coupable
Vers 249 avant notre ère, un troisième concile bouddhique — genre de colloque de Cerisy avant l'heure — se déroule à Pataliputra, sous l'impulsion du roi Asoka. Les disciples y abordent les thèmes de l'existence de l'âme, tentent de mettre au point une certaine orthodoxie du bouddhisme et définissent le Moi « un empilement incertain, bringuebalant et sans cesse compensé » — ce qui ne laisse pas d'évoquer une motocyclette chargée de cages à poules. Cependant, inconcevable oubli que devra réparer l'homme du nihil, ils omettent de définir aucun protocole de dilacération du Moi ! — Ô vanité des vanités ! Ô rictus bestial de l'existence !
(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)
Travail intérieur
La paix que procure l'idée de l'homicide de soi-même n'est pas donnée par la nature, dès l'abord, complète. Elle suppose un travail intérieur — par exemple sur un « matelas-tombeau » à la Heinrich Heine — où l'homme affronte sa peur de vivre et de mourir.
(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)
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