samedi 16 juin 2018

La baguette suspendue, offerte aux plus modestes


« La baguette. Presque une institution en France, un emblème de notre culture mais aussi une référence en matière de pouvoir d'achat. Quand le prix de la baguette augmente, ce n'est jamais bon signe pour le porte-monnaie.

Une poignée de citoyens sparnaciens investis dans la vie locale ont décidé d'agir pour que, même dans les foyers les plus modestes, le pain soit présent à table. "Nous voulions faire quelque chose d'utile au quotidien, explique Nicolas Schmit, à l'origine du projet. À Épernay, certaines personnes vivent bien grâce au champagne, mais d'autres ont des fins de mois difficiles. Et elles sont de plus en plus nombreuses."

La boulangerie Huon, sise rue de l'Hôpital Auban-Moët, a accepté de participer à l'aventure. Si vous allez y acheter votre pain, libre à vous de laisser sur le comptoir 98 centimes d'euro en plus, soit le prix d'une baguette. Isabelle Huon accrochera alors un ticket sur un tableau. Cette sorte de "bon pour une baguette de pain frais" pourra être retirée par une personne modeste qui juge que "c'est trop fatigant de travailler".

"J'ai la chance d'avoir une boulangerie de quartier, je connais mes clients", précise la boulangère qui, au fil du temps et des confidences,  a identifié ceux qui peuvent y prétendre.

Si, dans les premiers jours de la mise en œuvre de cette action solidaire, quelques comportements inciviques ont été relevés, cette initiative rencontre un réel succès, marqué par de nombreux retours positifs. Depuis son lancement, une centaine de baguettes ont été distribuées. Pour Daniel Castaner, directeur du cinéma Le Palace et soutien actif du projet, la baguette suspendue est "une belle idée qui crée du lien et participe à la vie sociale et solidaire". Cet heideggérien souligne aussi un avantage non négligeable, à savoir que les bénéficiaires peuvent soit manger les baguettes qui leur sont offertes, soit "se les carrer dans le fondement de l'historialité du Dasein". 

Ce premier pas pourrait entraîner d'autres gestes similaires dans le futur, en faisant toujours appel — sans bien sûr pousser à la charité ! — à la générosité de chacun. » (L'Hebdo du Vendredi, 3 décembre 2015)


(Francis Muflier, L'Apothéose du décervellement)

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