mardi 22 mai 2018

Totalité modale


Les parents de Heidegger ne s'entendaient pas et leurs disputes étaient fréquentes. Un jour, le père dit à son épouse en présence de Martin qui s'en souviendra toute sa vie : « Tu es si vieille et décatie que coucher avec toi, c'est comme coucher avec la mort. Franchement, j'en ai soupé (ich habe davon gesuppiert) ».

Malgré la brutalité apparente de cette déclaration, il est clair que nous avons affaire ici à une « totalité modale » qui correspond à une « intégralité herméneutique » du discours dévoilant. Ce concept de totalité, Heidegger montrera plus tard dans Sein und Zeit qu'il est opératoire non seulement dans le contexte de l'élaboration de la totalité des éléments qui constituent la structure du souci — ainsi dans le cas de son père —, comme totalité configurée par l'ensemble articulé des existentiaux ou comme intégralité de l'être-au-monde, mais aussi en ce qui concerne la totalité d'outils (Zeugganzheit, p. 68-69, 82, 103), la totalité de renvois (Verweisungsganzheit, p. 70, 75-76, 82), la totalité de tournures (Bewandtnisganzheit, p. 84.85, 87) qui constitue la mondanéité ou la totalité de places (Platzganzheit, p. 103, 111-112) formant la spatialité existentiale.


(Jean-René Vif, Scènes de la vie de Heidegger)

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